Contrairement à All I desire, Demain est un autre jour a été tourné en 1.85. Le transfert est proposé dans un 16/9 renforçant la sensation de profondeur dans les arrière-plans. Le directeur de la photographie Russell Metty, fidèle collaborateur de Douglas Sirk, joue avec les clairs-obscurs où se trouve plongé le père de famille une fois rentré chez lui et accentuant de ce fait son état d'esprit. Dès le générique, la luminosité du master restauré s'érige sans difficulté malgré une ou deux petites tâches noires émaillant furtivement l'écran. Ensuite, ce sont les contrastes qui attirent la rétine, magnifiquement travaillés et restitués par l'éditeur. Le défaut récurrent aux copies des films de Sirk provient une fois de plus de ce voile granuleux, peut-être un peu plus visible que sur All I desire en raison d'une photographie plus veloutée. Le visage de Barbara Stanwyck paraît plus altéré que les autres avec de très légers fourmillements, tout comme le ciel demeurant immanquablement parsemé de picotis. L'étalonnage a tendance à se déséquilibrer au moment des fondus enchaînés et le plan du film le plus abîmé se trouve à la 53ème minute du fait d'une double transition en fondu. Le N&B est gracieusement nuancé et magnifié par un 16/9 de haute qualité.
Ce n'est pas que l'on s'attendait à une piste sonore plus claire que celle d'All I desire mais celle de Demain est un autre jour, réalisé trois ans après, apparaît vaguement en deçà. On note une petite dizaine de scènes doublées d'une résonnance, ainsi qu'un souffle parasite tout au long du film. Le mixage est altéré au cours d'une même scène et la voix rauque de Barbara Stanwyck avait plus de coffre sur le mixage d'All I desire. Néanmoins, cela n'empêche pas qu'une ou deux scènes relèvent vivement le niveau comme par exemple lors de la représentation théâtrale où le mono tire partie de l'ardente musique. De temps à autre à la limite de la saturation, la magnifique composition d'Heinz Roemheld et Herman Stein est omniprésente et frémissante.
DVD 1
Bande-annonce-vostf (2min35)
Comme pour All I desire, la bande-annonce de Demain est un autre jour est proposée comme un supplément à part entière et provient d'un contretype sans trucage, qui plus est comportant quelques prises alternatives comme la scène du baiser et un autre plan inédit de la scène décrite par Gigi Perreau dans les suppléments.
DVD 2
Demain est un autre jour par Bourget et Berthomieu (25min03)
« L'incontournable » duo est de retour afin d'évoquer Demain est un autre jour. On l'avait signalé en réalisant la critique des suppléments d'All I desire que l'on regrettait le véritable dialogue entre les deux protagonistes, mais cela tourne cette fois-ci au dialogue de sourds. Pierre Berthomieu met un temps fou à formuler sa question à Jean-Loup Bourget qui, au moment où il doit répondre, a déjà oublié ce qu'on lui demandait et se lance alors dans des tirades paraphrasant le film et ce durant plus de vingt minutes ! De plus, il n'est pas rare qu'une phrase ne soit pas terminée et que Bourget commence déjà à évoquer un autre sujet. Dans ce gloubi-boulga on parvient néanmoins à extraire l'ironie selon Douglas Sirk (avec le titre du film et dans l'ouverture très conte de fées). On retiendra également que chacun des deux protagonistes considère Demain est un autre jour comme étant l'un des films les plus bouleversants du cinéaste. Malheureusement les deux compères effleurent un peu trop succinctement le film concerné et le fond de l'oeuvre de Douglas Sirk n'est que rarement évoqué.
Tant d'années après... (22min35)
Sous la nostalgie de ce titre se dissimule en réalité deux entretiens croisés avec les actrices Pat Crowley (Ann) et Gigi Perreau (Ellen) que l'on avait déjà vues dans les suppléments de Qui donc a vu ma belle ?.
Ce que l'on regrette, c'est que les deux comédiennes n'aient pas été interviewées ensemble, les retrouvailles auraient sans doute été émouvantes et les souvenirs de tournage peut-être plus nombreux. Il n'empêche que la vague d'anecdotes touche facilement la sensibilité du spectateur. Gigi Perreau s'avère bavarde et n'a rien oublié de ses collaborations avec Douglas Sirk qu'elle retrouvait pour la quatrième et la dernière fois. Trouvant le film toujours aussi déchirant, elle se souvient surtout d'une scène tournée où elle fut couverte d'éloges par les professionnels et où on lui parlait même d'une possible nomination aux Oscars pour le second rôle qui aurait été un véritable tremplin pour sa carrière. Elle garde également en souvenir les félicitations reçues de la part de son réalisateur, Douglas Sirk, avec qui elle s'entendait à merveille.
Quant à Pat Crowley, si ses propos ne se résument souvent qu'à l'encensement de Barbara Stanwyck àqui elle vouait alors un culte sans nom, l'actrice a au moins le mérite d'être honnête et passionnée. Elle se dit très fière d'avoir tourné dans ce film mais regrette que cela ait été sa seule collaboration avec Douglas Sirk.
Perspectives sur la famille américaine (25min16)
La réalisatrice américaine Allison Anders se montre surexcitée à l'idée de parler de son film de chevet Demain est un autre jour. Entourée d'affiches des films de Douglas Sirk offertes par Martin Scorsese, notre intéressée encense le couple formé par Fred MacMurray et Barbara Stanwyck et ne cache pas sa grande passion pour le cinéma de Douglas Sirk en général. Bien que fouilli, cet entretien est surtout balisé par les grands thèmes explorés par le cinéaste allemand, en particulier la dissection de la famille américaine des années 50.
Allison Anders fait ensuite un gros plan sur le personnage du père interprété par Fred MacMurray tout en le comparant avec d'autres personnages issus du cinéma de Douglas Sirk. Ensuite, notre interlocutrice évoque quelques scènes du film en les commentant, insiste sur le courage d'avoir parlé d'un tel sujet dans l'Amérique des années 50 et continue de s'extasier en parlant du film avec une passion communicative. Bien qu'évoquant le fond plus que la forme, la réalisatrice en vient finalement à déclarer que Wim Wenders est selon elle le digne successeur de Douglas Sirk en ce qui concerne la représentation de la famille américaine comme il a déjà pu le démontrer dans Paris, Texas ou Don't come knocking. Elle-même se dit très influencée par le travail de Wim Wenders pour ses propres films. Elle clôt cet entretien passionné en avouant que l'envie l'a démangée de réaliser un remake de Demain est un autre jour, afin dit-elle d'accompagner réellement les personnages. Mais trop respectueuse de son film de chevet et malgré quelques recherches, Allison Anders a finalement revu son projet.