Cette musique ne joue pour personne : une vibe tarantinesque flotte sur le port de Dunkerque - critique
Le 29/09/2021 à 09:42Par Pierre Champleboux
Inattendue et plus feel good qu’il n’y parait, la comédie de Samuel Benchetrit offre un vrai bol d’air frais. Jamais caricaturaux, les dockers mafieux amusent autant qu’ils touchent par leur humanité et leur sensibilité. Drôle, absurde, filmé et écrit à hauteur d’hommes, cet étonnant film mi-mélancolique mi-comique offre un divertissement à nul autre pareil qui sonne comme un grand écart entre le cinéma de Tarantino et celui de Guillaume Nicloux. Un immense coup de cœur !
Suivre les magouilles d’une bande de mafieux vieillissants et en pleine crise existentielle évoluant dans un paysage morose et gris, ça peut rebuter. Et pourtant, on aurait tort de passer à côté de l’excellent Cette musique ne joue pour personne.
Écrit comme une sorte de Pulp Fiction franchouillard, porté par des dialogues qui ne sont pas sans rappeler la géniale absurdité du Poulpe de Guillaume Nicloux, et filmé dans des décors qui rappellent les meilleurs épisodes de l’émission Strip Tease, le long-métrage de Samuel Benchetrit semble comme touché par la grâce.
Tout fonctionne dans cette histoire de dockers gangsters au bord de la crise de nerfs. Si tout semble au départ n’être qu’une succession de séquences uniquement écrites pour provoquer le rire, le film révèle bien vite une humanité saisissante qui donne une cohérence bien réelle à un script qui s’attache à utiliser le rire pour sublimer les tourments existentiels de ses personnages.
L’oeil de Samuel Benchetrit parvient l’exploit presque surréaliste de magnifier aussi bien la beauté intérieure de ses personnages que les paysages, trop souvent montrés comme déprimants, de cette ville portuaire du nord de la France.
Avec un François Damiens drôle et à fleur de peau, un Ramzy Bedia qui étonne par sa retenue, un Gustave Kervern campant un tueur se changeant en clown triste sous l’effet de l’amour qu’il éprouve pour une Vanessa Paradis en quête d’emancipation, et un duo comique irrésistible formé par JoeyStarr et Bouli Lanners, le casting parfait est l’autre grande force de cette petite bulle antidéprime qui mérite d’être vue.
Parce que les gangsters sont aussi des humains (même à Dunkerque), parce que l’apparente légèreté de l’objet cache en fait une réflexion bien plus poussée qu’on ne pourrait le penser sur la quête de l’épanouissement personnel, on ne saurait que trop vous conseiller de découvrir le joli film de Samuel Benchetrit.
Rencontre avec JoeyStarr :