Deauville 2010 : Les Runaways

Critique Les Runaways

Plantant son décor dans l'Amérique des années 70, Les Runaways retrace l'ascension fulgurante de Cherrie Curry et Joan Jett, de leur adolescence rebelles à leur accès au statut d'icône du rock, jusqu'à la descente aux enfers de Cherrie Curry et la séparation du groupe. Aux commandes du film, la réalisatrice Floria Sigismondi réalise son premier long métrage après une longue carrière dans le clip vidéo. Le Curriculum Vitae de la dame s'avère pour le moins impressionnant puisqu'elle a notamment œuvré pour le compte d'artistes majeurs tels que David Bowie, The Cure, Leonard Cohen, Marilyn Manson ou encore Björk et Sigur Ros. Si Les Runaways n'est pas exempt d'un certain classicisme, le résultat convainc suffisamment pour que l'on se risque à prédire un bel avenir à sa réalisatrice.

Stars emblématiques d'une génération, les héroïnes de Les Runaways sont plongées dans le tourbillon du showbizz, pour le meilleur et pour le pire, le film captant aussi bien la quête d'identité de Cherrie Curry que la détermination de Joan Jett à s'imposer dans un univers alors très masculin. A y regarder de plus près, le tableau très macho de l'industrie du disque demeure toujours d'actualité, les mentalités évoluant à pas d'escargot et le nombre de groupes exclusivement féminins restant encore à ce jour restreint. C'est pourquoi les membres du groupe Les Runaways demeurent aujourd'hui encore des icônes féministes à part entière. A ce titre, le fait que le metteur en scène soit une femme trouve un intérêt dans le point de vue adopté : Floria Sigismondi filme ses actrices de manière sexy mais prend ses personnages comme sujets, là où nombre de ses confrères n'auraient pu s'empêcher de porter un regard plus détaché de leur ressenti.

Floria Sigismondi met à profit son expérience dans le clip vidéo et son sens visuel pour créer une esthétique rock flamboyante qui transpire d'un véritable amour de la musique et d'une fascination pour ses héroïnes. On pourra aisément reprocher à Les Runaways un scénario manquant d'originalité, le récit n'évitant pas les écueils du biopic - à croire qu'il faut s'appeler Olivier Dahan pour donner un coup de fouet au genre. Le film s'élève cependant dès lors qu'il s'attache à traduire les tourments existentiels de Cherrie Curry, interprétée par Dakota Fanning, très investie émotionnellement et physiquement (Dakota Fanning et Kristen Stewart interprètent elles-mêmes plusieurs titres de la bande originale). Si la jeune actrice n'a pas toujours eu des rôles passionnants ces dernières années, The Runaways lui permet enfin de s'épanouir dans un rôle adulte, l'occasion de se souvenir à quel point elle avait impressionné en petite fille dans La Guerre des Mondes aux côtés d'un certain Tom Cruise. De leur côté, Kristen Stewart (la saga Twilight) casse son image d'idole des ados, tandis que le toujours excellent Michael Shannon (Les Noces Rebelles) tourne en roue libre pour notre plus grand plaisir.

Première publication : 04/09/2010