Les petits ruisseaux
Le 03/05/2010 à 10:01Par Michèle Bori
Avec Les petits ruisseaux et son histoire simple et touchante, Pascal Rabaté nous livre un premier film doux, paisible et surtout très fidèle à la bande dessinée d'origine. Un tendre voyage dans le monde calme et mélancolique des septuagénaires, pour un petit film tout ce qu'il y a de plus recommandable.
Découvrez ci-dessous la critique du film les Petits Ruisseaux
Nota : l'auteur de cette critique est un grand amoureux de la bande-dessinée d'origine. Quelqu'un ne connaissant pas cette dernière aura certainement un regard bien différent sur le film de Pascal Rabaté.
critique les petits ruisseaux
La bande-dessinée serait-elle devenue un nouveau vivier à réalisateur ? On peut se poser la question, puisqu'après Enki Bilal, Riad Sattouf, Joann Sfar et à un degré moindre, Marjane Satrapi, c'est au tour d'un autre dessinateur de renom, Pascal Rabaté, de passer derrière la caméra pour mettre en image quelques unes de ses planches. Les petits ruisseaux, son premier film donc, est l'adaptation d'une BD éponyme sortie en 2006 chez Futuropolis. Elle raconte comment un vieil homme à qui la vie ne promet plus grand chose va se reprendre en main et partir sur la route pour se refaire une seconde jeunesse. Une histoire simple, réaliste, qui le démarque immédiatement de certains de ses collègues dessinateurs passés derrière la caméra. En effet, loin des délires métaphysiques de Bilal et des expérimentations formelles de Sfar, Les petits ruisseaux brille par sa limpidité. Mieux, par son humilité. Pour son premier film, Rabaté ne s'est pas autoproclamé "artiste du 7ème Art" et n'a pas cherché à courir avant d'apprendre à marcher. Il s'est focalisé sur son histoire, ses personnages et son rythme. Une intention dont nous ne soulignerons jamais assez la maturité et qui le rapproche donc beaucoup plus de Sattouf et ses beaux gosses que de Sfar et son Gainsbarre.
Nous voilà donc à suivre Emile (Daniel Prévost), un septuagénaire veuf qui après la mort de son meilleur ami se dit qu'il est bien dommage de moisir tout seul chez lui. Rabaté nous raconte son quotidien, ses envies, son désespoir. D'une partie de pêche à un rendez-vous amoureux, en passant par un enterrement et une discussion de comptoir, c'est un portrait à la fois social et humain qui nous est proposé ici. Dans cette aventure qui n'est pas sans rappeler Une histoire vraie de David Lynch, Pascal Rabaté nous propose une peinture touchante, tantôt naturaliste, tantôt poétique, mais toujours emprunte d'une certaine mélancolie et d'une douceur de tous les instants, autan de qualités qui faisaient le charme de la BD d'origine. Les amoureux de cette dernière seront donc ravis de redécouvrir, en images, quelques uns des moments phares du livre, mis en bobine avec délicatesse, sans effets de style pompeux. En ce sens, on appréciera qu'il ne se soit pas cassé les dents sur la transposition de quelques séquences particulièrement casse-gueules à adapter, la scène d'amour entre les deux seniors par exemple.
"Les petits ruisseaux font les grandes rivières" chantait Jeanne Moreau. Le film de Pascal Rabaté en fait de même, puisqu'à travers la petite histoire, il nous racontera la grande. La vie d'Emile et sa voiture électrique, c'est sans doute ce à quoi nous serons tous un jour confrontés. D'aucun en aurait tiré un gros mélo tire-larmes. Rabaté lui, sans jamais tomber dans le pathos, parvient à nous faire sourire. Et grâce à des dialogues d'une rare finesse joués par des comédiens attendrissants, le film ne tombera jamais dans un misérabilisme social de mauvais aloi. C'est ainsi qu'à l'instar de son petit bonhomme de héros, Pascal Rabaté parvient à éviter quelques embûches dressées sur son chemin et nous emmène au bout d'une histoire touchante, à un rythme piano et sans fausse note. Pour un tout premier film, c'est assez fort. De quoi nous laisser rêver d'un ruisseau un peu plus large, pourquoi d'un fleuve nommé Ibicus ?