Tucker & Dale fightent le mal
Le 12/12/2011 à 20:08Par Michèle Bori
Shaun of the dead a fait des émules et ça fait du bien ! En marchant dans les pas du film d'Edgar Wright, est la comédie d'horreur la plus drôle, la plus déjantée et la plus gore que l'on ait vu depuis longtemps. A la fois survival sylvestre, comédie slapstick et romance geekesque, ce film signé Eli Craig nous rappelle avec délice les œuvres cartoon de Sam Raimi et de Peter Jackson, lorsque ceux qui n'étaient pas encore les maîtres d'Hollywood faisaient couler des hectolitres de sirop d'érable sans chercher à se montrer plus malins que le genre qu'ils abordaient. Tucker & Dale fightent le mal : un vrai massacre à la déconneuse ! Découvrez ci- dessous Tucker & Dale fightent le mal : la critique !
Tucker & Dale fightent le mal : critique
Tant qu'il ne tente pas de se prendre pour ce qu'il n'est pas, le slasher est un genre cinématographique on ne peut plus fréquentable. Parce qu'il est toujours marrant de voir des teenagers paumés en cambrousse se faire dépecer par des rednecks consanguins, les fans de bobines saignantes arriveront toujours à prendre leur pied devant un slasher, aussi débile soit-il. Sauf que voilà, depuis quelques années, ce genre qui pendant des décennies n'avait pas cherché à être autre chose qu'un plaisir coupable pour cinéphiles Mad-eux s'est fait hara-kiri en s'auto-surclassant vers la première classe, la série A comme on dit aux Etats-Unis. Ainsi, en lorgnant bêtement du côté du premier degré et du réalisme, le slasher a délaissé l'un de ses préceptes de base et a fini par lasser. C'est pourquoi, lorsqu'un film comme Tucker & Dale fightent le mal déboule sur nos écrans et parvient à se moquer ouvertement de ce genre qui se regarde le nombril, tout en réussissant l'exploit de répondre au même cahier des charges que les films qu'il singe, on ne peut qu'applaudir.
Tucker & Dale, c'est l'histoire d'un gros malentendu. Un "quid pro quo" comme dirait Hannibal Lecter, lui qui n'est pas le dernier pour utiliser des effets de manches à des fins purement gorasses. D'un côté, nous avons une bande de teenagers californiens partis faire la fête en forêt façon "Massacre dans la dernière maison sur la colline 3D", QI cumulé avoisinant le degré d'alcool inscrit sur leur pack de bière. De l'autre, Tucker et Dale, deux bons gros bouseux du Mid-West, salopettes et barbes de trois semaines, qui conduisent un pick-up en écoutant du Mark Chesnutt. Bien entendu, les premiers - gavés de bobines PG-17 et abrutis par l'herbe qui rend parano – vont vite s'imaginer que les seconds sont des Leatherface en puissance prêts à tout pour leur faire imiter le cri du cochon en jouant du banjo. Sauf que voilà, Tucker et Dale ne sont que deux pauvres bougres pas très malins venus retaper une maison au bord d'un lac ... Et une fois les personnages du film posés, une fois que les archétypes ont permis aux préjugés de prendre le dessus sur le bon sens, la gaudriole peut commencer !
Il existe une vieille règle officieuse à Hollywood qui dit qu'il ne faut jamais – au grand jamais – mélangé horreur et comédie dans le même film. Au diable les conventions ! Car pour être tout à fait franc, on n'avait pas autant ri devant un film d'horreur depuis Shaun of the Dead (ndlr : en fait, si, on avait beaucoup ri devant Mother of Tears de Dario Argento, mais pas pour les mêmes raisons). A l'instar de la pépite anglaise d'Edgar Wright, le film d'Eli Craig réussit le double exploit de nous offrir à la fois une bonne comédie (comprenez par là un film qui fait souvent rire) et un bon film d'horreur (comprenez par là un film qui fait parfois peur). Car s'il est une satire plutôt maline, Tucker & Dale a le bon goût d'utiliser les mêmes armes que ce genre ultra codé qu'il pointe amicalement du doigt. Comme dans un vrai slasher, la mise en scène est soignée, la direction artistique également, les séquences horrifiques sont légions et les effets gores pas avares en sirop d'érable. Et comme dans une vraie comédie, les personnages sont attachants (bien aidés par la partition énorme des comédiens, Tyler Labine et Alan Tudyk en tête), les dialogues bien écrits, le rythme est incisif et les différents genres de comiques (de situation, de répétition, de gestes ...) utilisés avec justesse, sans jamais que l'on tombe dans la vulgarité crasse. On suit donc ce Tucker & Dale fightent le mal comme un gros cartoon de 90 minutes, ponctué ça et là de séquences jubilatoires qui nous rappellent par instant les délires slapstick de Sam Raimi (période Evil Dead 2) ou de Peter Jackson (Braindead style). Excusez du peu ! Et comme par dessus tout cela, Eli Craig a le bon goût de nous offrir une petite romance pas déplaisante dans laquelle se retrouveront beaucoup de "freaks and geeks", on peut dire sans trop se tromper que Tucker & Dale fightent le mal est le gros délire gonzo du début de l'année 2012.