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Certifié THX, le transfert effectué par Wild Side ne présente aucun, mais alors aucun défaut. Rarement on a vu un tel transfert, aussi précis, avec un tel respect du grain de pellicule et des couleurs. A tous les niveaux, le DVD d'Abandonnée est une réussite incontestable. Chaque détail du visage de l'actrice principale Anastasia Hille, des lugubres paysages bulgares et surtout des décors de Yasen Kovachev sont parfaitement restitués.
Le DVD respecte à la perfection la lumière de Xavi Giménez subtil travail sur les noirs et verts, Abandonnée se déroulant quasiment constament de nuit et qui plus est dans une atmosphère froide et humide. Jamais ces couleurs ne nous semblent artificielles ou trop poussée ; elles sont au contraire totalement naturelles comme si le film n'avait jamais fait l'objet d'un étalonnage.
Seul moment où la compression se fait légèrement sentir : vers la fin du film, lors de la séquence de l'immersion du camion dans la rivière, les bulles d'air mettant au défi la compression. Ce serait sincèrement chippoter que de trop pointer du doigt cette petite faiblesse, le reste de l'image de ce DVD étant renversant.
Chapeau bas monsieur Wild Side !
Quatre pistes nous sont proposées : deux pistes Stéréo classiques mais efficaces et deux pistes DTS 5.1 plein débit tonitruantes. Il va sans dire que notre préférance va du côté des mixages DTS. Ces derniers offrent une immersion totale dans cet entre-deux, notre monde et celui des doppelgängers. Chaque apparition fantomatique, chaque cri nous déchire, nous fait nous aggriper à notre fauteuil ou à notre voisin, et le score de Alfons Conde, sinistre et stressant à la fois, nous glace le sang. Percutantes, c'est le mot qui résume le mieux ces deux pistes DTS 5.1 plein débit.
De leur côté, les pistes stéréo ne sont pas honteuses, loin de là. Certes plus étouffées que leurs homologues DTS, elles s'avèrent tout à fait efficaces. Les deux enceintes sont parfaitement mises à contribution, les nombreux effets sonores saisissants et les voix audibles.
En ce qui concerne les doublages, on conseillera sincèrement les pistes originales, le doublage français ne nous ayant pas totalement convaincu.
Non content de nous proposer une édition certifiée THX, Wild Side nous offre en plus un second DVD bourré à craquer de bonus.
Le making-of Dans l'antre d'Abandonnée revient en 30 minutes sur le tournage du film, les différentes difficultés (et il y en a eu) qu'a dû affronter l'équipe du film. Nacho Cerda ne tarit pas d'éloges au sujet du courage d'Anastasia Hille, pour qui le tournage a été très éprouvant, l'actrice étant plus de 90% du temps à l'écran dans la peau d'une jeune femme psychologiquement instable. Malgré l'admiration qu'il lui porte, on sent tout de même que le cinéaste est plus impressionné par Karel Roden qui interprête Nicolai, acteur qui le fascine depuis de nombreuses années. De même, il avouera que les cochons sauvages du film ont été très difficiles à gérer, ces derniers voulant constamment attaquer les acteurs...
Cerda reviendra aussi sur l'évolution du scénario, à l'origine plus gore, plus proche du cinéma d'action, mais qui s'est transformé en quelque chose de plus angoissant (apport de Karim Hussain ?). Il révèle aussi qu'à un moment il désirait tourner son film en 16mm et non en 35mm, pour obtenir une image plus sale. Le 35mm tout comme le choix du scope s'est imposé à lui pour mettre en valeur les décors et l'espace dans lequel les personnages sont confinés.
Petit dialogue entre amis est un entretien d'une trentaine de minutes entre le cinéaste Douglas Buck (Family Portraits et Sisters) et Nacho Cerda. Passionnants, les deux cinéastes reviennent principalement sur la notion de création et sur les raisons qui mènent à faire un film. Selon Cerda, on fait un film pour comprendre pourquoi on veut faire un film. Il ne faut pas s'analyser, ni écouter les critiques, sinon on se perd. Les deux cinéastes évoquent aussi le cas de David Cronenberg qui traite comme eux de questions plus importantes que ne le ferait un simple film d'horreur.
Enfin, ils souligneront le fait qu'avec l'arrivée d'internet, cette immense vidéothèque, tout le monde peut avoir accès à n'importe quel film à tout moment, ce qui pour lui pose le problème de la perte du côté plongée dans l'imaginaire du cinéphile. Voir trop de films, voir trop d'images empêche le cinéphile et de facto le cinéaste en devenir de se plonger dans un imaginaire qui lui serait propre.
Sur Nacho Cerda à l'épreuve de la mort, le cinéaste revient sur le processus d'écriture du film et sur l'apport du cinéaste Richard Stanley (réalisateur de Hardware, mais aussi réalisateur initial remercié par la production sur la version de 1996 de L'île du docteur Moreau) qui a beaucoup épuré les dialogues pour les dynamiser. Cerda avouera que Richard Stanley avait aussi apporté une note plus politique qui n'a pas été conservée au final, sur le rapport Est-Ouest et sur l'Amérique Impérialiste en particulier.
