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Eden Lake

Le 11/10/2008 à 13:50
Par
Notre avis
7 10

On n'attendait pas grand-chose de révolutionnaire de la part de cette énième histoire de couple dont le week-end romantique en plein no man's land tourne inévitablement au cauchemar. Mais si le schéma de ce petit film anglais de James Watkins respecte à la lettre les codes du genre, la bonne surprise, c'est qu'il puise surtout ses inspirations dans les classiques des années 1970 (Délivrance, pour ne citer que celui-ci) pour atteindre un niveau de barbarie assez dérangeant. Développant habilement son propos perturbant sur la violence juvénile, le cinéaste signe un thriller à la fois haletant et sanglant, dont le dénouement inattendu laisse une terrible sensation d'effroi teintée d'un étrange sentiment de désespoir.



Critique Eden Lake

Critique Critique Eden Lake

 

Décidément, il est déconseillé d'aller faire du camping le week-end en pleine campagne au beau milieu d'une immense forêt, surtout pour deux jeunes gens sur le point d'officialiser leur liaison et qui n'attendent visiblement qu'une situation extrême - au hasard, une chasse à l'homme - pour se rendre compte à quel point ils nageaient justement dans le bonheur. Sur le papier, Eden Lake (Little Terrors de son titre anglais) ne casse donc pas des briques avec son pitch cousu de fil blanc relevant du survival le plus basique et dont on entrevoit assez rapidement les futurs développements. Du moins c'est ce que l'on imagine, car si le film reprend efficacement les ficelles connues des amateurs du genre, il les utilise à bon escient pour appuyer un propos un peu moins conventionnel que prévu.

 

Critique Critique Eden Lake

 

Première chose appréciable, James Watkins a l'intelligence de ne pas nous plonger tête baissée dans l'action. Le cinéaste a visiblement bien révisé ses classiques des années 1970, à commencer par l'indémodable Délivrance de John Boorman, auquel on pense à plus d'une reprise pendant toute la première partie, ce qui ne tient pas uniquement au décor de forêt désolée qui environne les personnages mais aussi au rythme. Eden Lake prend ainsi le temps de faire monter la tension entre le jeune couple et ses agresseurs, de sorte que la violence qui s'ensuit s'avère être le fruit d'une véritable escalade, et non un simple prétexte destiné à enchaîner des séquences de sadisme totalement gratuites - dont le genre n'a que trop abusé ces dernières années. Mine de rien, à force de voir des survivals où les monstres/dégénérés sont d'emblée estampillés comme tels, et où les victimes semblent le devenir juste parce qu'elles font l'erreur de batifoler, cela fait du bien de suivre une histoire qui prend la peine de détailler graduellement les hostilités avant d'arriver à la situation censée constituer l'attraction majeure de l'expérience. Surtout lorsque les agresseurs s'avèrent être une bande d'adolescents hargneux - les "little terrors" du titre anglais - et laissés pour compte, vivant aux côtés d'adultes complètement indifférents à leur sort. Dérangeant à plus d'un titre, le sujet méritait un traitement digne de ce nom. Sans jamais verser dans l'analyse prétentieuse ou déplacée, Eden Lake développe habilement son propos sur la violence juvénile et les terribles mécanismes de l'effet de groupe lorsque les jeunes agissent en totale impunité. Un contenu subversif qui ne signifie pas qu'Eden Lake mente sur la marchandise. L'action joue en effet sans ménagement la carte du suspense haletant et comporte son lot de séquences sanglantes dans lesquelles le réalisme organique est largement de mise. A ce titre, il est intéressant de constater que les films prenant vraiment le temps d'installer leur atmosphère atteignent souvent un niveau de violence plus glaçant que les slashers actuels, dans lesquels la torture est devenu un pur argument de "divertissement" mais laisse étonnamment insensible.

 

Critique Critique Eden Lake

 

Réalisé par la même équipe que l'excellent The Descent (James Watkins était scénariste et réalisateur de seconde équipe sur le film de Jon Harris, lequel est monteur sur celui-ci), Eden Lake partage quelques points communs avec ce dernier, à commencer par sa manière de faire basculer son personnage principal, une jeune femme sans histoire, dans un état de tension extrême, l'instinct de survie impliquant des actions malheureuses voire quelques concessions avec la morale. L'actrice Kelly Reilly (évadée de L'Auberge Espagnole) inspire une empathie immédiate et forme un couple très crédible avec son partenaire Michael Fassbender (le démon sexy de Hex : la malédiction), tandis que le jeune Jack O'Connell parvient à apporter une épaisseur inattendue au personnage pourtant très primaire de Brett. L'occasion de rappeler à quel point la direction d'acteurs est importante même dans un film d'horreur, ce que certains cinéastes français semblent parfois oublier si l'on en croit les récentes incursions hexagonales dans le genre, souvent pleines de bonnes idées mais plombées par un jeu d'acteurs approximatif. Dans Eden Lake, aucun acteur n'évolue jamais en roue libre, aucune réplique ne sonne faux, chaque scène est efficace et transpire la crédibilité. Le résultat est évident : Eden Lake touche au but lorsque survient sa conclusion, à la fois tétanisante et émouvante, la meilleure idée du film résidant très certainement dans son tout dernier plan qui nous abandonne avec un réel sentiment de détresse.

 








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