Bronson
Le 13/07/2009 à 18:16Par Yann Rutledge
Notre avis
"Venez bande de tarlouzes !" Torgnole après torgnole, tête bien haute, les poings levés, toujours prêt à en découvre avec les matons. Michael Peterson alias Charlie fucking Bronson, autoproclamé "prisonnier le plus violent du Royaume-Uni". Un corps impatient incarné par un Tom Hardy habité, transformé physiquement en une brute épaisse, muscles saillants, crâne rasé et moustache en guidon. Depuis ses 21 ans et son vulgaire braquage de bureau de poste (pour vingt-six livres...), Charles Bronson a croupi pas moins de 30 années en isolement sur les 34 passées derrière les barreaux pour cause de violence excessive envers les surveillants et les autres détenus. Un personnage hautement controversé et contestataire qui n'intéresse pourtant que partiellement Nicolas Winding Refn.
Autant à l'aise dans les bas fonds danois (l'incroyable trilogie Pusher) que dans un univers d'apparence lynchienne (Inside Job), Nicolas Winding Refn s'intéresse en effet moins aux affres de Bronson au sein du système carcéral qu'à la façon à laquelle cette bête ingérable et tapageuse dont l'ambition a toujours été d'être une star (sans pourtant savoir chanter ou jouer la comédie) apprend dans un premier temps à se servir de son corps et de ses poings comme moyens d'expression et d'attention pour finalement dans un second temps s'émanciper par le dessin et la peinture vivante. Ce n'est ainsi clairement pas le vrai Bronson ni même sa facette romanesque qui l'intéresse mais plutôt la métamorphose d'un homme par l'art. Mettant rapidement au placard tout dessein de réalisme, le cinéaste pénètre le psyché de l'hurluberlu et en fait le pantomime d'un one man show égocentrique.
Narrée, animé et mis en scène par Charles Bronson lui-même, mû par un narcissisme qui n'a d'égal que sa grandiloquence, le bonhomme a bien évidemment une proposention à l'emphase que certain pourrait interpréter trop rapidement comme une apologie de la violence de la part de Nicolas Winding Refn. Seulement voilà, Bronson vampirise entièrement la mise en scène de Refn. Chaque plan est composé sous le joug de l'écrasant performer sans que le cinéaste, impuissant, puisse faire quoi que ce soit. Pas un seul plan sans qu'il n'apparaisse pour éructer son hostilité envers le système, le quidam, les conventions, tout. Un anti-héros excentrique, fascinant et sans foi ni loi qui rappelle Alex/Malcolm McDowell de Orange Mécanique, les bikers gay du Scorpio Rising de Kenneth Anger et le Joker de Heath Ledger. Suivant jusqu'au bout sa logique life = art, Bronson fait fi des conventions sans jamais avoir peur de paraître trop théâtral. Survolté, inclassable, parfois déroutant, Nicolas Winding Refn signe incontestablement l'OFNI à ne pas manquer cet été.