Le Bruit des glaçons
Le 05/07/2010 à 15:04Par Michèle Bori
Jouant au chat et la souris avec la mort devant la caméra de Bertrand Blier, Jean Dujardin et Albert Dupontel exultent dans une farce mi-fable, mi-satire dont seul le cinéaste a le secret. Si l'on n'atteint pas le génie de ses œuvres phares comme Les Valseuses ou Tenue de soirée, Le Bruit des glaçons ne manque pas de mordant et affiche un burlesque savoureux.
Découvrez ci-dessous la critique du film Le Bruit des glaçons...
Critique Le Bruit des glaçons
La filmographie de Bertrand Blier a toujours revendiqué son statut de brochette d'œuvres surréalistes, jouant à l'excès avec le théâtral et se posant sèchement comme le contrepied revendicatif dont l'industrie française avait besoin. Après le très collégial Les Acteurs qui semblait retentir comme un point d'exclamation salvateur à son œuvre et le léger mais oubliable Combien tu m'aimes ? qui avait le mérite de la rafraichir, Le Bruit des glaçons se pose comme une sorte de miroir en bout de chaine. Bertrand Blier qui met Bertrand Blier face à ses responsabilités, se croquant lui-même avec une autobiographie à peine masquée, retournant comme un gant ses propres préceptes. Rien de plus normal dans cet univers toupie qui joue ici avec la rétribution forcée à toute une carrière un peu rebelle, où les valeurs morales, ironiques et inéluctables semblent se polir à la peau de chagrin. Où ce quatorzième degré élevant misogynie à une forme de génie aurait laissé sa place à la galanterie personnifiée. Où plus que jamais, les femmes sont l'issue de tout. Mais c'est pour la bonne cause.
Après une série de chef d'œuvres où le tout à chacun cherchait un sens à sa vie, les protagonistes du Bruit des glaçons capituleraient devant la première raison de mourir qui se poserait devant eux. En effet, Jean Dujardin y campe un auteur à succès coupé du monde physiquement comme moralement, abandonné par les siens, noyant sa solitude dans le whisky lorsque soudainement, c'est son propre cancer (interprété par Albert Dupontel) qui vient lui rendre visite. Parce qu'il aimerait bien sympathiser avec sa future victime et se demande pourquoi celle-ci s'accroche un peu moins à la vie que les autres. Une sorte de Rencontre avec Joe Black que l'on aurait croisé avec Buffet Froid. Pour le reste, tout y est : la verve sèche et clinquante, des comédiens qui envahissent l'espace à tel point que Dupontel vole des tics à Gérard Depardieu, une quête constante de soi dans la solitude et surtout une lucidité sur la fatalité des choses.
Le réalisateur, comme beaucoup, semble voir arriver le bout du tunnel et mime de s'incliner poliment devant ce dernier... Non sans oublier de lui faire un ultime pied de nez burlesque dont lui seul a le secret, comme pour nous confier que la mort est une chose que l'on vit pleinement !