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Tabou(s) : Interview de Peter Macdissi

Le 03/12/2010 à 16:42
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Tabou(s) : Interview de Peter Macdissi

Connu du public pour son rôle dans la série Six Pieds Sous Terre créée par Alan Ball, Peter Macdissi remet le couvert avec le réalisateur pour le premier long métrage de ce dernier, Tabou(s). Si le film n'est arrivé dans les bacs français que le 17 novembre 2010, il était présenté au Festival du Cinéma Américain de Deauville en 2008. L'acteur était alors de passage sur les planches normandes et nous a accordé un peu de son temps. Chaleureux et exubérant, Peter Macdissi maîtrise aussi très bien le notre langue et l'entretien s'est déroulé entièrement en français !

 

Filmsactu.com : Vous retravaillez avec Alan Ball !

Peter Macdissi : Oui, j'avais travaillé avec lui dans la série Six Pieds Sous Terre et c'est pour cela qu'il m'a offert le rôle de Rifat dans ce film. J'étais très content d'avoir un rôle aussi complexe.

 

Tabou(s) : Interview de Peter Macdissi

 

Comment avez-vous réagi en lisant le scénario ? Connaissiez-vous le roman ?

Oui, je trouvais déjà le livre excellent et quand j'ai lu le scénario, j'ai dit tout de suite appelé Alan pour lui faire part de mon enthousiasme. J'étais déjà certain que le film allait être une réussite. J'aimais l'histoire mais aussi les personnages. Il n'y a pas nécessairement de méchants dans le film parce que tous les protagonistes sont des êtres humains. Ils ont beaucoup de profondeur et ont du mal à exprimer leurs sentiments.

 

"Je suis l'avocat de mon personnage"

 

Le rôle de Rifat a-t-il nécessité une préparation particulière ?

Bien sûr. Je vis à Los Angeles donc je suis allée habiter quelques temps au Texas, pour savoir comment les choses se passent là-bas. J'avais aussi des milliers de questions à poser à Alicia (Erian, l'auteure du livre, ndlr) au sujet de mon personnage, de ses activités, de ce qu'il aime et ce qu'il n'aime pas, de son travail, des femmes de sa vie, de ses relations... Tout. J'étais aussi intéressé par sa psychologie. Ma théorie est que Rifat était lui-même frappé par son père et c'est pour cela qu'il frappe sa fille. Il traverse aussi la crise de la quarantaine, en plus d'être affecté par son divorce qui s'est très mal passé. J'imagine qu'il a été trompé par elle. Tout cela fait partie de son histoire du personnage. Il faut trouver le côté humain de son personnage, parce que sinon, on sombre dans la caricature.

 

Sa fille est en train de devenir une femme et on a l'impression qu'il n'arrive pas à faire face à cette transformation. Qu'en pensez-vous ?

De son côté, il trouve que Jasira est sourde à ce qu'il dit. Il trouve qu'elle agit de manière avilissante, déshonorante. Il applique ses idées, ses valeurs, qui sont très importantes pour lui. En fait, il aime énormément sa fille, mais il ne sait pas comment communiquer avec elle. C'est ça, le problème. Sur certains plans, il a aussi une mentalité d'adolescent : il a beau être bien élevé, il se comporte parfois comme un enfant. Son attitude est inacceptable, mais en tant qu'acteur, je ne peux pas le juger parce qu'il faut que j'aime mon personnage. Je suis l'avocat de mon personnage.

 

Le voyez-vous comme un homme conservateur ?

Bien sûr ! Il est conservateur. C'est un républicain du Texas. D'autre part, c'est un homme qui prend soin de lui, qui fait très attention à ce qu'il porte ou à ce qu'il mange. Si vous regardez ses costumes, ils sont très stricts, tout comme sa démarche. A tous points de vue, Rifat n'est pas du tout un libéral. Il n'a rien d'un artiste, il est incapable d'accepter la légèreté.

