Buried
Le 02/11/2010 à 11:16Par Arnaud Mangin
Le thriller de l'année est là et il ne tient que dans un mouchoir de poche. Coinçant Ryan Reynolds dans un cercueil pour le vouer à une douloureuse agonie, Buried s'impose comme le huis clos ultime et ne repose que sur deux questions : comment sortir de là et pourquoi personne n'est prompt à venir apporter son aide ? Digne des meilleurs opus d'un Alfred Hitchcock présente, ce suspens claustrophobe nous tient en haleine de bout en bout. Attention, film fort !
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Critique Buried
Autant ne pas perdre de temps : dans le genre défi artistique poussé dans ses derniers retranchements mais d'une efficacité monstrueuse, Buried se pose là ! Alors qu'on se demandait encore, il y a quelques années, comment un film comme Phone Game tiendrait la route en ne focalisant son intrigue que sur une simple cabine téléphonique, le réalisateur espagnol Rodrigo Cortès pousse le bouchon encore plus loin en plantant l'intégralité de son film dans une simple caisse en bois ! Six planches à moitié solides, un cercueil de fortune, un seul comédien coincé et constamment allongé dans ce qui restera sans nul doute l'un des décors de cinéma les plus étroits. Un exercice plutôt casse-gueule puisqu'il prend le parti de ne JAMAIS dévoiler un autre endroit de tout le film, mais qui ne sombre pas pour autant dans le simple concept démonstratif ni dans le pétard mouillé. On pouvait craindre que sa durée ne soit trop longue pour un tel cadre (1h35) mais Buried offre une escalade de tension exploitant avec brio les préceptes basiques du thriller, de manière plutôt maligne et sans jamais tomber dans le grotesque. Rien que ça, c'est fort ! Si l'on ajoute une interprétation impressionnante de Ryan Reynolds, on frise littéralement l'exploit.
Buried s'appuie sur un principe formel et une toile de fond à la fois distincts et complémentaires. Outre le gros mcguffin consistant à savoir comment le héros va parvenir à s'échapper de ce piège à priori inextricable, le développement repose essentiellement sur des négociations multiples au téléphone avec, pêle-mêle, ses propres ravisseurs, ses proches, l'administration, ses employeurs et ces petits interlocuteurs de tous les jours qui peuvent se montrer pénibles au quotidien mais qui prennent soudainement une importance capitale. En outre, en situant son intrigue dans le désert irakien pendant l'invasion américaine, le film se focalise sur le traitement alloué aux otages sur le plan procédurier. Ou comment le gouvernement et les établissements privés se renvoient la balle pour ne pas porter le chapeau en cas de disparition de l'un de leur ressortissants, sachant que le ralentissement incessant des démarches ne fait que mettre en péril une personne dont l'oxygène se fait de plus en plus rare à chaque seconde. Sans être un film de guerre, Buried a le mérite de pointer du doigt le sujet un peu épineux de la vie des nababs contractuels pris malgré eux dans le champ de bataille, et ce sans jamais sombrer dans la fable moraliste. Le peu d'estime dont bénéficie un être de chair et de sang face aux complications sociales qu'il incarne ne fait qu'accroitre le suspense, soulevant des questions particulièrement crispantes.
Si Buried a donc le bon goût de se doter d'un fond pertinent, tout le langage cinématographique est utilisé à bon escient pour accentuer l'angoisse dans ce thriller pur et dur. Et si l'on décèlera bien une ou deux petites facilités ayant pour but de relancer l'affaire de plus belle, l'ensemble fonctionne avec une vraie force jusqu'à la dernière seconde. Au sens propre du terme, d'ailleurs. Soutenu par un travail sonore assez exceptionnel pour un si petit huis clos, le suspens hitchcockien de Buried s'impose comme l'une des grosses réussites de l'année. Faudrait être six pieds sous terre pour le rater...
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Date de première publication : 25 août 2010 à 19h02