Test DVD : Basquiat
Le 12/02/2008 à 14:59
Par Sabrina Piazzi
Première réalisation du peintre-sculpteur Julian Schnabel, Basquiat s'intéresse au peintre new-yorkais du même nom né en 1960 et mort des suites d'une overdose en 1988. Il n'est pas anodin de noter que le cinéaste débutant était un ami de Jean-Michel Basquiat et que tous deux sont issus de la peinture néo-expressionniste. Schnabel était donc en terrain connu pour réaliser ce film à la mémoire de Basquiat.
Dans sa courte mais déjà étonnante carrière de réalisateur, Julian Schnabel a toujours affirmé son goût et son attachement pour les artistes underground et marginaux, méconnus et incompris de la société dans laquelle ils ont vécu. Il n'y a qu'à voir son opus suivant, Avant la nuit, qui évoque le destin bouleversant de l'écrivain cubain homosexuel Reinaldo Arenas poursuivi par la dictature castriste, pour s'en persuader pleinement. Jean-Michel Basquiat fait partie de ces artistes issus de classes sociales défavorisées (il a vécu dans la rue et dormi dans des cartons) ayant traversé de multiples drames (une mère internée dans un asile psychiatrique, Basquiat ne s'en remettra jamais véritablement) et au destin traversé de solitude et d'isolement. Demeurant peu connu en France du grand public, Basquiat a pourtant évolué dans les dernières années de sa vie auprès d'un des pères fondateurs du mouvement Pop Art, Andy Warhol, qui reconnut en lui un talent hors norme et qui contribua sans doute beaucoup au succès tardif de son œuvre, appréciée spécialement au sein d'une élite d'artistes new-yorkais (dont toute la bande à Warhol).
Le film de Julian Schnabel a le mérite de ne pas enjoliver la vie de l'artiste mais plutôt de dresser le portrait d'une personnalité indiscernable, humble et désenchantée, insistant beaucoup sur ses airs d'enfant lunaire, pensif et romantique. Mais sous ses apparences de garçon fragile se cache un aspect plus sombre de sa personnalité : Basquiat est un artiste torturé par des démons et des voix intérieures qui le poussent à se camer régulièrement, jusqu'à ce que sa petite amie (Claire Forlani dans l'un de ses premiers rôles) le retrouve un jour inanimé sur le lit, ne répondant plus. Il frôlera une première fois la mort. Même si Basquiat décèdera finalement des suites d'une overdose de drogue, l'intérêt du réalisateur est ailleurs et Schnabel évite heureusement le portrait cliché de l'artiste toxico ne répondant plus que par des injections d'héroïne. La seconde et dernière partie du film se penche sur sa relation privilégiée avec Andy Warhol (David Bowie a réussi à choper les mimiques du personnage auquel il insuffle un côté doux et attendrissant) et la douleur qui le transpercera en apprenant la mort de son ami (cette séquence est certainement l'une des plus réussies et les plus émouvantes du film).
Pour son premier coup d'essai, Schnabel ne réalise pas pour autant un coup de maître et même s'il sait parfaitement s'entourer de comédiens américains et européens qu'on affectionne beaucoup (allez, citons en quelques uns : Dennis Hopper, Benicio Del Toro, Gary Oldman, Christopher Walken, Willem Dafoe, Parker Posey, Elina Löwensohn, Courtney Love...), certaines situations et personnages ont tendance à frôler la caricature. Le film ne creuse pas suffisamment le stade douloureux de la création artistique et ne fait que survoler l'œuvre de Basquiat sans en tirer les grandes lignes de sa peinture. Pour en savoir plus, mieux vaudra s'y intéresser par le biais d'expos ou de livres consacrés à son travail. Saluons tout de même l'interprétation tout en finesse de Jeffrey Wright en Basquiat lunaire et contemplatif.
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