Critique : Kiba - Episodes 1 à 13
Le 16/04/2009 à 10:03Par Caroline Leroy
Il est des séries dont le pedigree peut raisonnablement faire peur, voire très peur. C'est le cas de Kiba, commande de la division japonaise d'Upper Deck - une société américaine dédiée à la production de trading cards - à l'attention du célèbre studio MadHouse (Gungrave, Death Note). Par miracle, cette série de 51 épisodes ne porte que très peu les stigmates de ses origines mercantiles. Le mérite en revient sans doute au réalisateur Hiroshi Kôjina, qui confiait en 2006 au magazine Animage sa détermination à ne pas aliéner son intrigue à la simple promotion des cartes en question. Le résultat est intrigant et il ne faut pas attendre longtemps avant de s'y laisser prendre. Tout shônen qu'il soit, Kiba n'a effectivement rien à voir avec Yu-Gi-Oh !, et s'avère au cours des treize épisodes de ce premier coffret être beaucoup plus sombre que prévu, qualité qui ne le destine finalement pas vraiment à un public enfantin.
L'intrigue de Kiba tourne autour du personnage de Zed, un adolescent à problèmes âgé de 15 ans, qui supporte difficilement son existence morose au sein de la cité très polluée de Calm. Persuadé qu'il existe ailleurs un monde dans lequel il pourra s'épanouir, il ne fait que fuir constamment, jusqu'au jour où ses poursuivants se révèlent plus dangereux que prévu. C'est alors qu'il se retrouve fortuitement propulsé dans un autre univers par le biais d'un portail spatio-temporel, abandonnant derrière lui - du moins le croit-il - son meilleur ami Noah handicapé par un mal incurable. Atterrissant dans un lieu inconnu, il fait la connaissance d'individus rompus à l'usage de la magie, qui se font appeler « Shard Casters ». Leurs pouvoirs, contenus dans des billes nichées dans leur corps, leur permettent de libérer et de contrôler des monstres appelés « Spirits », armes de guerre redoutables dont l'aspect varie considérablement d'un hôte à l'autre. Zed ne tarde pas à réaliser que sa présence dans ce monde du nom de Templar n'est pas un hasard et qu'il possède lui aussi des dons extraordinaires. Mieux, il semble qu'il abrite en son sein le plus puissant de tous les Spirits : Amil Gaoul.
A défaut d'être révolutionnaire, le postulat de Kiba se pose comme immédiatement sympathique. Le contraste entre la ville crade et irrespirable de Calm dépeinte dans le premier épisode et le monde apparemment luxuriant qui s'ouvre à Zed dès le deuxième suscite une curiosité mêlée d'amusement. La sensation de dépaysement est bien là et les deux personnages principaux, Zed et Noah, sont ébauchés juste ce qu'il faut pour qu'on ait envie de les suivre. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on n'est pas déçu par le déroulement assez inattendu des événements. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, Kiba n'a rien d'une série balisée et la plupart des multiples rebondissements parviennent à surprendre réellement, tandis que se dessinent les luttes continuelles opposant les différents pays de ce monde inconnu (Templar, Jimott, Neotopia...). L'intrigue a beau être relativement linéaire, le découpage alterne habilement entre les histoires de Zed et de Noah, qui sont chacun susceptibles d'être confrontés à des situations extrêmes dans des contextes perpétuellement changeants. Sans être à proprement parler une série violente - le sang est presque totalement maintenu hors champ -, Kiba ne ménage pas ses protagonistes et il n'est pas rare que les scénaristes s'amusent à nous attendrir sur un personnage pour le changer en un ignoble traître quelques épisodes plus tard ou, au choix, lui faire connaître une mort cruelle dès l'instant où il donne l'impression d'être confortablement installé dans la série. Mieux vaut s'attendre à tout.
Cette aptitude à maintenir le suspense tout en proposant un divertissement attrayant dont on attend perpétuellement de connaître l'évolution, est incontestablement l'un des points forts de Kiba. La personnalité de Zed, on l'a dit, ne brille pas par sa complexité : héros de shônen typique au design peu ragoûtant (la coiffure, en particulier), il agit selon des motivations pour le moins basiques. Malgré une certaine parenté dans le postulat de départ, nous ne sommes évidemment pas dans Les 12 Royaumes. Là où Zed commence à devenir intéressant toutefois, c'est dans sa relation avec son Spirit, le légendaire et fascinant Amil Gaoul, qui refuse de communiquer avec lui tout en exauçant plus ou moins ses vœux en situation de combat. Les autres personnages principaux de Kiba sont plus vivants et attachants, et certains sortent du lot comme Noah, sans doute le plus fin et le plus travaillé de tous. D'autres suscitent la sympathie malgré eux, tels Robes, le noble décadent aux dérives cleptomanes joué avec beaucoup d'humour par Shinichirô Miki (Initial D). Enfin, la série est pourvue d'un vrai méchant, Hugh, impénétrable et cynique à souhait, et interprété avec une suprême classe par Kappei Yamaguchi (InuYasha).
Parmi les nombreux attraits de cette modeste série qu'est Kiba, n'oublions pas de mentionner la musique très réussie de Jun Miyake, qui apporte une ampleur inattendue à certaines scènes, en plus de nous donner irrésistiblement envie de voir l'épisode suivant à chaque nouvelle preview. Vivement le coffret 2.