Le dernier film de Luchino Visconti était attendu depuis longtemps déjà, c'est peu dire notre déception quant au master (français) proposé par StudioCanal. Malgré une restauration évidente ayant supprimé la majorité des scories, de nombreux soucis émaillent la vision de L'Innocent. La palette colorimétrique demeure surannée et ne parvient jamais à mettre en valeur la splendeur des costumes et des décors. Il faut attendre les scènes d'extérieur (très peu nombreuses) pour obtenir un résultat naturel et éclatant avec des blancs immaculés. Malheureusement, ces séquences se comptent sur les doigts de la main et l'ensemble se déroulant en studio, les contrastes n'ont pas été équilibrés. Les différentes teintes de rouge, symbolisant la chair, le sang, la luxure ou simplement la passion, demeurent trop anodines et accentuent une inévitable granulation comme sur les tissus décoratifs (les rideaux à 4min40). Les fourmillements sont légion au premier ou à l'arrière-plan, les accrocs de définition et d'encodage affluent : prenez par exemple les boutons de veste des soldats qui clignotent et scintillent tout au long du film. Même chose concernant l'éclat des yeux de tous les comédiens papillotants durant 2 heures, tout comme les dorures, candélabres, bijoux et l'argenterie en général. Chaque plan de Luchino Visconti était étudié de manière à perdre les personnages dans une pièce vaste mais ici aucune profondeur n'est constatée. Les noirs cotonneux et les diverses teintes ont tendance à baver, des troubles sont à déplorer. Un master crève-cœur d'autant plus qu'il s'agit de l'oeuvre la plus récente parmi cette nouvelle salve de films italiens disponible chez l'éditeur.
Les pistes italienne et française sont du même acabit en ce qui concerne la précision et la clarté d'ensemble. Evidemment, est-il utile de préciser le caractère anecdotique de la langue de Molière pour un film de Luchino Visconti ? En effet, le doublage est souvent inapproprié et en rajoute parfois dans le côté mélodramatique. De même, les dialogues saturent plus que ceux de la piste italienne. La célèbre musique de Franco Mannino dispose d'une belle ampleur notamment sur la version italienne. Cette dernière distille des dialogues brillants de précision, en parfaite osmose avec des effets disparates et fluides. L'exemple même de cette homogénéité est la scène du cours d'escrime (37min) où le fracas des lames croisées ne noie jamais le face-à-face verbal des personnages. On félicitera l'absence de souffle et une ampleur souvent étonnante. Cependant, cela reste une piste mono avec un grésillement immanquable lorsque le ton des personnages monte.