AS I LAY DYING : critique du nouveau James Franco
Le 08/10/2013 à 19:12Par Matthieu Morandeau
Notre avis
Véritable star hollywoodienne depuis quelques années, récemment à l'affiche du Monde fantastique d'Oz (Sam Raimi) et de Spring Breakers (Harmony Korine), James Franco est également un auteur inspiré, réalisateur de nombreux courts-métrages, documentaires et longs-métrages indépendants. Pour son nouveau long métrage, As I lay dying, Franco s'attaque à un monument de la littérature américaine "Tandis que j'agonise", de William Faulkner, et réalise un film bouleversant, parfois à la limite du cinéma expérimental.
As I Lay Dying raconte le deuil de la famille Burden, suite au décès de la mère de famille. Le père et ses cinq enfants prennent la route à travers le Mississippi pour rejoindre la ville natale de la défunte, où elle souhaitait être enterrée. Chacun des enfants réagit à sa manière face à cette épreuve et l'histoire nous est ainsi contée à travers les yeux de tous ces protagonistes...
Fidèle à l'œuvre originale, James Franco joue sur les points de vues et la notion de subjectivité à travers un traitement majoritairement basé sur l'utilisation du split screen. Ainsi, les événements nous sont constamment montrés sous plusieurs angles et, ainsi, de deux façons différentes. Le réalisateur nous présente en même temps deux prises différentes d'un même plan, en fonction du ressenti des personnages. Sur le même principe, Franco joue avec la temporalité en mélangeant flashbacks , flashforwards, et présent. De cette façon, et grâce à un scénario intelligent, le film travaille aussi sur notre propre subjectivité. Un personnage au premier abord froid et antipathique peut devenir fragile et émouvant en fonction de ce que nous raconte tel ou tel autre personnage. James Franco se prêtant évidemment lui même "au jeu" en se donnant le rôle du "bon" frère, apprécié de tous, évidemment bien plus complexe qu'il n'y parait...
Si cette mise en scène, aux lumières froides et ternes, affecte le rythme, souvent lent, du film, elle réussit toutefois à brouiller régulièrement les repères du spectateur, découvrant sans cesse de nouveaux éléments et secrets sur cette famille, jusqu'au retournement de situation final, particulièrement inattendu et émouvant.
Toujours dans le but d'être fidèle à Faulkner, As I Lay Dying est entrecoupé par de longues scènes de monologues tirés du livre, dévoilant les pensées des personnages. Le personnage est alors face caméra, racontant ses secrets les plus intimes à un spectateur devenu confident et parfois juge. Tantôt angoissante, tantôt hypnotisante, l'ambiance sonore soignée, épaississant la psychologie des personnages témoignant, là encore, d'une approche expérimentale du réalisateur.
Côté interprétation, c'est un sans faute. La justesse des comédiens soutient à merveille ce voyage émotionnel et l'on retiendra en particulier la performance hallucinante de Tim Blake Nelson dans le rôle du père de famille édenté et sans état d'âme, ou encore celle de Logan Marshall-Green dans le rôle de Jewel, personnage le plus fascinant du film.