Captain America 2 : Fini de rigoler ! [Critique]

Le producteur Kevin Feige nous avait prévenu, Captain America Le Soldat de l’Hiver a été intégralement conçu comme un thriller politique, avec un ton sérieux, une atmosphère paranoïaque / conspirationniste et de très nombreuses répercussions qui mèneront, in fine, vers Avengers 2. Pour ce faire, la production a mis les petits plats dans les grands en s'adjoignant les services du plus grand spécialiste du genre en la personne de Robert Redford (Les Trois Jours du Condor, Les Hommes du Président). Mais autant l'écrire tout de suite, si ces intentions étaient particulièrement louables, elles s'effondrent bien vite, plombées par des défauts qu'on croirait presque inhérents aux films Marvel : une histoire manichéenne, simpliste et bourrée de retournements de situations extêmement prévisibles.

Cependant, si cette fameuse note d’intentions n’est à priori pas respectée, le film réussit néanmoins à en offrir au spectateur pour son argent. Et de bien belle manière ! En effet, la plus grosse surprise de cette suite réside avant tout dans l’énorme travail des frères Russo, dont la mise en scène, haletante et percutante, se paie le luxe d’aligner les morceaux de bravoure avec une intensité jusqu’ici rarement atteinte dans un film Marvel. A ce titre, l’énorme bataille urbaine parfaitement chorégraphiée qui clôt le 2ème acte devrait, à n’en pas douter, satisfaire les fans d’action pure et dure. Avec toutes ces qualités techniques, il est d’ailleurs rageant de voir que certaines séquences entières sont quelque peu gâchées par une photo très fade qui manque à la fois de chaleur et d’identité.

Mais tout dans Captain America 2 n’est pas qu’une histoire de grand spectacle rondement mené, bourré de scènes d’action explosives et ultra badass. Réglé comme du papier à musique, la structure dramatique laisse aussi le film respirer, s’offrant le luxe de développer tout ce qui fait la force du personnage : l’exploration de ses propres failles émotionnelles. Car le Captain est avant tout un homme déraciné, qui a tout perdu et qui cherche maintenant à se reconstruire. C’est aussi pour cela que les séquences dites "intimistes" (comprendre : une séquence dialoguée sans aucune explosion, course-poursuite, rixe au corps-à-corps ou lancement intempestif de bouclier) en deviennent parfois étonnement bouleversantes, comme les très attendues retrouvailles avec Peggy Carter. Mélancolique certes, mais le film n’en demeure pas moins l’héritier spirituel d’Avengers avec un récit saupoudré d’un humour référentiel qui fait toujours mouche et parsemé d’easter eggs qui sauront, à coup sûr, combler les aficionados de la grande mythologie Marvel.

Une nouvelle fois, Chris Evans rempile dans le costume de Captain America et délivre à la perfection toute l’ambiguïté de son personnage, dualité d’un petit homme au cœur vaillant coincé sous une impressionnante montagne de muscles. Autrefois raillé et parfois même ignoré par ses propres compagnons de guerre, son personnage a néanmoins su évoluer et s’adapter à ce monde qui n’est pas le sien. Exit donc le phrasé d’avant-guerre, les costumes vintage et le patriotisme naïf, le "Cap" nouveau est arrivé et prouve ici, avec un enchaînement de bastons pyrotechniques sévèrement burnées, qu’il a une place tout à fait légitime et même essentielle au sein du fameux groupe de super-héros. A ses côtés, la Veuve Noire, toujours impeccablement interprétée par la très sexy Scarlett Johansson, passe cette fois au premier plan. Désormais coéquipière plus que simple suiveuse, son personnage gagne en profondeur tout en conservant les parts d’ombres et de mystères qui seront un jour, on l’espère, dévoilés lors d’un film qui lui sera intégralement consacré. Même les "petits nouveaux", à savoir le Faucon et le Soldat de l’Hiver apportent un nouveau souffle d’air frais bienvenu et permettent, de par leurs spécificités communes (des ailes pour l'un, un bras bionique indestructible pour l'autre), de dynamiser constamment l’action et d'offrir un spectacle visuel tous les instants.

Captain America 2 s’inscrit donc parfaitement dans l’énorme production feuilletonnante instaurée par Joss Whedon tout en faisant évoluer de manière drastique le personnage de Captain America. Notre héros gagne en effet en prestance, puissance et assurance et il ne fait désormais plus aucun doute qu’il ne se laissera plus jamais marcher sur les pieds au sein des Avengers. Malgré un scénario qui manque cruellement d'audace, le film demeure visuellement détonnant, parfaitement rythmé et remplit à la perfection son contrat de blockbuster calibré, assurant un grand spectacle visuel et pyrotechnique avec tout ce qu’il faut d’action, de fun, d'humour… et d’héroïsme. Et  c'est définitivement bien là le plus important.