Du point de vue de la restauration il n'y a rien à dire : les scories ont été purement et simplement éradiquées tandis que les griffures et points sont subliminaux. Si l'ensemble jouit d'un bon équilibre (y compris durant les credits d'ouverture), ce sont surtout les contrastes qui posent problème. L'étalonnage n'a pas vraiment été rééquilibré et a tendance à changer au cours d'une même scène. Il subsiste un grain cinéma pas désagréable mais le plus ennuyeux provient des gros plans où ces picotis croissant avec insistance. La palette colorimétrique n'est guère mise en valeur avec des teintes sensiblement défraîchies dans la deuxième partie qui s'avère plus altérée que la première à dominante métallique et beige. La compression se fait également défaillante au moment des déplacements rapides des comédiens (ex à 1h40'47) et à l'utilisation de la caméra portée de Francesco Rosi. Malgré cela, de nombreuses scènes sombres surprennent par des noirs profonds et nous paraissent les plus réussies du lot, comme au cours de l'enchaînement des règlements de compte. Notons aussi les problèmes de saturation de la couleur rouge en prenant par exemple la manière dont ressort la couleur du pyjama de Rod Steiger à la 47ème minute du film.
L'éditeur nous propose le film en version française mono et en version italienne mono. Si les deux mixages se révèlent de même calibre, on notera un dynamisme plus vif pour la version originale avec des effets percutants et une présence tonitruante de la composition signée Piero Piccioni. La piste française distille des dialogues avec un abattage non feint mais tout le reste des ambiances semble mis en retrait. Il suffit de comparer la scène du restaurant à la 5ème minute du film pour se rendre compte que la piste italienne possède un éclat et un mixage plus soigné et équilibré. En revanche, il arrive que dans la version italienne certains dialogues repris en postsynchronisation dénaturent visiblement le naturel des conversations et le volume tend parfois à changer. Constatons également la seule saturation de l'ensemble à la 11ème minute au moment de la chanson.
Interview audio de Francesco Rosi par Michel Ciment (57min23)
Cet entretien audio réalisé en octobre 1973 est pauvrement illustré par la même combinaison de dix photos durant presque une heure. Autant vous dire que malgré les propos passionnants délivrés ici, l'œil se fatigue rapidement et afin de ne pas user vos mirettes nous vous conseillons de vous installer confortablement, de fermer les yeux et d'écouter cet entretien où le cinéaste s'exprime dans un français parfait. Si leur complicité est visible (les deux intervenants se tutoient), l'échange entre Michel Ciment et Francesco Rosi est finalement assez rare mais le cinéaste apparaît très loquace. Vous y apprendrez comment le réalisateur adopte la forme adéquate au sujet traité, ses motivations personnelles et son rapport avec un public, auquel il demande d'être attentif à ce qu'il voit à l'écran, espérant ainsi entamer un débat après la projection. Francesco Rosi révèle pourquoi le personnage de Lucky Luciano le fascine, discute sur l'évolution de la Mafia et ses rapports avec les divers gouvernements. Quand enfin Michel Ciment lui demande ce qu'il pense des films à thèse, le cinéaste réfute qu'on lui colle cette étiquette. Ce qu'il désire avant tout, c'est faire un film pour comprendre lui-même les choses qu'il développe dans ses longs métrages.