Sea, No Sex and Sun
Le 03/04/2012 à 20:43Par Michèle Bori
Avec ses trois comédiens qui parviennent à nous faire rire autant qu'à nous émouvoir, son ambiance douce et nostalgique, et son savant mélange entre "comédie populaire française" et "feel-good movie à l'américaine", Sea, No Sex and Sun a tous les ingrédients du bon film de début d'été. Celui qui donne envie de partir en vacances et d'en revenir avec des images plein la tête. Découvrez ci-dessous notre critique de Sea, No Sex and Sun.
SEA NO SEX AND SUN : CRITIQUE
La Bretagne, le mois de Juillet à Carnac-Plage. Alex, 20 ans, découvre les vacances sans les parents. Il sort, fait des rencontres. Guillaume, 35 ans, vient en vacances avec sa femme et sa fille, à l'endroit même où, quelques années auparavant, il a passé ses meilleurs étés. Pierre, 50 ans, récemment divorcé, séjourne avec ses deux enfants et espère renouer avec eux... Raconté comme ça, Sea, No Sex and Sun avait tout pour être vu comme une version "douce-amère" de Camping. En moins beauf, certes. Ce serait oublier que derrière la caméra de se trouve Christophe Turpin, qui avec le scénario (nommé au Césars) de Jean Philippe, nous avait prouvé qu'il était un des rares auteurs français à avoir su assimiler les subtilités d'un certain cinéma américain pour l'adapter à la sauce hexagonale. Et si dans l'absolu sa première réalisation n'a pas grand-chose à voir avec le film de Laurent Tuel, on peut néanmoins y retrouver une preuve indéniable que le dénominateur commun de ces deux films est à trouver de l'autre côté de l'Atlantique … Et si Sea, No Sex and Sun n'est en apparence qu'un gentil feel-good movie, il n'en est pas moins très intéressant pour peu qu'on prenne le temps de déchiffrer ce qu'il cherche à raconter.
On ne le répétera jamais assez : le feel-good movie appartient clairement à ce que l'on appelle le "cinéma de genre", au sens large du terme. Et qui dit "genre", dit également codes. Codes que l'on recrache ou que l'on digère, en fonction du recul que l'on a avec lui. Avec Jean-Philippe, Turpin se servait des codes d'un cinéma estampillé Amblin / Reitman pour nous offrir une comédie fantastique, sous influence certes, mais qui parlait aussi bien aux enfants des 80's qu'aux fans de Johnny. Dans un style différent, il remet le couvert avec Sea No Sex and Sun, qui parvient à rentrer dans un certain moule de la comédie française (les parisiens à la plage, les familles qui se disputent, les histoires de cœur et de cul), tout en usant d'ingrédients propre au cinéma américain. Une passerelle évidente lorsqu'on observe un peu les personnages masculins du film …
Parce qu'Hollywood rabâche depuis 20 ans que le romantisme est mort et que les Princes Charmants n'existent plus, la leçon a fini par rentrer dans la tête des filles. Et aussi dans celle des hommes, qui ne sont plus forcément les derniers à consommer de la bluette ! Sauf que cette réalité vendue par Hollywood à 24 images par secondes n'est pas forcément compatible avec la vie de tous les jours. Alex, Guillaume et Pierre sont donc, respectivement, un teenage dirtbag amoureux d'une "prom queen" inaccessible (qui tient plus de l'héroïne de LOL que de Molly Ringwald) ; un trentenaire qui souhaite se prouver qu'il a encore l'âge de faire la fête - so Carrie Bradshaw ! – et si possible loin de sa femme, qui se plaint de tout, qui crie et qui pleure ; et un quinqua qui aimerait donner un masculin à MILF en se la jouant Mister Robinson avec des jeunettes qui ont l'âge de sa fille – sa fille qui au passage le prend pour un vieux-beau raté. Turpin nous dresse donc le portrait de trois simili losers qui ont des rêves plein la tête et qui, plongés dans une ambiance propice aux excès (les vacances à la mer) vont devoir affronter une triste réalité ... personnifiée à l'écran par les protagonistes féminins.
C'est là que Sea, No Sex and Sun parvient à tirer son épingle du jeu. En faisant des hommes les romantiques aveugles et les femmes leur "référents terrestres", le film de Christophe Turpin inverse délicieusement les stéréotypes. Et pour résumer, on pourrait qualifier son film de "chick flick" pour mecs. De dude flick ! Au passage, le portrait que Turpin fait des hommes est loin d'être glorieux. Entre mensonges (à soi, aux autres), couardise et coups bas, nos trois héros – qui pourraient presque être le même personnage à trois âges différents – ne fait pas franchement bonne presse à la gent masculine. Ce qui n'est pas pour nous déplaire ! De cette peinture caustique née donc un très agréable comédie qui divertie, amuse, qui émeut également et qui n'oublie pas de dénoncer, en pointant du doigt certains de nos travers à nous les hommes. Et comme ses trois comédiens (Fred Testot, Antoine Duléry, Arthur Mazet) parviennent à nous faire rire autant qu'à nous émouvoir, et que son ambiance douce et nostalgique (à noter la très belle bande-son pop du film) ne manquera pas de rappeler à tout un chacun des souvenirs de vacances, Sea, No Sex and Sun a tous les ingrédients du bon film de début d'été. Celui qui donne envie de partir en vacances, d'y vivre de belles histoires et d'en revenir avec des images plein la tête.