L'image du DVD de L'élégie de Naniwa est, il faut le dire, une déception. Beaucoup trop sombre, le transfert effectué par l'éditeur pêche aussi par une compression plus qu'approximative. Ainsi dans les nombreuses scènes nocturnes, l'image fourmille énormément, gênant quelque peu la vision du spectateur. Pour défendre l'éditeur on rétorquera que le film a tout de même 70 ans d'âge et que la photo très contrastée de Minoru Miki n'est pas non plus des plus simples à transférer sur la galette numérique.
Seule piste audio offerte par l'éditeur, la piste Mono japonaise d'origine qui n'a selon toute vraisemblance pas été restaurée. Il faut tout de même se souvenir qu'au Japon en 1936, le parlant faisait timidement son apparition, la technique n'était pas encore au point. Une grosse partie des défauts de la piste sont donc imputables aux méthodes de production de l'époque. Un léger souffle suit le spectateur tout au long du film, les voix sont étouffées et ressortent avec beaucoup de difficultées. Dommage.
Dans sa préface au film, Charles Tesson revient en une dizaine de minutes sur le contexte de réalisation de L'Elégie de Naniwa, Mizoguchi ayant mis en scène le film alors que le cinéma japonais était en plein bouleversement, de par son passage du muet au parlant d'un côté, et de l'autre à cause les néfastes influences des dérives militaristes qui sécouaient alors le pays. Charles Tesson revient aussi sur les rapport entre L'Elégie de Naniwa et les films d'Ernst Lubitsch et Josef von Sternberg, en particulier par le portrait de femmes fortes qui tiennent tête aux hommes.
On déconseillera tout de même de visionner ce bonus avant d'avoir regardé le film, tant il dévoile l'intrigue.
Bonus le plus important du DVD, l'entretien entre les deux spécialistes du cinéma classique japonais que sont Charles Tesson et Jean Narboni est une vraie petite mine d'informations. Considéré par les deux critiques comme le premier grand film réaliste du cinéma japonais, L'Elégie de Naniwa est au croisement d'une veine mélodramatique et d'un réalisme implacable que Mizoguchi approfondira dans ses films suivants, au côté de Minoru Miki, son chef opérateur. Tesson et Narboni reviendront aussi sur le titre du film qui a été pendant très longtemps mal compris par le public occidental. En effet, les spectateurs ont souvent pensé que Naniwa était le nom de l'héroïne du film alors que c'est en fait l'ancien nom de la ville d'Osaka. La question que se posent les deux critiques est de savoir alors pourquoi Mizoguchi a-t-il décidé de prendre l'ancien nom d'Osaka et non Osaka même ? Surtout que les événements du film sont contemporain à sa réalisation. La seule explication serait que le cinéaste cherchait à confronter l'ancien au nouveau, mais quelle en serait la finalité ?
Narboni reviendra aussi sur la mise en scène du film comportant des ellipses très impressionnantes plus proche de la veine du cinéma américain que de celles que l'on retrouvera plus tard dans les films de Mizoguchi. Un entretien informatif, malgré une mise en image frisant l'amateurisme étonnant de la part d'un éditeur tel que MK2. On s'accordera pour dire qu'il est tout de même moins choquant que l'entretien avec Christophe Gans présent sur le DVD de 47 Ronins.
Enfin, le DVD est complété par quatre scènes commentées par Charles Tesson dont celle du théâtre des marionnettes où la femme et la maîtresse se rencontrent. Trop descriptive, ces séquences commentées s'avèrent malheureusement peu intéressantes. On aurait préféré que l'ancien rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma se lance dans une analyse plus poussée du film.