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Francis Lawrence, réalisateur de clips

Le 23/12/2007 à 08:24
Par
Les clips de Francis Lawrence

Il y a des choses dans la vie qui sont dures à avaler. Il y a les bretzels oui. Il y a le fait qu’un ex-mannequin aphone arrive à vendre plusieurs millions d’albums. Il y a aussi le fait qu’un nain de jardin hyperactif arrive à sortir avec un ex-mannequin aphone qui a vendu plusieurs millions d’albums. Mais par-dessus tout, ce qui met vraiment en colère, c’est quand le talent et le travail d’un homme ne sont pas reconnus à leur juste valeur. Par exemple, pourquoi lorsqu’on parle de clips musicaux, ce sont toujours les mêmes noms qui reviennent sans arrêt ? Alors oui les Gondry, Jonze, Cunnimgham (et tous les autres qui ont eu le droit à voir leurs clips et pubs édités dans work of directors) sont doués. Oui ils ont su créer un univers qui leur est propre. Oui ils ont gardé une aura « d’auteur » dans un milieu bouffé par le fric. Mais pourquoi diantre ne parle-t-on que d’eux ?

 

Quid des autres, les besogneux, les « puent la sueur », ceux qui enchainent les clips comme des perles et qu’on traite comme des malpropres parce que pour gagner leur vie, ils ont dû filmer les vainqueurs d’American Idol et supporter les exigences de ces non stars absolues et de leur manager ? C’est bien joli d’avoir carte blanche pour faire un clip indé qui sera édité en DVD, mais cela ne reflète en rien le métier de clippeur. Non, les vrais, ceux qui méritent vraiment qu’on parle d’eux, ce sont les McG, les Jo Khan, les Marcos Siega, les David Meyers... ceux qui arrivent à pondre 15 clips par an sans (trop) se répéter, et tout en gardant l’espoir d’être considérés un jour comme autre chose que des mecs qui filment des filles en maillot de bain dans des low ride.

 

Et dans le genre, malgré plus de 90 clips sur son CV, Francis Lawrence appartenait à cette catégorie. Lui qui en 15 ans dans le milieu, a filmé sans arrière-pensée les rappeurs, les métaleux et les lycéennes en jupettes désireuses de casser leur image de sainte nitouche. Francis Lawrence, qui s’est vu offrir ce cadeau empoisonné que fut Constantine (parce que dans le style « débrouille-toi pour faire ce que tu peux avec un scénar qui tient pas la route 2 minutes » ce film s'impose), et que l’on accueillit à l’époque à grand coup de « tiens, v’la encore un clippeur qui se prend pour David Fincher et qui devrait retourner filmer les fesses de Beyonce plutôt que de polluer nos grands écrans avec son truc qui ressemble à Matrix. »

 

Oui mais à ceux-là, il est bon de rappeler que Fincher, avant d’offrir aux spectateurs le polar le plus noir de ces 20 dernières années et le film culte de toute une génération, filmait les fesses de Paula Abdul dans des vidéos qui ne passent même plus sur Europe 2 TV entre minuit et 2h du matin, et qu’un certain John McTiernan a réalisé plus de 200 pubs et clips avant de se voir confier Predator. Alors oui, Constantine n’est ni Alien 3, ni Predator... et Jo Khan a fait Torque, comme quoi, certains devraient juste se contenter de filmer des fesses.

 

 

 

Dossier sur la carrière de clippeur de Francis Lawrence

Les clips de Francis Lawrence

Malgré les gros doutes que pouvait avoir une majorité de cinéphiles sur les qualités de metteur en scène de Lawrence, il faut bien admettre qu’il nous a tous bluffés avec son adaptation plus que risquée de Je suis une Légende, sorti cette semaine sur nos écrans. Laissant derrière lui ses tics de réalisation de clips...

 

Avant de continuer, il serait bon d’expliquer ce qu’est vraiment un tic de clippeur. Contrairement aux idées reçues, créer une image léchée et esthétique n’est pas un tic de clippeur. Pour autant Terrence Malick n’a jamais fait de clip. Le sur-découpage et le montage épileptique ne sont pas non plus des défauts propres aux clippeurs mais juste une manière moderne et agaçante de faire croire à de la mise en scène rythmée et immersive là où au contraire les metteurs en scène ne semblent pas avoir la moindre idée de ce qu’ils vont filmer. Il en résulte donc souvent des scènes dites « d’action » filmées en plans moyens et en inserts à 6 caméras à l’épaule, le tout passé au hachoir sur les bancs de montage dont les time line finissent par ressembler à des codes barres. Mais on s’égare. Non, un tic de clippeur est une tendance à conserver et à multiplier le nombre d’instant plans dans une scène, entrainant par la même une impression de mise en scène poseuse, brisant la fluidité de la narration. Pour exemple, la scène finale de Constantine, qui multiplie les prises de vues improbables et les plans christiques, alors qu'au même moment, tous les enjeux du film nous sont exposés. Qu’est ce que l’on en retient ? Les plans de l’ange qui ouvre ses ailes, éclipsant donc les tenants et les aboutissants de l’histoire. En gros : « il ne faut pas mettre des plans trop démonstratifs lorsqu’un personnage dit quelque chose d’important », sinon on oublie ce qui est dit (puisque ce qui est dit au lieu d’être montré est perdu pour le spectateur - Hitchcock). Bref, Francis Lawrence a mis de côté ce petit défaut, et a réussi à poser sa mise en scène pour une plus grande clarté dans sa narration. Certains appellent ça la maturité.

