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Pentagon Papers : rencontre avec Steven Spielberg, Meryl Streep et Tom Hanks

Le 26/01/2018 à 07:39
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Steven Spielberg, Meryl Streep et Tom Hanks étaient de passage à Paris pour défendre le passionnant Pentagon Papers en salles depuis le 24 janvier. Voici quelques extraits de la conférence donnée par ces trois géants du cinéma.

 

Thriller

 

"La presse doit se battre encore plus intensément aujourd’hui car elle subit plus d'attaques que dans les seventies."

 

Le film se déroule dans les années 70 mais son propos est très actuel sur la liberté de la presse. Est-ce cet aspect qui vous a intéressé ? La presse peut-elle encore se battre comme elle l’a fait dans les années 70 ?

Steven Spielberg : La presse doit se battre encore plus intensément aujourd’hui car elle subit plus d'attaques que dans les seventies. Elle doit continuer à transmettre la vérité au grand public. Mais mon attrait initial vers ce scénario, avant que je pense aux connexions évidentes entre 1971 et 2017, c’était le personnage de Katherine Graham et sa relation avec Ben Bradlee. J'ai aimé l'histoire de cette femme, placée dans une position d’autorité alors elle n’avait pas encore trouvé sa voix.

 

Meryl et Tom, qu’avez-vous appris avec ce film ? 

Meryl Streep : Plus j’en apprenais sur Katherine Graham, plus j’étais impressionnée par elle. Par son intellect, son endurance, sa curiosité, sa capacité à mener avec tant de grâce, et sa plume. Elle a écrit une autobiographie de 700 pages qui a gagné le prix Pulitzer. Mais ce que j’ai appris de plus important en l'étudiant et en rencontrant ses enfants, ses assistantes, c’est à quel point elle manquait de confiance en elle et comment elle doutait perpétuellement. C'est l'histoire de tant de femmes, pas seulement de sa génération, mais aussi de femmes d'aujourd'hui qui souffrent du même genre d’handicap, qui par leur manque de confiance ne parviennent pas à avancer et à prendre des risques. Et je partage la plupart de ces insécurités.

 

Thriller

 

Tom Hanks : Ce que j’ai vraiment appris sur Ben Bradlee - je suis allé chez lui, j’ai passé beaucoup de temps à en discuter avec sa femme - c'est que l’enthousiasme qu’il mettait dans son métier allait de pair avec sa responsabilité d’être un journaliste. Dans le cas de cette histoire, son mantra était « la vérité est la vérité et il faut la publier. Si ce sont les faits, il faut les révéler ! Sinon, à quoi bon avoir un journal ? A quoi bon avoir un travail ? Pourquoi vendre des copies du Washington Post ? " J'ai collaboré cinq fois avec Steven. Je suis inspiré par lui... Mais la nouveauté pour moi était de travailler avec Meryl Streep, et que nos deux personnages se mélangent idéalement.... Je dois bien avouer que j'ai profité du fait qu'elle ignorait que Steven ne répète jamais ! Il vaut mieux connaître son rôle avec lui, avoir des idées, et les premiers jours, elle était tellement perdue que j’ai adoré !

 

"J’étais à l’aise avec l’idée que l’histoire serait le co-auteur de mon film."

 

Steven, vous êtiez en plein tournage de Ready Player One quand vous avez décidé de prendre un break pour tourner Pentagon Papers. Pourquoi cette envie subite ?

Steven Sielberg : Quand je tourne un film de science-fiction, il n’y a pas de règles. La limite est celle de votre imagination. Quand j’ai lu ce qu’il s’était passé en 1971, que Nixon voulait poursuivre le Washington Post et que cette femme s’était démarquée dans un océan d’hommes, il y avait tant de pertinence dans ces deux sujets que c’était une manière pour moi de célébrer l’histoire. Utiliser son imagination au cinéma est génial, mais que se passe-t-il quand on est limité par les faits, par un lieu, par une période. J’étais à l’aise avec l’idée que l’histoire serait le co-auteur de mon film. Je suis plus à l’aise avec ce genre aujourd’hui que je ne pouvais l’être dans la science-fiction, le fantastique et le rêve auparavant. Lire ce script a été comme une délivrance. L’autre énorme plaisir de ce film est de pouvoir montrer la fabrication d’un journal à l’époque. C’était un art. L’autre déclic pour moi, cela a été ces deux présidents qui déclarent la guerre aux médias. Nixon n’a pas réussi et a fini par démissionner. J’ai confiance que l’on surmonterait aussi tout ce que l’on a enduré ces 16 derniers mois.

