Les 47 Ronins est présenté au format 1.37 respecté dans une copie plus que marquée par l'usure du temps. Nombreux sont en effet les tâches et artefacts de pellicule présents sur le film. Rien qui ne dénature bien heureusement la vision du film, mais on se prend à rêver d'une future édition entièrement restaurée. Le transfert respecte les contrastes, et la photographie de Kôhei Sugiyama est parfaitement rendue.
Le seul défaut du transfert est son manque de définition. Les deuxième et troisième plan de l'image sont malheureusement parfois difficilement lisibles, ce qui est sincèrement dommage quand on considère que Mizoguchi est un cinéaste qui favorise très souvent les plans larges aux gros plans. Malgré cela, la compression et l'encodage s'avèrent acceptables.
Quoi qu'il en soit, MK2 déçoit quelque peu ici. Même si nous sommes heureux de découvrir un tel film, nous sommes plus que surpris que l'éditeur n'ait pas procédé à un travail de restauration plus poussé. Les 47 Ronins l'aurait réellement mérité.
Seul le Mono d'origine japonais nous est présenté sur le DVD, provoquant à nouveau une déception de part le constat que la piste originelle n'ai pas eu droit à une restauration. Un léger souffle nous suit tout au long du film, les voix sont étouffées et ressortent avec beaucoup de difficultés. Dommage.
Les 47 Ronins étant une oeuvre fondamentale dans la culture japonaise, MK2 se devait d'adjoindre dans cette édition un nombre conséquent de bonus pour permettre au DVDphiles d'approfondir le film. Chapeau bas messieurs, nous sommes servis !
Dans sa préface, Charles Tesson revient sur le contexte de réalisation du film, en pleine Seconde Guerre Mondiale, tout en évoquant la carrière jusqu'au début des années 40 de Kenji Mizoguchi.
De même, l'ancien rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma revient sur la version de Mayama Seika écrite entre 1934 et 1941 sur laquelle Mizoguchi s'est appuyé pour faire son film. Ce qui intéressait Mizoguchi dans cette version, c'est l'action reléguée au second plan, tout comme l'est l'acte même de la vengeance de ces samourais déchus, le cinéaste préférant se concentrer sur leur questionnement intérieur. C'est après que l'adaptation théâtrale des écrits de Mayama Seika ai remporté un vif succès, que Mizoguchi rassemble les acteurs de la-dîte pièce pour reprendre leur rôle devant la caméra. Charles Tesson fera un rapprochement de la mise en scène du cinéaste avec l'art pictural japonais.
Il est tout de même conseillé de visionner cette préface après avoir vu le film...
On poursuit avec un Entretien avec Christophe Gans passionnant, où l'on se prend à se demander pourquoi MK2 n'avait pas directement demandé au cinéaste français de superviser les bonus à la place d'un Charles Tesson trop universitaire et pas assez communicatif. Christophe Gans revient au cours des 50 minutes de cet entretien sur les différentes versions cinématographiques des 47 Ronins dont sa préférée, celle de Kinji Fukasaku intitulé Sword of Vengeance. Il les compare entre elles en soulignant que chacune des versions est différentes des précédentes. Une adaptation des 47 Ronins est une sorte d'instantané de la morale de la société japonaise contemporaine.
Gans se penche aussi sur ce qui fait la spécificité de la version de Mizoguchi, son point de vue féminin absent des autres versions profondément machistes, mais aussi sur le fait que ces 47 Ronins ne sont chez Mizoguchi pas maîtres de leur destin, mais soumis à des forces politiques qui les poussent.
Enfin le cinéaste évoquera la différence entre le jidai-geki et le chambara (tribal, violent et anti-féodaliste), la raison de la disparition progressive du premier en faveur du second (la jeunesse est plus habituée à la mise en scène énergique du chambara qu'aux longues séquences dialoguées du jidai-geki) mais aussi les thèmes qui obsèdent le cinéma japonais actuellement (la transmission d'une génération à une autre)...
Passionnant de bout en bout, malgré une mise en image désastreuse frisant un amateurisme sincèrement choquant de la part d'un éditeur tel que MK2. Que les apprentis cinéastes voulant apprendre à filmer un dialogue se procurent cet entretien : on y trouve tout ce qu'il ne faut pas faire !
De l'histoire des 47 Ronins à Mizoguchi est un présentation très complète par Charles Tesson de l'événement historique à l'origine des 47 Ronins, des différentes adaptations portées au théâtre et au cinéma, des spécificités de chacunes d'elles, etc... Parfois quelque peu redondant sur ce qui a déjà été dit sur les deux précédents modules, ce documentaire permettra aux spectateurs de mieux saisir comment Mizoguchi a du positionner son adaptation par rapport aux autres.
Sept séquences commentées par Charles Tesson complètent le DVD. Malheureusement comme d'habitude avec l'ancien rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma, nous avons plus à faire avec une simple description de ce que l'on voit à l'écran, sans réelle analyse poussée de la mise en scène.