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Les meilleurs films et séries sur les serial killers selon Stéphane Bourgoin - interview

Le 11/03/2018 à 15:26
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Que se passe-t-il dans la tête d'un tueur ? C'est la question que se pose Stéphane Bourgoin depuis que sa femme a été violée et assassinée par l'un d'entre eux en Californie en 1976. A l'époque, aucun étude spécialisée n'existait sur les tueurs en série.

 

Afin d'avoir des réponses, Stéphane Bourgoin n'a pas hésité pas à se confronter aux assassins les plus déviants de notre époque. Depuis 1977, il a interviewé 77 tueurs en série. Dans son dernier livre Moi, Serial Killer, il laisse la parole à douze d'entre eux qui ont accepté de se confier à lui.

 

My Friend Dahmer

 

C'est à l'occasion de la sortie du film My Friend Dahmer, adaptation réussie du chef d'oeuvre de Derf Backderf (roman graphique qui raconte les années lycées de l'auteur à côtoyer le futur cannibale de Milwaukee) que nous avons pu le rencontrer.

Stéphane Bourgoin nous en dit plus sur Jeffrey Dahmer, sur le cinéma, les séries et sur les serial killers.

Pourquoi Jeffrey Dahmer fascine-t-il autant les Etats-Unis ?
Stéphane Bourgoin : Jeffrey Dahmer fascine par la portée absolument "ignoble" de ses actes. Il était nécrophile cannibale. Il s’était fabriqué un autel, un meuble noir où il avait disposé les têtes de ses victimes décapitées dont il avait retiré toute la chair avec du détergent et de l’eau bouillante. Il s'en servait pour se masturber ou pour se stimuler sexuellement. Il avait consommé des parties de corps. Il s’était même confectionné un harem sexuel parmi ses jeunes victimes en les lobotomisant. Alors qu’elles étaient inconscientes, il leur avait ouvert le crâne, versé de l’acide dedans pour les garder vivantes en tant qu’esclaves sexuels.

Ce qui avait frappé aussi les Américains, c’est qu’il aurait dû être arrêté bien avant. Mais les policiers ne se sont pas intéressés à ces disparitions de jeunes gays appartenant aux communautés afro américaines, hispaniques ou asiatiques. A un moment, une jeune victime se retrouve nue dans la rue, une jeune noire appelle les autorités, Jeffrey Dahmer arrive sur les lieux et parvient à convaincre la police que c’est son petit ami qui a trop bu alors que c’est visiblement un mineur. Les flics raccompagnent la victime au domicile de Dahmer qui la tue quelques heures plus tard. Ce jour là, il aurait suffit d’ouvrir une porte pour découvrir une victime éviscérée et démembrée allongée sur son lit depuis trois jours. Tout cela a été un choc par rapport à une enquête qui a été très mal menée. Le procès a été diffusé en direct à la télé américaine ce qui a encore plus marqué les esprits.
 

 

Qu'est ce qui rend le film passionnant à votre avis ?

Mon Ami Dahmer est tiré du chef d’oeuvre de Derf Backderf (voir notre interview de l'auteur) et s’intéresse à une période de la vie des tueurs en série dont on ne parle pas très souvent. A savoir leur enfance et leur adolescence où un certain nombre de signes alarmistes se mettent en place. C’est à dire acte de cruauté envers les animaux, pyromanie, problème d’énurésie, famille dysfonctionnelle, abandon parentaux, abus physique, psychologique ou sexuel sur l’enfant.

 

Ce qui est intéressant dans Mon Ami Dahmer c’est que Derf Backderf ne se donne pas le beau rôle.  Il dit d’ailleurs dans le roman graphique  "j’étais un beau salaud à l’époque car mes camarades de classe et moi avons encouragé Jeffrey Dahmer à commettre des actes comme des crises d’épilepsie en public pour nous faire rire". Il y a peut-être chez Derf Backderf une certaine forme de culpabilité sur ce qu’est devenu Jeffrey Dahmer. Quand nous nous sommes rencontrés, ce qui était intéressant c’est que lui l’a connu avant qu’il ne devienne un tueur et moi je l’ai rencontré 16 ans plus tard, une fois qu’il a été condamné pour les 17 personnes qu’il a tuées.

