The Dark Knight Rises
Le 18/07/2012 à 18:19Par Camille Solal
Oui, The Dark Knight Rises est une conclusion épique et grandiose, oui, un nouveau palier a été franchi dans le monde exponentiel des films de super-héros, oui, ce dernier volet de Batman est l'antithèse presque parfaite du néanmoins très réussi The Avengers et oui le film fera date ! Pour autant, les spectateurs les plus pointilleux pourront aisément rechigner face à des dialogues souvent peu inspirés, des personnages secondaires insipides et un faux rythme qui accuse d’indéniables longueurs. Le dernier opus de la saga Batman est-il donc vraiment supérieur à son prédécesseur ? La réponse ci-dessous dans notre critique de The Dark Knight Rises.
Le film le plus attendu de l'année a su cristalliser les attentes les plus folles. Tout au long du projet on aura pu, à loisir, pester contre le moindre choix de Christopher Nolan, allant jusqu'à remettre en doute l'utilité même d'un troisième opus après l'incroyable performance d'Heath Ledger en Joker. Après tout, à quoi bon poursuivre l'aventure sans la plus grande némésis de l'homme chauve-souris ? Presque aucune si ce n'est qu'à la fin de The Dark Knight le personnage de Bruce Wayne en avait encore sous le capot, endossant son rôle de proscrit avec la sensation limpide du devoir accompli. Véritable arme de destruction massive, Bane était donc un personnage parfaitement calibré pour tenir tête à Batman et lui offrir un challenge physique sans commune mesure avec les précédents adversaires du chevalier noir.
Hélas, si Bane, la voix trafiquée et le visage mangé par un masque imposant, fait forte impression lors de l'incroyable prologue, il se révèle bien vite aussi vide et terne que Ra’s Al Ghul en son temps. Une douche froide, d’autant que le personnage, décrit comme un génie du crime, ne fait que condenser les meilleurs chapitres du Parfait Petit Anarchiste du Joker tout en y apposant la griffe de l’immortelle Ligue des Ombres. Parmi tous les nouveaux venus, c'est plutôt Anne Hathaway qui tire son épingle du jeu en interprétant une Catwoman féline et badass, plus proche des comics que des versions de Michelle Pfeiffer et d'Halle Berry. Malheureusement l’alchimie entre la pie voleuse et la chauve-souris ne fonctionne pas, la faute à une profusion de personnages secondaires insipides (Miranda Tate, John Blake, Foley, etc.) et à la volonté particulièrement saugrenue de Christopher Nolan de vouloir traiter tous ses personnages avec la plus grande équité. Finalement, c’est bien par le prisme de la relation père/fils de Bruce Wayne et d’Alfred Pennyworth, servie par une interprétation sans faille de Christian Bale et de Michael Caine, que naît la seule vraie émotion du film.
Si le scénario accuse quelques longueurs avec des scènes de dialogues souvent peu inspirées, agrémentées de taglines involontairement amusantes et de twists rapidement éventés, il n’en demeure pas moins que The Dark Knight Rises est un spectacle visuel de tous les instants. Nolan, proclamé roi du "blockbuster intelligent" a, en effet, à l'image même de l'architecture changeante de Gotham City au fil des épisodes, affiné sa vision de ce monde en confrontant l'image souterraine du premier opus au vertige des gratte-ciels du second. En renversant la cité et en faisant chuter son héros, il revient à ses propres sources et racines, faits d'obscurs passages souterrains, d'alcôves d'égouts, de tréfonds obscurs et d'odeur de mort. Cette fois pourtant, point de Thomas Wayne pour tendre sa main à notre héros, prisonnier de l'antre psychologique de tous ses traumatismes et obligé de se sortir seul de ce néant infini afin de retrouver la lumière et la foi, quelque part entre les buildings et les nuages. Définitivement peu à l’aise dans les moments les plus intimistes, c'est donc durant les grandes séquences d'action, lorsque l'espace de jeu du chat et de la (chauve) souris devient un véritable champ de bataille que le réalisateur impressionne, encore. Arrivant à capter des affrontements de masse en plein cœur d'une ville-poumon, dernier bastion de tout espoir, dernier rempart contre le déferlement du mal sur le monde, Nolan rend son final aussi épique qu'attendu. Ainsi, même si peu de séquences impressionneront autant que la scène de course-poursuite nocturne de The Dark Knight, il est indéniable que le talent du réalisateur fait une nouvelle fois des merveilles et ce, malgré un montage déroutant doté de nombreux raccords cut créant un faux rythme à l’ensemble du long métrage.
Enfin, Batman made in Nolan ne serait rien sans ses thématiques et la force de The Dark Knight Rises réside aussi dans le fait de construire (ou tout du moins de poursuivre) une réflexion profonde sur le statut du super-héros avec un personnage central qui se doit de comprendre et d’embrasser le véritable sens, fondamental et pur, du "héros moderne" afin de vaincre ses ennemis et de trouver la paix. Au final, même si le film n'est pas la claque attendue (pour peu qu'on attendait ici le chef d'oeuvre absolu) et ne surpasse pas son prédécesseur (la faute à l'absence de l'étincelle nommée Heath Ledger), il reste néanmoins un très impressionnant divertissement, rondement mené et d'une ampleur quasi titanesque. Alors que certains rechigneront face à ce final sans surprise, au dernier tier un peu fade et à l'épilogue particulièrement prévisible, d'autres pourront donc, à juste titre aussi, penser qu'avec ce The Dark Knight Rises Christopher Nolan a achevé sa Tour de Babel d'une belle manière : sur la toile blanche autant que dans le coeur des spectateurs, son Batman entrant enfin dans la légende.