Easy Money
Le 25/03/2011 à 15:01Par Elodie Leroy
Inspiré de la trilogie Stockholm Noire de Jens Lapidus, Easy Money plante son décor dans les bas-fonds de la capitale suédoise pour entraîner trois hommes d'origines sociale et ethnique différentes dans le tourbillon destructeur du crime organisé. Si la réalisation n'est pas exempte de quelques influences, Daniel Espinosa maîtrise remarquablement son récit et affirme un regard personnel sur ses trois protagonistes, parmi lesquels un étudiant qui va payer cher son attrait pour l'argent facile. La force du film réside dans la subjectivité de ses points de vue, qui permet aux personnages de gagner peu à peu en relief face à une violence viscérale mise en scène sans complaisance. Découvrez la critique de Easy Money.
CRITIQUE FILM : EASY MONEY (SNABBA CASH)
Si l'affiche française d'Easy Money, alias Snabba Cash, évoque sans nul doute celle d'un grand classique du cinéma – un certain Scarface –, il s'agit peut-être purement d'un choix marketing local puisque le film de Daniel Espinosa s'inspire en réalité d'une œuvre littéraire, plus exactement le premier tome de la trilogie Stockholm Noire de Jens Lapidus (récemment de passage au Salon du Livre). Débutant à la manière d'un film choral, l'histoire plante son décor dans les bas fonds de la capitale suédoise, ville multiculturelle par excellence, aux côtés de trois hommes d'origines sociale et ethniques différentes : un étudiant suédois ambitieux et téméraire qui tente sa chance dans le trafic de drogues, un dealer latino-américain fraîchement évadé de prison et qui veut faire un dernier coup avant de mettre les voiles, et un tueur à gages yougoslave chargé de pister le précédent.
A travers les destins tragiques de ces trois hommes, Easy Money dresse un tableau sans concession du monde impitoyable du crime organisé, aux antipodes des grandes sagas criminelles glorifiant les valeurs du milieu. Entre appât du gain et trahisons, les codes d'honneur ne sont guère à l'ordre du jour, et comme l'étudiant JW (Joel Kinnaman) le découvrira à ses dépens, il est beaucoup plus facile d'entrer dans ce nid de guêpes que d'en sortir. Si le film dégage une certaine froideur dans sa première demi-heure, les personnages gagnent petit à petit en épaisseur tout au long de l'histoire sans jamais ressortir magnifiés. La force d'Easy Money réside dans la subjectivité de ses points de vue, surtout quand la violence explose avec une sécheresse qui n'a d'égale que son réalisme sordide. La scène où JW assiste au passage à tabac d'un homme qui a trahi son gang est à ce titre d'une grande puissance dramatique. A travers ce milieu hors-la-loi, ce sont les comportements humains en situation de survie que Daniel Espinosa scrute sans aucune complaisance. La direction d'acteurs s'avère d'ailleurs impeccable : révélation du film, Joel Kinnaman est poignant dans le rôle de l'étudiant qui, attiré par l'argent facile, joue avec le feu jusqu'à atteindre un point de non retour.
Baigné dans une ambiance sonore envoûtante, Easy Money sort également du lot par un montage stylisé qui confère à la narration une constante fluidité. La réalisation de Daniel Espinosa n'est pas exempte de quelques influences (certains plans évoquent Pusher de Nicolas Winding Refn), mais le cinéaste maîtrise son récit et affirme un regard personnel sur cette descente aux enfers tragique qui finit par prendre aux tripes non sans faire naître une émotion inattendue.
Une séquelle du film est d'ores et déjà prévue pour 2013. Il n'en fallait pas plus aux Américains pour s'approprier l'idée puisqu'un remake devrait lui aussi voir le jour prochainement… avec Zac Efron (!). Quant à savoir si la version hollywoodienne saura retrouver l'âme de l'original, c'est un autre problème…