 

My Friend Dahmer

(le véritable Dahmer à gauche et celui du film à droite)


Quel genre de questions vous a posé Derf Backderf ?
On a beaucoup discuté. Il s’est rendu compte que la personnalité de Jeffrey Dahmer était déjà fixée lorsqu’il l’a connu.

Derf Backderf nous a expliqué que Dahmer avait des remords. Ce qui est rare pour les tueurs en série.
Ce qui n’existe quasiment pas chez eux. J’ai interrogé 77 tueurs en série depuis 1979. C’est le seul qui ait eu des remords sincères à mon avis. D’autres ont exprimé des remords mais plutôt comme une tactique soufflée par leurs avocats. Chez lui, les remords m’ont paru sincère. Tant au niveau de ses actes que par le fait qu'il a pris consciende d'avoir gâché entièrement sa vie. Avec le tueur en série Jeffrey Dahmer, on est confronté à ce que sont vraiment les tueurs en série. C’est à dire des pauvres types, des marginaux à la dérive. A de rares exceptions près, on est jamais confronté à des génies du crime comme le montrent des films comme Seven ou comme le Silence des Agneaux avec Hannibal Lecter. Les serial killers sont rarement aussi sophistiqués ou manipulateurs. J’en ai rencontré, Ed Kemper et Gerard Shaefer sont très intelligents. Mais la plupart du temps ce sont des pauvres types comme Jeffrey Dahmer.

 

My Friend Dahmer

(Derf Backderf et son roman graphique)


Il me semble que vous êtes en train de développer une série...
Oui. Avec le producteurs des Revenants. On vient juste de signer. Je serai le personnage principal. La série racontera mes enquêtes et ma vie sous forme de fiction. Cela devrait s’appeler Serial Hunter. Un acteur jouera mon rôle. J’espère aussi pouvoir interpréter un rôle. Celui d'un taré par exemple qui me harcèlerait pendant une conférence comme cela m’arrive.

Cela vous arrive souvent ?
Oh oui. Je suis suivi par quelques personnages très curieux. Obligatoirement.

C’est un peu effrayant…
J’ai l’habitude. Mais ma compagne a été menacée de mort plusieurs fois. Moi aussi.

Le cinéma est votre seconde passion ?

Absolument. J’ai 20 000 films chez moi. J’ai signé des centaines de bonus pour des films en DVD, pas uniquement sur les tueurs en série. Mes quatre premiers bouquins étaient consacrés au cinéma.

Justement, quel est pour vous LE film sur les tueurs en série ?
Mon film préféré est un film très malaisan : Henry portrait of a serial killer. Il vous met dans un état de malaise permanent. J’adore aussi Le Sixième Sens (Manhunter en vo) de Michael Mann mais pas du tout le remake affreux qui a suivi. J'adore aussi des grands classiques comme Psychose ou un certain nombre de films noirs des années 40 comme le voyage de la peur de Ida Lupino. Il y a eu beaucoup de films de serial killers bien avant la mode lancée par le Silence des Agneaux, qui est par ailleurs un standard.

 

 My Friend Dahmer

 

Et le cinéma français dans tout ça ?
Il y a un film français vraiment intéressant qui s'appelle Scènes de Crime réalisé par Frédéric Schoendoerffer (avec Charles Berling, André Dussollier, 2000). La première victime porte d’ailleurs mon nom. Il y a aussi des films moins réussis comme Six-Pack (d'Alain Berbérian, 1999) qui pourtant est tiré d’un excellent roman de Jean-Hugues Oppel. Mais le film a été raté même si Bernard Fresson y joue mon rôle. A l’époque, j’étais encore libraire spécialisé dans les tueurs en série.

