Numéro 9
Le 17/07/2009 à 08:12Par Arnaud Mangin
A la fois objet mitigé et petite déception, Numéro 9 impose une esthétique absolument fascinante, à mi-chemin entre le film d'épouvante et une vision de Jules Verne sur le néo-nucléaire, mais semble n'avoir mis ses œufs que dans ce seul panier. Belle, mais effroyablement vide, cette pièce d'animation à part est aussi merveilleuse pour les yeux qu'elle en reste neutre pour le cœur. Dommage, le potentiel était énorme.
Le film estival que l'on attendait le plus, que l'on voulait absolument voir et dont les images suscitaient les plus grandes attentions, c'était celui-là ! Fruit de la rencontre improbable mais à priori fascinante entre Tim Burton et Timur Bekmambetov, Numéro 9 confirme toute l'attention des réalisateurs américains (on dira que Timur en fait désormais partie) pour le format animation au service d'une histoire et d'un univers qui le nécessitait, sans pour autant basculer dans l'infantilisation habituelle des studios. Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on est même carrément à des lieues d'un programme enfantin sur le papier, lorsque l'on observe le pessimisme ambiant et surtout visuel dans lequel baigne le film. Des poupées de chiffon déambulant dans une terre apocalyptique ayant éclatée en pleine seconde guerre mondiale où plus aucun humain n'a survécu. Gigantesque tas de ruines, la planète s'impose essentiellement en un cimetière d'autres poupées - de porcelaine - histoire de mieux appuyer le cauchemar des tout petits avant d'enfoncer définitivement le clou : le cadavre d'un nourrisson dans les premières secondes. Le ton est donné.
Le ton oui ! L'atmosphère aussi. Splendide soit-dit en passant, puisque située dans une réalité alternative comme évoquée plus haut, où toute vie a cessée dans une époque où l'habituelle technologie des films de SF n'existait pas encore, laissant lieu à un univers un peu steampunk où les engins à vapeur, l'acier, le bois et le tissus demeurent les dernières traces qu'une vie y a un jour existé. Mais pourtant, la vie demeure, à travers quelques personnages rafistolés, bricolés par le dernier homme avant de mourir, qui voulait laisser derrière lui une ultime trace. Neuf petits bonshommes, chacun étiquetés d'un numéro nominatif, qui doivent lutter et survivre contre d'autres étranges créatures métalliques. Bien alléchant ce programme, où l'intégralité des plans est d'une beauté esthétique à saluer...
Mais alors, qu'est ce qu'on lui reproche exactement à ce petit bout de péloche sortie de nulle part ?
Le problème, c'est que s'il n'y a rien à dire de concret sur Numéro 9, c'est que le film lui-même ne se donne pas la peine de raconter quoi que ce soit. Comme si l'esthétique suffisait, comme si une accumulation de scènes d'action plus ou moins réussies (mais surtout affreusement répétitives) faisait la farce, comme si l'épatante galerie de monstres (dont un absolument effrayant qui semble échappé d'un film de Romero) était la seule nécessité à l'étiquetage mature du film. Parler de rien, mais alors d'absolument rien, d'une façon belle, c'est bien mais ça ne suffit pas. Car quitte à se mettre à dos une partie du public en proposant un dessin animé simili-horrifique, autant en profiter pour proposer autre chose qu'un timide petit film d'aventure où les personnages se contentent de galoper d'un point A à un point B. Autant également proposer des personnages un brin attachants... On ne retrouve malheureusement rien de tout ça dans une intrigue fondamentalement très infantile.
En plus de n'être qu'un écrin vide et pas forcément totalement au point sur un plan technique, Numéro 9 souffrira surtout de sa comparaison avec Wall-E d'Andrew Stanton qui, avec un thème identique et l'ombre de Mickey au dessus de la tête, avait finalement fourni une pièce plus émouvante et plus mature. Au mieux, Numéro 9 se place en concept de jeux vidéo à suivre. Au pire en une galerie de photos intéressante à regarder. Pas plus.