Ogre : un conte de fée interdit aux enfants ? Critique
Le 20/04/2022 à 11:11Par Pierre Champleboux
Conte de fée horrifique moderne, Ogre s’adresse aux petits comme aux grands enfants et use du prisme du fantastique et des codes du cinéma de genre pour raconter une histoire finalement très terre à terre. D’une splendide facture visuelle, parvenant à rendre la campagne française vaporeuse, sombre et angoissante, le long-métrage d’Arnaud Malherbe joue sur les faux semblants et s’amuse à perdre son spectateur entre fantasme et réalité. Un suspens maîtrisé et une ambiance soignée pour un film qui offre un cauchemar sensoriel et nous renvoie à nos peurs enfantines. Servie par un impeccable trio de comédiens (Ana Girardot, Giovanni Pucci et Samuel Jouy), cette belle surprise est à recommander à toutes celles et ceux qui cherchent à retrouver les frissons ressentis en écoutant les histoires qui les ont fait trembler lorsqu’ils étaient enfants.
Une mère célibataire (Ana Girardot) emménage avec son fils (Giovanni Pucci, révélation du film) dans un petit bled de province où elle a été mutée comme institutrice. Rapidement, l’enfant comprend qu’une créature inquiétante rôde aux abords du village, et qu’il pourrait bientôt lui servir de casse-croûte. Et comme les adultes n’y croient pas, le jeune garçon va devoir se débrouiller seul pour combattre l’ogre qui cherche de nouveaux enfants à dévorer…
Partant de ce pitch, Arnaud Malherbe met en scène un film qui nous replonge dans les terreurs éprouvées dans nos jeunes années. S’appuyant sur le talent de ses comédiens et un travail très poussé sur le son, l’ambiance et l’image, le réalisateur met tout en œuvre pour nous faire frémir et douter.
Il est bon de ne pas trop en savoir sur Ogre avant d’aller le voir au cinéma. Car si son histoire tient en quelques lignes, c’est l’expérience visuelle et sensorielle qui prévaut. On se laisse porter par ce conte de fée flippant qui ne lèvera jamais le doute. Et si tout se déroulait dans la tête du jeune garçon ?
Et si tout était vrai ? Et si les monstres existaient ? Le réalisateur ne prendra pas partie, et chaque spectateur ressortira de la salle avec son propre avis.
Inquiétant lorsqu’il cède au fantastique, Ogre raconte surtout l’amour inconditionnel qu’éprouvent l’un pour l’autre une mère et son fils, et s’attarde sur l’incroyable force du lien qui unit l’un à l’autre, que rien ni personne ne pourra jamais briser.
Une fable touchante, un récit aux frontières du surnaturel tissé par la patte délicate d’Arnaud Malherbe, et un film qui fait penser tantôt à Shyamalan, tantôt à Stephen King et rappellera à certains l’ambiance du film Paperhouse, qui jouait l’un aussi sur le fantastique et les perceptions inhérentes à l’enfance.