 

Tabou(s) : Interview de Peter Macdissi

 

Comment s'est passé le tournage des scènes que vous partagez avec Summer Bishil ?

Très bien. Elle était très flexible et très ouverte et nous avons développé une relation impeccable, très juste pour les personnages de Jasira et Rifat. Ils s'aiment beaucoup et il était donc important de développer une relation proche avec Summer. Même les scènes où il la brutalise n'ont pas été difficiles à tourner parce que, pendant la préparation, nous avons développé nos personnages. Nous avons beaucoup discuté avec le réalisateur et en fin de compte, nous nous sommes bien éclatés. En fait, le tournage était très détendu, très amusant. On a beaucoup ri, surtout Summer et moi.

 

"L'art est toujours personnel, sinon ce n'est plus de l'art."

 

Avez-vous l'impression d'apporter quelque chose de personnel à votre rôle ?

J'avais choisi la photo de quelqu'un et j'ai travaillé à partir de ce qu'elle m'inspirait. Est-ce que j'ai apporté quelque chose de personnel ? L'art est toujours personnel, sinon ce n'est pas de l'art. Mais ce n'est pas seulement personnel, il y a aussi l'imagination. Vous devez toujours vous efforcer de travailler de manière très authentique et de rester réaliste. En fait, plus votre rôle est personnel, plus il devient universel.

 

Quel genre de réalisateur est Alan Ball avec ses acteurs ?

Alan est quelqu'un de magnifique. C'est quelqu'un de très sympa et de très honnête. Il ne juge pas ses personnages. Quelque soit leur nationalité ou leur religion, il les considère tous à égalité. C'est quelque chose que je respecte beaucoup. De plus, il fait confiance à ses acteurs. Il les laisse faire ce qu'ils veulent. Ce n'est pas quelqu'un qui cherche à vous contrôler.

 

Vous travaillez aussi bien à la télévision qu'au cinéma. En quoi ces expériences diffèrent ? Est-il plus facile qu'avant de passer de l'un à l'autre ?

A la télévision, tout se fait très rapidement. Nous n'avons pas le temps de nous préparer pour un rôle parce que tout va trop vite. Au cinéma, nous pouvons au contraire nous consacrer à cette préparation et c'est pourquoi je pense que l'on travaille nos rôles plus en profondeur. Pour ce qui est du passage de l'un à l'autre, c'est plus commun aujourd'hui. Mais il faut savoir s'adapter très rapidement pour satisfaire les exigences.

 

Tabou(s) : Interview de Peter Macdissi

 

Quelles sont les réactions des critiques américaines au film ?

Je n'en ai aucune idée et je ne veux pas le savoir. Surtout en ce qui concerne les Etats-Unis : cela ne m'intéresse pas parce que c'est un film très spécial, très risqué.

 

Qu'est-ce qui, selon vous, risque de choquer les Américains ?

Le caractère sexuel du film. En Amérique, on ne veut pas voir les choses. On préfère que tout reste caché.

 

C'est paradoxal parce que le film se passe justement dans une banlieue où tout le monde se mêle de la vie des autres.

C'est pour cela que j'ai choisi de séjourner au Texas. Je voulais connaître les mentalités, savoir pourquoi les gens se comportaient comme cela. C'est très particulier.

 

Quels sont vos prochains projets ?

Pour moment, je n'ai rien de prévu. Je lis des scénarios mais il est rare de trouver des rôles vraiment intéressants. Je recherche des projets intéressants et un rôle comme celui-ci n'arrive pas tous les jours. La personnalité du réalisateur est aussi très importante. Je ne suis pas du tout intéressé par les blockbusters. Je veux jouer des rôles complexes et humains.

 

Et en tant que spectateur, qu'est-ce que vous retenez le plus dans un film ?

Les personnages, bien sûr, parce que ce sont des êtres humains. Ce qui me touche le plus, ce sont les relations humaines.

 

Propos recueillis par Elodie Leroy

Entretien réalisé au Festival du Cinéma Américain de Deauville 2008





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