 

Mais venons-en à ce qui nous intéresse ici, à savoir la carrière de clippeur de Lawrence, avec une sélection non exhaustive, mais assez complète, de ses travaux avant de faire Je suis une Légende.

 

Les premières années : 1993-1996

Francis Lawrence co-réalise ses premiers clips avec Mike Rosen jusqu’en 1994 avant de commencer sa carrière solo. Il tourne pas mal pour des groupes de hip-hop (le premier clip de Akon, c’est lui !) et s’offre ses deux premiers classiques : Elevation de the BUMS et Come Widdit de Ahmad & Rass Kass. Difficile de tirer de grandes conclusions sur son univers après ces clips, vu qu’on sent qu’il se cherche encore. Par contre, on peut voir qu’il inspirera d’autres réalisateurs, comme David Yow, puisque le clip d’Offspring de ce dernier sur All I Want reprend quelques idées de Superman d’Unwritten Law.

 

 

The B.U.M.S. - Elevation (free my mind)

 


A Western Front - Go

Ahmad & Rass Kass & more - Come Widdit

Akon - Operations Of Nature

Royal C - They Don't Want None

Unwritten Law - Superman

The Braxtons - Only Love

 

 

1997 : en route vers la gloire

C’est en 1997 que Francis Lawrence commence réellement à percer, puisque quelques grands noms de l’époque font appel à lui pour réaliser leurs clips. Entre autres, En Vogue, Bad Religion, Wycleaf Jean, Third Eye Blind ou encore Coolio. Commence alors à apparaître ce qui fera la patte de Lawrence dans les années à venir : l’utilisation de la ville comme territoire de jeu pour les chanteurs. Pour exemple, I’ll C U When U Get There de Coolio (la première utilisation du canon de Pachelbel comme sample dans un morceau de rap, avant Je me Souviens de Menelik), tiré du film Nothing to Lose avec Martin Lawrence et Tim Robbins, dans lequel on peut voir des hommes perdus déambuler dans des rues désertes. Des images qui semblent bien familières...

 

 

 

Coolio -I'll C U when U Get There

 

 

 

Bad Religion - 10 In 2010

Monica - For You I Will

Ray J - Let it Go

Eric Benet - Feminity

Jocelyn Enriquez - A little bit of Exctasy

Third Eye Blind - Losing a Whole Year

Deborah Cox - Things Just Ain't The Same

Hadina Howard - (Freak) And You Know It

Vanessa WilliamsHappiness

En Vogue - Too Gone Too Long

LSG - My Body

Wyclef Jean & Canibus - Gone Till November


 

1998 – 1999 : les années folles

C’est l’explosion : Francis Lawrence réalise I don’t want to miss a Thing, tiré de la bande originale d’Armaggedon de Michael Bay. Lawrence se frotte aux vraies stars que sont Aerosmith, Seal ou Timbaland. Il réalise aussi le clip d’un autre classique du Hip-hop : Ghetto Star de Pras Michael et Ol Dirty Bastard. L’année suivante, ses premiers cartons interplanétaires : Waiting for Tonight et Rythm Divine, qui révèlent les bombas Latinas Jennifer Lopez et Enrique Iglesias au monde entier. De plus, avec son clip What’s so different ? de Ginuwine, il tente un premier pas vers les effets spéciaux numériques, tout en conservant sa fascination pour les grands immeubles et les villes désertes. Un clip qui, presque 10 ans après reste assez impressionnant.

 

 

Aerosmith - I Don't Wanna Miss a Thing


 

Sarah McLachlan - Adia

Robyn - Do You Really Want Me (Show Respect)

Pras Michel feat. ODB & Mya - Ghetto Superstar

Seal - Human Beings

Timbaland and Magoo - Here We Come

Ginuwine - What's So Different

Maxwell – Fortunate

Tracie Spencer - It's All About You (Not About Me)

Jennifer Lopez - Waiting For Tonight

Enrique Iglesias - Rhythm Divine

Bob Marley and Lauryn Hill - Turn the light down low

 