Que pensez-vous d’une série comme Mindhunter ? On pense à votre parcours.
Tout à fait. Dans, Mindhunter, le tueur en série vedette "Ed Kemper" est excellemment joué par Cameron Britton. J’ai passé 300 heures d’entretien avec Ed Kemper, 2m15, 160 kilos. Quand on voit la série et les 100 minutes de mon interrogatoire avec Ed Kemper que j’ai posté sur youtube, on se rend compte que les scénaristes ont puisé mot pour mot les réponses qu’il m’a donné. Sauf que le véritable Ed Kemper était encore plus intense.

 

 

Dans Mindhunter, le terme serial killer n'existe pas.

Non. Avant les années 1970, le terme serial killer n'existait pas. On disait "tueur fou" / "mass murderer" aux Etats-Unis. Le terme serial killer a été soit disant inventé par deux agents du FBI, comme ceux de Mindhunter.  Mais en réalité, il est né de l'imagination d'un commissaire de police allemand, Gennat, qui en 1932 évoque un "serial murderer" pour le cas de Peter Kürten, le "vampire de Düsseldorf".

 

Quelles sont les autres séries qui vous ont marqué ?
Des séries moins connues. Comme la Part du Diable (Touching Evil) avec Robson Green qui est passée inaperçue en France quand elle a été diffusée à l’époque sur Jimmy. Il y aussi Suspect numéro 1 (Prime Suspect), série britannique et aussi une série québécoise Fortier (2000-2004). Elles sont moins connues que Esprits Criminels ou Dexter mais méritent vraiment d’être redécouvertes.

Que pensez-vous de Dexter ?
C’est une excellente série. Je sors le 5 avril un livre qui s’appelle L’homme qui rêvait d’être Dexter. Il faut savoir que le personnage de Dexter est basé sur un vrai flic à Miami qui ne tuait que des méchants avec un rituel particulier. Il s’appelait Manuel Pardo Jr. Il a été exécuté en 2014. Dans la saison 3 de Dexter, le procureur joué par Jimmy Smits s’appelle Miguel Prado Junior.

 

My Friend Dahmer

 

Ce qui est dingue, et cela va intéresser les lecteurs de FilmsActu, c’est que le personnage de Dexter inspire un réalisateur de films, Mark Twitchell, qui a fait un fan film de Star Wars, Star Wars Secrets Of The Rebellion, et qui a aussi tourné un thriller qui s’appelle House Of Cards, mais qui n’a rien à voir avec la série, dans lequel un tueur en série à la Dexter dépèce, tue, et démembre ses victimes dans un garage. 15 jours après le tournage, le réalisateur tue dans la réalité ses victimes et les démembre dans le même garage. C’est hallucinant. En même temps, il écrivait un journal intime qui s’appelle SK Confessions et qui raconte sa montée en puissance pour devenir serial killer. Ces 66 pages m’ont été confiées par les policiers qui ont géré cette enquête. Je publie pour la première fois avec les photos de tournage de ses films. On le voit avec Chewbacca, Han Solo, la princesse Leia. Ce réalisateur avait aussi une page facebook au nom de Dexter Morgan. C’est dingue que voir qu’un fait divers est influencé une série qui à son tour a influencé un tueur. On mettrait celà dans une fiction, personne n’y croirait.

 

Quel tueur qui n’a pas encore été adapté au cinéma serait un excellent sujet de film ?
Gérard Schaefer, le flic shériff adjoint suspecté du meurtre de trente femmes. C’est sûrement le plus grand pervers que je n’ai jamais rencontré.

Quel est le film que vous attendez en ce qui concerne les serial killers?
Celui sur Ted Bundy avec Zac Efron qui sera un marqueur intéressant d’un point de vue cinématographique.

 Thriller

(Zac Efron en Ted Bundy face à James Hetfield de Metallica).

 

My Friend Dahmer






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