L'image de L'Avocat de la terreur est des plus convenables. D'une part parce que les archives présentées dans ce documentaire sont pour la plupart en bon état, comme les images d'archives en N&B au début du film d'Alger ou les extraits de La Bataille d'Alger de Gillo Pontecorvo. D'autre part car le principal sujet du documentaire, l'avocat Jacques Vergès est filmé de face le plus souvent dans un tribunal ou dans son bureau dans une lumière naturelle satisfaisante. C'est le cas également pour les autres intervenants. L'étalonnage est correct et les couleurs équilibrées.
Si l'on se demande l'utilité d'une piste DD 5.1 pour le documentaire de Barbet Schroeder, celle-ci n'empêche pas de fournir par moments des effets non déplaisants sur les arrières comme lors des images d'archives montrant l'explosion d'une bombe dans le casino de Corniche. La musique est à quelques occasions présente sur les arrières mais jamais de manière très dynamique et l'enveloppement des surround reste léger. En revanche, le mixage stéréo est d'excellente facture et il faudra pour le coup opter pour cette piste. Les dialogues sont clairs et très vivants, la musique constamment présente et les basses très percutantes feront même vibrer votre plancher ! On n'en demande pas plus.
DVD 1
Lecture interactive
A l'instar d'un HD-DVD ou d'un BLU-RAY, Wild Side propose de visionner le film dans une version inédite de 3h17. Tout en regardant le film vu en salle, une icône numérotée apparaît dans le coin inférieur droit de l'écran. Dès cette apparition et en appuyant sur la touche Enter (ou Select), le spectateur bénéficie de témoignages supplémentaires (de la majorité des protagonistes du film). Un léger temps de décrochage est par ailleurs à déplorer sur certains lecteurs. Une version de 3h17 dont les scènes bonus sont notamment concentrées durant la première heure. A retenir le témoignage du sociologue Michel Wievior qui se souvient de Vergès invité à un dîner où il pensait qu'il aurait probablement été lynché sur place par des journalistes, et qui a vu de ses yeux ces mêmes journalistes lui manger dans la main après deux heures de discussion enflammée. Louis Caprioli (DST) nous apprend qu'il a échappé de peu à l'attentat ayant réduit en cendres le fameux Milkbar d'Alger. Vergès, quant à lui, se remémore la photo de Staline collée sur son pupitre à l'école et du non renouvellement de sa carte du Parti Communiste (applaudi par tous les camarades, soulagés).
Ces scènes supplémentaires ont sans nul doute été coupées pour une question de durée car certaines anecdotes s'étirent en longueur et quelques protagonistes s'y perdent parfois. Ces bonus, de durée inégale, s'étirent de 30 secondes à plus de 9 minutes (propos du collectif des avocats en Algérie sur la torture omniprésente qui était acceptée par le ministre de l'intérieur de l'époque François Mitterand).
Au total, ce sont 32 scènes supplémentaires (plus d'une heure au total) qui viennent se greffer sur la version cinéma, renforçant quelques commentaires mais cassant inévitablement le rythme du montage final. On aurait aimé que ces scènes soient disponibles à part sur le second dvd dans la section « Autour du film ». Il ne s'agit donc pas d'un nouveau montage mais d'un supplément original constitué essentiellement de témoignages. Néanmoins c'est une bonne initiative de la part de l'éditeur.
Lien internet
Voici en intégralité le site du film www.avocatdelaterreur.com, source documentaire foisonnante qui prolonge encore les interrogations et les pistes évoquées dans le film et conseillé par le cinéaste lui-même.
DVD 2
Autour du film
Les passionnés vont être ravis d'apprendre que 45 minutes de témoignages, d'images d'archives et d'interviews supplémentaires sont également disponibles sur le second disque. Gros plan sur ces scènes supplémentaires avec quelques extraits choisis :
a) Le F.I.S. (5'51): Abdenour Ali Yahia, fondateur de la Ligue Algérienne de défense des droits de l'homme, et avocat, tente de répondre à la question de comment l'Algérie a-t-elle pu construire une nation après l'indépendance.
b) Vergès et l'Afrique (3'25): Rapport de Vergès avec l'argent vu par des journalistes dont Stephen Smith.
