La Haute Définition a ses inconvénients. Si, si. En particulier celui de dévoiler que certains films vieillissent. La copie de L'Ours (issue du même master que la précédente édition DVD Prestige) étale forcément des lacunes que l'on n'avait pas nécessairement distinguées autant jusque là. Un master manquant parfois de piqué, par exemple et délivrant des plans accusant souvent d'une sensation de flou. Rien de concrètement gênant, mais des petits défauts qui trahissent les 20 ans du film, quelques faux raccords d'éclairage et tout simplement des conditions de tournage assez éprouvantes. Néanmoins, saluons toutefois l'apport du film sur Blu-Ray qui lui offre le statut de spectacle ô combien vivifiant en haute définition, grâce à une multitude de détails forçant le naturel. Sans les légers problèmes évoqués plus haut, on aurait assurément eu droit à une image parfaite. Pour peu que l'on possède un écran de taille confortable, les magnifiques images du film, appuyées par une solide gestion des couleurs et du contraste, nous transportent littéralement. Un produit un brin imparfait, certes, mais qui contribue grandement à la magique expérience qu'est le visionnage de L'Ours...
Quelques points sont à noter concernant l'histoire de la bande son de L'Ours. D'une part, il n'existe officiellement pas de vraie prise de son directe du film. Absolument tout a été refait en post-production, les conditions de tournages, les lieux et les "comédiens" empêchant tout enregistrement. L'univers sonore original du film est donc le produit d'un long travail de mixage totalement réinventé, parfois de manière étonnante (Annaud lui-même "double" le petit ourson) et déjà pensé en multicanal à l'époque. Un mixage de 8 pistes, plus précisément, ancêtre des Dolby Surround, Dolby Digital et autres démonstrations musclées dont nous sommes habituées. Un mixage décliné et mis à l'avantage d'une atmosphère stéréo qui explique et justifie la grande ouverture des canaux avants.
Le DTS HD Master Audio proposé ici (en VF et VO) est à la disposition du remix 5.1 du fameux 8 pistes proposé il y a quelques années sur le DVD, la compression en moins. Il est donc tout naturel qu'il adopte la sagesse du mixage original, préférant retranscrire l'atmosphère sauvage sur la scène frontale, dans un jeu de balances nous renvoyant effectivement à des techniques propres au stéréo. C'est pourquoi les surrounds se montrent discrets, bien que constamment présents. Les décibels sont en tout cas à la fête pour une restitution limpide, fluide, épurée, appuyées par un caisson de basse caverneux et n'hésitant pas à gronder lorsque cela est nécessaire.
On regrettera tout de même l'absence de l'excellent mixage Stéréo d'origine. Alors qu'il était même proposé sur le DVD, on a du mal à croire qu'il ne restait pas un peu de place pour lui sur ce joli Blu-Ray...
Ce Blu-Ray reprend le contenu de l'excellente et précédente édition DVD Prestige. A commencer par un Commentaire audio où le réalisateur excelle toujours autant dans l'exercice. On pourrait presque reprendre à la lettre tout ce que nous avons pu dire sur les commentaires audio de ses autres films : Jean-Jacques Annaud est un moulin à paroles ! Toujours un bon mot, au bon moment, au bon endroit, il revient sur toutes les étapes de la conception d'un énorme défi technique en se remémorant le moindre détail malgré les vingt années écoulées depuis le tournage. On appréciera l'élégance et l'humour du ton d'une manière générale, mais surtout sur la courte séquence des cerfs. Encore une fois, un bonus essentiel.
Trois documentaires composent ensuite l'essentiel des bonus. Trois documents d'archives parmi lesquels le Making Of (51min14) est le plus long. Tourné pour la télévision en 1987, ce documentaire de près d'une heure ne souffre pas de la "featurette aiguë" contaminant bon nombre de making of destinés aux DVD ou Blu-Ray, et se présente comme un excellent complément au film d'Annaud. Nous y découvrons les interminables heures de dressage de Bart, incroyable force de la nature de près de 900 kilos par un homme partageant d'étranges mimétismes avec l'animal, mais aussi celui d'une colonie de petits oursons. Outre le fait que l'on tombera sous le charme de ces petits êtres poilus qui galopent dans tous les coins et grimpent aux arbres, on ne pourra que respecter la patience générale de l'équipe technique, parvenant à obtenir l'impossible à grand renfort d'ingéniosité. Un très bon journal du tournage.
Un ourson à la montagne (15min24) est un court métrage qui propose des rushs non retenus de l'oursonne qui interprète Youk, où on la voit s'amuser gaiement sur le plateau de tournage. On ne pourra que saluer l'humilité du réalisateur s'excusant de la qualité de l'image. Une attitude que bien des concepteurs devraient prendre comme exemple. Un petit bonus accompagné ensuite par le Face à face Ours/Tchecky Karyo (18min47) où, via un commentaire, le réalisateur nous décortique jusque dans le moindre détail la conception de la scène où Tchecky Karyo se retrouve piégé par l'ours sous la cascade. Une passionnante analyse illustrée par des croquis et des rushes qui, certes, cassent un peu la magie de la scène comme tout making of qui se respecte, mais nous dévoilent néanmoins que la confrontation n'a employé aucun effet visuel.
C'est par quatre galeries d'images que s'achève l'excellente interactivité de L'Ours. Outre les Repérages (3min59) et Le tournage (5min08), on retiendra surtout L'Ours dans le monde entier (2min11) nous dévoilant les visuels d'affiches, livres et disques divers, ainsi que Jean-Jacques Annaud animateur de plateau (2min07) où l'on pourra contempler le réalisateur dans des tenues... particulières.
Allez, on arrête là. On a versé assez de larmichettes pour aujourd'hui...