La petite déception de ce coffret provient de l'image de Suicide Club. Aucune tentative d'amélioration ne semble avoir été faite sur la copie de ce film réalisé, il est vrai, avec un faible budget. L'image conserve ainsi son aspect originel, pour le meilleur et pour le pire. L'avantage, c'est que l'esthétique se voit donc respectée, notamment à travers une palette colorimétrique naturelle bien qu'un peu passée. L'inconvénient, c'est tout le reste : une définition mauvaise, une image floue lors des mouvements rapides de caméra et surtout une gestion des noirs douteuse. Reconnaissons que l'on espérait un traitement de l'image supérieur pour un tel film, mais il ne faut pas attendre mieux des éditions étrangères.
Noriko's Dinner Table : 13/20
Sur ce second disque, l'éditeur propose une image de meilleure facture qui se distingue par des couleurs plus chatoyantes et un contraste mieux géré, avec nonotamment des noirs plus appuyés. Néanmoins, la définition s'avère à peine meilleure et ne permet guère de distinguer les détails situés en arrière-plan. Mais là encore, le rendu restitue fidèlement l'esthétique du film et mieux vaut quelques désagréments plutôt qu'un réétalonnage malheureux. Cela dit, on ne bénéficie pas vraiment ici des possibilités offertes par le DVD.Les deux pistes son proposées sur ce premier disque sont de simples stéréos, mais on ne s'attendait pas à autre chose. On penchera bien entendu pour la piste japonaise qui offre un mixage équilibré, avec des voix qui ressortent bien et une clarté d'ensemble correcte. On relèvera quelques sons parasites ça et là, notamment lors de l'arrivée du train dans la première séquence, mais rien qui ne vienne perturber le visionnage. Le verdict s'avère nettement plus mitigé en ce qui concerne la piste française. Non seulement les voix semblent plaquées sur la bande son de manière peu naturelle, mais une voix off inappropriée vient casser l'ambiance en énonçant les dates et les lieux où se déroulent les événements - on aurait préféré une traduction écrite. De plus, la bande son semble avoir subi quelques petits changements, notamment dans la séquence d'ouverture où la musique est totalement mise en sourdine pendant quelques secondes, juste avant le saut fatal, avant de revenir subitement. On conseillera donc sans hésiter le 2.0 japonais, une piste certes imparfaite mais offrant dans l'ensemble satisfaction, d'autant que la traduction s'avère réussie et facile à suivre.
A noter cependant qu'il est impossible de passer d'une piste à l'autre à la volée, le changement induisant automatiquement le redémarrage du film au tout début !
Noriko's Dinner Table : 15/20
Une seule piste son est disponible sur ce second disque et il s'agit bien entendu d'un stéréo japonais sous-titré français. Une fois encore, ce 2.0 offre un mixage de bonne facture qui permet de profiter du film dans de bonnes conditions, et ce même si la puissance sonore manque légèrement à l'appel. L'atmosphère intimiste si particulière au film se voit fidèlement restituée par rapport à la version découverte en salles, sachant qu'il n'était pas évident de trouver le bon équilibre entre la voix off, les dialogues souvent mis en sourdine et la musique qui participe pleinement à la narration.Comme souvent chez Kubik Video, les deux films sont proposés dans un packaging de toute beauté, qu'il s'agisse du fourreau ou de la pochette contenant les DVD eux-mêmes. On apprécie toujours qu'un tel soin soit apporté à un coffret, surtout pour des films aussi rares et de cette qualité. Les suppléments sont exclusifs et sont regroupés sur le premier disque.
Sono Sion : Retour sur une révolte (11mns07)
Réalisé par Julien Sévéon, cet entretien avec Sono Sion s'attarde sur les débuts du cinéaste, ses inspirations du côté de Yasujirô Ozu, son expérience du collectif artistique radical Tokyo Ga Ga Ga qu'il a lui-même fondé, et bien sûr ses souhaits en tant que réalisateur. Sono Sion revient aussi sur la genèse de Suicide Club et sur la colère qu'il ressentait à l'époque vis-à-vis de la société japonaise, une colère qui s'est extériorisée lorsqu'il était aux Etats-Unis. Le cinéaste s'attarde aussi sur sa vision de la famille japonaise qui selon lui ne se désagrège pas mais apparaîtrait enfin sous son vrai jour. Enfin, il s'exprime sur la violence visuelle de ses films, une violence qu'il voit comme de la poésie, et met en parallèle les jaillissements de sang avec celui des émotions. L'entretien en lui-même se révèle riche en contenu et fort bien mené par le journaliste qui sait manifestement à qui il a affaire. Le seul petit reproche que l'on pourra émettre provient du montage : même les initiés mettront parfois un moment à comprendre de quoi parle certaines réponses, ce qui rend l'interview peu accessible aux novices.
« Au Pays du Suicide », par Julien Sévéon
Ce reportage exclusif laisse la parole à Julien Sévéon qui nous livre une analyse bien documentée sur le phénomène du suicide au Japon. Le journaliste explique notamment en quoi le sens de l'acte de se donner la mort diffère entre l'Occident et le Japon, où plus de vingt termes existent pour le désigner. Sévéon se lance ensuite dans des considérations d'ordre démographiques, sociologiques et culturelles pour apporter quelques explications sur ce phénomène, avant d'aborder les différents types de suicides existants au Japon. Il s'attarde notamment sur le suicide de groupe que l'on met actuellement volontiers en relation avec les forums Internet, le suicide amoureux ou Shinjû, le Seppuku qui fut pratiqué par l'auteur Yukio Mishima, et bien sûr le suicide des kamikazes. Ce discours se conclut sur l'influence de ce fléau sur la culture pop japonaise, dans les films mais aussi dans les mangas ou les séries animées (telles que Paranoïa Agent, comme il le précise). Une fois encore, Julien Sévéon maîtrise son sujet et le contexte dans lequel celui-ci s'inscrit, ce qui lui permet d'apporter un éclairage intéressant tout en restant synthétique, structuré et donc très accessible.