 

 

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"Mes compagnies ont toujours été dirigées par des femmes..., c’est le monde dans lequel je suis le plus à l’aise."

 

Steven,  qu’est-ce qui vous pousse à tourner de manière aussi effrénée ? Qu’est-ce qui vous inspire ? Et qu’est-ce qu’une bonne histoire ?

Steven Spielberg : Ce qui me pousse à travailler avec autant d’enthousiasme, c’est la même chose qui poussait Ben Bradlee à se lever chaque matin. Tout ce qui lui importait c’était une bonne histoire. Une de celle qui le bouscule. Tout ce qui me stimule, c’est aussi une bonne histoire. Je peux rajeunir de 20 ans si elle est bonne.

 

Considérez-vous Pentagon Papers comme votre film féministe ?

Steven Spielberg : Mon premier film féministe a été la Couleur Pourpre qui a été motivé par mon expérience personnelle. J’ai été élevé par une mère célibataire très forte, j’ai trois sœurs plus jeunes et pas de frère, j’ai grandi dans un monde de femmes, mes compagnies ont toujours été dirigées par des femmes, chaque département d’Amblin est actuellement dirigé par une femme, c’est le monde dans lequel je suis le plus à l’aise. C'est ce qui m’a imposé comme le choix parfait pour réaliser Pentagon Papers.

 

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"Les Hommes du Président est le meilleur film sur le journalisme jamais tourné."

 

Pentagon Papers se termine là où Les Hommes du Président commence. A savoir le Watergate. Quelles ont été les influences du film de Pakula sur le vôtre ?

Steven Spielberg : Les Hommes du Président est le meilleur film sur le journalisme jamais tourné. Je suis heureux d’être dans la lignée de ce chef d’œuvre. Je n’ai jamais rencontré Alan Pakula mais je lui ai rendu hommage en concluant Pentagon Papers avec les angles de caméra qu’il a utilisé pour débuter le sien. Mais en même temps, notre film est très différent. Il pourrait être décrit comme un préquel mais je crois profondément que sans le courage de Ben Bradlee et Katherine Graham qui ont agi malgré l’interdiction de la Cour et ont offert tant de crédibilité au Washington Post, qui est ainsi passé de petit journal local à une référence nationale, il n'aurait pas été possible de poursuivre l'enquête qui a mené à la démission de Nixon. Là-dessus, on est bien plus qu’un préquel.

 

Meryl, comment avez-vous travaillé pour incarner cette femme qui parait faible mais qui est incroyablement forte à l’intérieur et qui parvient à faire face à tous ces hommes qui n’ont aucun respect pour ses opinons ?

Meryl Streep : J'ai moi-même été dans des réunions où siégeaient deux femmes et six à neuf hommes. Lorsque l'une des femmes suggérait quelque chose, les hommes répondaient toujours "Mouais, il faut y réfléchir". Mais quand la même suggestion venait ensuite d'un homme, ils s'exclamaient tous "voilà où nous devons aller !" Je ne connais pas une femme qui n'ait pas été dans ce genre de réunions. Mais cela change. Et ce film arrive à une période intéressante pour les femmes. Quand la première version du script est arrivée, la productrice Amy Pascal l’a achetée six jours avant les élections en étant persuadée qu’Hillary Clinton serait la première femme élue à la Maison-Blanche. Elle imaginait ce film comme une vision du passé et le symbole d'une époque où les femmes étaient difficilement considérées. Finalement, le film a pris une autre tournure. C’est presque une histoire d’apartheid avec d’un côté le monde des hommes et de l'autre celui des femmes. C’était comme cela en 1971. Je m’en souviens très bien.

 

 

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