Le cinéaste revient aussi sur le choix de la Bulgarie pour tourner son film, sur le travail remarquable de son chef opérateur Xavi Giménez, sur la difficulté de tourner les plans des nourissons et des cochons sauvages dans la grange, aucun parent ne voulant laisser leur enfant face à de telles bêtes.
Nacho Cerda terminera sur cette phrase : "j'espère pouvoir continuer à faire du cinéma pour qu'au moins, mes tourments, mes tortures intimes, puissent être partagés avec d'autres, et que je me sente mieux !" On l'espère aussi !
Sur le module Les petits secrets de Naco Cerda, le cinéaste nous présente l'envers du décor de quelques séquences clés du film. Tout d'abord pour la séquence où Anastasia Hille s'échappe dans la forêt, Cerda voulait transformer le monde autour d'elle à mesure qu'elle entrait profondément dans la forêt, modifier les couleurs à l'aide de procédés numériques et faire en sorte que le ciel devienne progressivement rouge. La production n'était malheureusement pas très ouverte à cette idée...
Sur le plan-séquence où Karel Roden tombe sous le coup du plancher qui s'écroule, suivi d'Anastasia Hille qui va chercher une corde dans l'autre pièce et revient alors que le trou a été mystérieusement rebouché, la production avait initialement prévu de faire appel à une équipe d'effets spéciaux pour combiner de façon invisible des plans afin de faire croire à un plan séquence non truqué. Cependant, le monteur réussit à trouver sur les deux plans deux images identiques pour lesquelles on obtenait un raccord invisible en les montant l'une après l'autre.
En ce qui concerne la séquence où Marie Jones et Nicolai se retrouvent enfermés dans une pièce où tous les éléments du décor se reconstruisent par magie, le cinéaste avoue avoir tourné les plans des deux acteurs séparément de ceux des objets volant dans toute la pièce qui, eux, étaient tournés à l'envers : tout était cassé sur le plateau, et monté à l'envers en post-production. Il a tout de même eu recours aux effets numériques pour quelques plans, dont celui de la chaise qui vole vers la caméra.
Cerda terminera sur une lettre que lui a écrite Anastasia Hille à la fin du tournage et où elle lui dit : "merci de m'avoir sortie de ma petite vie de famille tranquille et de m'avoir plongée dans cet enfer".
Nous sont aussi offertes quatre séquences alternatives et/ou coupées.
Tout d'abord la séquence de La rencontre entre Mila et Michari, plus longue et plus complexe que celle qui a été gardée au final. Le cinéaste avait monté la séquence sous forme de montage alterné où se mélangent aussi bien les plans où Mila est dans le bureau de Michari, que ceux où elle regarde la télévision dans son hôtel, ou encore ceux où elle arrive au village de son enfance.
La séquence Un rêve étrange voit Mila rêver d'une rivière, d'un bras flottant dans l'eau, pour se terminer sur un gros plan sur le visage d'une jeune fille, après quoi Mila se réveillera. Cette séquence est en résonnance avec une autre séquence coupée, Une autre fin.
Mila dans la forêt ajoute un élément de plus à sa fuite : en pleine forêt, elle fait face à son doppelgänger, une valise à la main. La visage s'ouvre subitement, laissant tomber au sol les vêtements qui s'y trouvaient. Après l'avoir mise en joue avec son fusil, Mila s'enfuira.
La modification la plus importante concerne sans conteste la séquence finale. Initialement, lorsque Mila au volant du camion tombe dans la rivière, elle fait face à une apparition de sa fille. Voulant éviter de la renverser, elle manoeuvre brusquement et chute dans l'eau. L'arrêt sur image sur le gros plan de Mila est ici accompagné d'un flash-back où la mère évoque les difficultés d'entente auxquelles elle fait face avec sa fille.
Sur le pont, la jeune fille regarde sa mère. Puis l'esprit de cette dernière (dans un état normal, pas le doppelgänger déchiqueté) la rejoint ; elles s'en vont toutes les deux vers la maison où les attend la famille au complet. La fille laisse sa mère les rejoindre et la regarde femer la porte de la maison sur elle... Une fin totalement différente donc, pas honteuse du tout. On suppose que celle-ci n'a pas été conservée par peur que le public ne saississe pas que la jeune fille sur le pont est la fille de Mila.
Suivent pour trois séquences un comparatif multi-angle du film avec le story-board : tout d'abord la rencontre de Mila avec son double, la séquence Sur la chemin de la maison des Kaidanowsky, et enfin La chute de Nicolai sous le plancher.
Une galerie d'une centaine de photos, la bande annonce, une partie rom comprenant le storyboard et des liens internet complètent ce fantastique second DVD.
