Matteo Garrone use du cadre large avec dextérité et compose de magnifiques plans merveilleusement encodés sur DVD. Il est d'ailleurs assez rare de noter un aussi beau transfert de la part de l'éditeur qui nous avait fréquemment déçus. Le point fort de cette édition DVD de Gomorra se révèle être l'agencement des couleurs avec une large palette variée, jamais prise en défaut, de jour comme de nuit et durant les séquences les plus difficiles à restituer numériquement comme par exemple celle du night-club, baignée de stroboscopes et de spots incandescents. Comme nous vous le démontrons à travers certaines captures tirées du film, le 2.35 permet au cinéaste d'instituer une profondeur de champ épatante spécialement au niveau des rendus de la cité napolitaine. Différentes atmosphères se mêlent dans Gomorra, et de solides contrastes confortés par une compression limpide apparaissent tout aussi incisifs au cours de scènes aussi disparates que la fameuse séquence de tir par Marco et Ciro, tournée caméra à l'épaule sous un ciel gris, et celles se déroulant sous le soleil plombant de la Campanie. Au final c'est une copie lumineuse et au piqué acéré que l'éditeur nous livre, en assurant ainsi à Gomorra une seconde vie en DVD.
A l'instar des diverses séquences de pétarade, TF1 sort l'artillerie lourde. A travers deux pistes italienne et française Dolby Digital 5.1. et DTS, l'écoute de Gomorra se fait à plein rendement même si les latérales ont parfois du mal à s'imposer face aux frontales déchaînées. Evidemment, nous vous conseillons d'éviter le doublage français où vous perdrez en naturel quant au rendu des dialogues. Les deux pistes 5.1. contiennent leur lot d'effets variés, comme c'est par exemple le cas à 1h09 lors de la scène des camions ou à 1h17 dans le club où le tube d'Enigma « Sadness » retentit sur toutes les enceintes, plongeant littéralement le spectateur dans l'ambiance souhaitée par Matteo Garrone. TF1 enfonce le clou avec ses deux pistes DTS, parvenant à doubler les effets arrière de la séquence de tir (44ème minute), surchauffant davantage le caisson de basses, et restituant des dialogues encore plus percutants en version originale.
DVD 2
Les backstages de Gomorra : 5 histoires (1h)
Voici un remarquable documentaire tourné durant le tournage du film et qui n'est jamais perturbé ni par une voix-off paraphrasant l'action en cours ni par de longs extraits du film comme c'est habituellement le cas. La caméra capte de savoureux instants pris sur le vif quand le réalisateur Matteo Garrone prend le temps de parler avec ses comédiens, les figurants et son équipe technique, ou lorsqu'il encourage les acteurs à improviser. Les images du tournage rendent compte d'une bonne ambiance, de l'entente d'une équipe relativement réduite, et d'un réalisateur très impliqué, prenant lui-même place derrière la caméra.
L'interview de Roberto Saviano (41min16)
Présentée de manière assez austère avec une lumière naturelle changeant constamment, l'interview de l'écrivain s'impose néanmoins comme LE segment indispensable de cette remarquable édition. Précis, didactique et passionnant, Roberto Saviano dissèque son roman dans les moindres recoins et approfondit encore plus quelques points largement évoqués dans le film de Matteo Garrone, que l'écrivain semble beaucoup apprécier. Les trafics (arme, drogue), les pactes et alliances des quartiers pauvres de Scampia et Secondigliano sont analysés, les organisations démantelées, l'influence du cinéma (comme Scarface dans le film) dans le monde mafieux sont démontrés et les liens avec la politique avoués. Si nous devions vous donner un conseil, c'est de vous arrêter au fil des chapitres de cet entretien et d'y revenir ultérieurement afin de ne pas perdre le fil de ce saisissant exposé.
L'interview des acteurs (10min07)
En introduction, le comédien Toni Servillo (Franco) lit divers extraits du livre de Roberto Saviano. Puis les acteurs Gianfelice Imparato (Don Ciro) et Salvatore Cantalupo (Pasquale) nous parlent brièvement de leur personnage respectif sans apporter un seul élément original par rapport à ce qui est vu dans le film. Même chose pour Toni Servillo (remarquable Giulio Andreotti dans Il Divo) qui se contente de dresser les grands traits de Franco et qui nous décrit ses relations avec le réalisateur Matteo Garrone.
Scènes coupées (13min30)
Sept séquences coupées au montage final sont ici disponibles. Proposées de manière enchaînée, ces scènes permettent aux spectateurs d'apercevoir le Vésuve bordant la baie de Naples lors de la première scène où la caméra suit un cortège de fourgons de police roulant à pleine vitesse sur les axes autoroutiers de la ville. La suite démontre un peu plus longuement la vie des jeunes, passant leur temps sur les arrêts d'urgence des voies rapides, témoignant leur sympathie pour les truands emmenés par les forces de l'ordre. Une autre scène démontre une fois de plus le travail de Franco lors de l'exploration d'une surface en construction où il a fait déverser quelques produits toxiques. On apercevait dans le making-of le tournage d'une séquence où des enfants fouinaient les immondices. Cette scène absente du montage final est ici disponible.