c) Vergès à une réunion de l'extrême droite serbe (2'19): En 2002, Vergès s'est autoproclamé l'avocat de Milosevic malgré le refus de celui-ci. En réalité Milosevic n'a jamais accepté que Vergès le représente. Néanmoins, un an après le début de son procès devant le tribunal de La Haye, Vergès publie (mars 2003) « Justice pour le peuple Serbe » où il développe la défense qu'il aurait plaidé, réfutant la légitimité du tribunal. Six mois après la mort de Milosevic, Vergès se rend en Serbie à une réunion de l'extrême droite Serbe où il prend la parole devant une salle pleine à craquer. Le public, conquis, se lève à plusieurs reprises pour l'applaudir.
d) L'Affaire Findus (3'55): Jean-Paul Musy, chef de la section anti-terroriste aux renseignements généraux entre 1982 et 1984, se penche sur cette affaire de pêcherie peu orthodoxe. En 1982, Action Directe (dans la légalité après l'amnistie de 1981) désire investir ses fonds, via la société Findus, dans une pêcherie située sur l'Ile Maurice. Les Renseignements Généraux surveillent le groupe Action Directe et découvrent que Vergès pourrait être mêlé à cette affaire. Pour Musy, Vergès a franchi la ligne de la moralité tout en restant dans la légalité.
e) Le terrorisme est l'arme du peuple (1'25): Point de vue de Claude Moniquet ayant commencé sa carrière comme membre d'un groupuscule terroriste dans les années 70. Moniquet, choqué par la violence de ces actions, quitte le mouvement avant d'avoir participé à une action. Il devient alors journaliste et historien. Il croyait à cette phrase titre mais aujourd'hui ne peut concevoir qu'on justifie le terrorisme avec une «belle» phrase.
f) Les Akras Boys (3'06): Le dessinateur Siné a suscité la polémique pour ses positions anticolonialistes et anarchistes pendant la guerre Algérie. Défendu par son ami Jacques Vergès lors des nombreux procès dont il a fait l'objet, il le rejoindra brièvement en Algérie pour fonder le Journal « Révolution Africaine ». Il se souvient avec amusement comment Vergès a aidé des africains sans papiers à quitter la France pour la Belgique, en louant un car et les faisant passer pour des touristes... qui ne sont jamais revenus. Vergès les avait même affublés d'un tee-shirt marqué Akras Boys.
g) Défendre les gens indéfendables (3'13): «Jacques Vergès, pourquoi défendez vous des gens indéfendables? » «Et bien, parce que ce sont eux qui me désignent. Pourquoi? La modestie m'empêche de vous répondre. Que dirait-on d'un médecin qui refuserait de soigner un malade du SIDA sous prétexte qu'il est contre certaines pratiques sexuelles? Renoncer à défendre un «monstre» c'est renoncer à le comprendre. Le comprendre est nécessaire pour empêcher une récidive.»
h) Le pousse-pousse de Madagascar (1'): Lors d'un voyage à Madagascar, Vergès a été très impressionné de voir comment les colons traitaient les malgaches. Il prend par exemple un couple d'européens aisés et corpulents prenant place à bord d'un pousse-pousse tracté par un africain très maigre à qui on intimait l'ordre de s'arrêter en lui donnant des coups de pieds.
i) Georges Ibrahim Abdallah (2'55): Vergès ne cache pas qu'Abdallah est un homme qu'il respecte beaucoup, peut-être même celui qu'il respecte le plus pour être toujours resté d'une inflexibilité et d'une droiture exemplaires. Abdallah présumé chef des Fractions armées révolutionnaires libanaises a été condamné en France en 1987 à la réclusion à la perpétuité pour des actes terroristes.
j) Le serpent (21 secondes): Vergès «Le serpent est un animal qui me fascine. Toujours caché, il est silencieux et frappe si on le touche. Par dessus tout, il aime l'obscurité. J'aime l'obscurité.»
Les Intervenants
Biographie écrite et remise dans le contexte historique de toutes les personnes évoquées ou présentes dans le film, le tout divisé en trois catégories : les protagonistes (14 fiches détaillées minutieusement), les témoins (18 fiches) et les experts (10 fiches).
Repères historiques
Table chronologique s'étendant de 1924 à 2005 et divisée en décennies, reprenant tous les évènements liés à la vie de Jacques Vergès. On remarquera d'ailleurs que la date de naissance est incertaine.
Bibliographie de Jacques Vergès
De 1957 (Pour Djamila Bouhired) à nos jours, environ 32 ouvrages composent sa bibliographie.
L'interactivité s'achève sur la filmographie et la biographie de Barbet Schroeder et une partie ROM qui permet d'accéder au site internet complet du film.
Manquent cruellement à l'appel un entretien avec le réalisateur et l'excellente bande-annonce du film.