2000 – 2001 : la confirmation

Francis Lawrence continue sur sa lancée, et tourne pour les Destiny’s Child (BO de Charlie’s Angels), Nelly Furtado, Britnez Spears, Janet Jackson, POD, et reste fidèle à J-LO, Enrique Iglesias, Ginuwine et Aerosmith. Il réalise quelques-uns de ses clips les plus marquants, dont I’m a Slave 4 U de la teenage préférée des Américains, Never be the Same Again de l’ancienne Spice Girl Melanie C, et Whenever, Wherever qui fera exploser le talent et les hanches de Shakira aux yeux de tous. Un clip étrange au milieu de ces deux années : 10 days Late de Third Eye Blind, qui date d’Avril 2000. En effet, on pourrait comparer cette vidéo à un autre clip culte : Judith, de David Fincher, diffusé à peine un mois après. On y retrouve quelques plans identiques, même si la classe qui sépare le clip de Fincher et celui de Lawrence est au moins aussi importante que celle qui existe entre A Perfect Circle et Third Eye Blind.

 

 

Melanie C - Never Be The Same Again

 

 

Ricky Martin - Private Emotion

Third Eye Blind - 10 Days Late

Enrique Iglesias & Whitney Houston - Could I have that kiss forever?

Destiny's Child - Independent Woman

Nelly Furtado - I'm like a bird

Lil' Kim - How Many Licks

Green Day – Warning

Backstreet Boys - The Call

Aerosmith - Jaded

Jennifer Lopez - Play

Janet Jackson - Someone to Call My Lover

P.O.D. – Alive

Long Beach Dub Allstars - Sunny Hours

Destiny's Child - Emotion

Britney Spears - I'm A Slave 4 U

Ginuwine - Just Because

Shakira - Whenever, Wherever

Janet Jackson ft. Missy Elliott - Son Of A Gun

 

2002 : une année chargée avant d’attaquer Constantine

Certainement son année la plus prolifique. Il se diversifie, change d’univers à chaque clip et commence à se faire plaisir, en tournant pour Alanis Morissette, Incubus et the Goo Goo Dolls. 2002 marquera aussi sa rencontre sur un plateau avec Will Smith dont il tournera Nod Ya Head, chanson du générique de MIIB. Il expérimente des effets pour le coup purement clippesques, comme sur Hands Clean d’Alanis. Deux morceaux marquants cette année-là : Cry Me a River, du génie du RnB Justin Timberlake, un pur moment de découpage, et surtout Sk8ter Boy d’Avril Lavigne, peut-être son œuvre la plus folle, puisqu’on y voit la teen rebelle canadienne partir dans un concert Live devant une foule en délire en pleine ville, à un croisement de deux routes. La ville, le croisement, deux éléments que l’on retrouvera...

 

 

Avril Lavigne - Sk8er Boi

 

 

Garbage - Breaking Up The Girl

Natalie Imbruglia - Wrong Impression

Alanis Morissette - Hands Clean

Goo Goo Dolls - Here is Gone

Incubus - Warning

Alanis Morissette - Precious Illusions

Will Smith - Black Suits Comin' (Nod Ya Head)

P!nk - Just like a pill

Michelle Branch - Goodbye To You

OK Go - Get Over It

Jennifer Lopez - Jenny From the Block

Justin Timberlake - Cry Me A River

 

De 2003 à aujourd’hui

...deux éléments que nous retrouverons donc l’année suivante, dans Let’s get It Started des Black Eyed Peas, dans lequel Lawrence reprend quelque peu le concept qu’il avait effleuré dans Sunny Hours des Long Beach Dub Allstars. 2003 marque ce que l’on peut appeler la fin de la carrière de Lawrence en tant que clippeur, puisque c’est cette année-là qu’il lui est proposé de réaliser Constantine. Il ne tourne plus que pour les potes (Timberlake, les Black Eyed Peas, Janet Jackson), ou pour se rincer l’œil (les Pussycat Dolls). Un dernier petit bijou pour la route : Be Yourself d’Audioslave.

 

 

Black Eyed Peas - Let's Get Is Started


 

Everclear - Volvo Driving Soccer Mom

Justin Timberlake - Rock Your Body

Janet Jackson - All Night / Don't Stop

Gwen Stefani - What You Waiting For?

Jennifer Lopez - Get Right

Audioslave - Be Yourself

Black Eyed Peas - Pump It

The Pussycat Dolls – Buttons

 

 

En 15 ans de carrière, Francis Lawrence aura donc réalisé environ 90 clips, pour des grands noms (Aerosmith, Justin Timberlake, Seal...) mais aussi pour Ricky Martin. Son prochain bébé, maintenant qu’il est sorti de Je suis une Légende, sera pour le groupe légendaire Nine Inch Nails, pour le morceau Every day is exactly the same. Maintenant que Trent Raznor fait appel à lui, il y a fort à parier qu’il sera un peu mieux considéré, d’autant qu’on murmure son nom dans quelques studios pour réaliser Snow and Seven, avec Nathalie Portman et Jet Li (une transposition de blanche neige et les sept nains dans la Chine du 18e siècle), ainsi que la suite du très très bon Silent Hill. Info ou intox ?

 




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