Fame
Le 01/10/2009 à 15:44Par Michèle Bori
Sortez vos ghettos-blasters, vos bandanas et vos joggings moulants, Fame est de retour ! Presque trente ans après, le grand classique d'Alan Parker (vainqueur de deux Oscars en 1981) se paye une cure de jouvence, un 'relooking extrême' comme on dit à la télé, et cherche à s'adapter à la demande actuelle d'une jeunesse élevée à grand coup de Star Ac' et autres X-Factor. Hélas, malgré son talentueux casting de jeunes premiers et ses quelques séquences de danse plutôt bien emballées, ce Fame version 2009 souffre de trop nombreux défauts qui le font tout droit rentrer dans l'indigente liste des films de danse adolescents actuels (Sexy Dance et autres) qui prennent pour acquis l'héritage de leurs glorieux ainés (Fame donc, Flashdance, Dirty Dancing ...) au lieu de chercher à le renouveler, voire à l'améliorer. Pire, avec son scénario bâclé, ses personnages stéréotypés et son non-rythme constant, ce Fame-là deviendrait presque aussi parodique vis-à-vis du genre abordé que la dernière mascarade des frères Wayans... fort !
Découvrez ci-dessous la critique de Fame
Depuis quelques années, le grand public se prend de passion pour les concours de chant et de danse télévisés. Allez, avoue-le, même toi qui ne regarde jamais la télé, tu as déjà entendu parler au moins une fois de Star Academy, de Pop Star, d'American Idol, de Jennifer, des What 4, de Un, Dos, Tres, de Susan Boyle, de X-Factor ou encore du show américain "So you think you can dance" ! Si l'on remonte un peu le fil de l'histoire, en cherchant à savoir d'où provient cet épiphénomène, on pourrait finir par découvrir qu'une des pierres angulaires de ce courant culturel n'est autre que le film d'Alan Parker Fame sorti en 1980 sur tous les écrans du monde et à l'origine d'un des plus gros succès de l'Histoire du cinéma. Car pour faire simple, voilà un film qui suit le quotidien de jeunes gens pétris de talent dans une école d'artistes où on leur apprend à chanter, à danser et à jouer la comédie... bref, un film qui posait les bases d'une vague de shows télévisés à succès. C'était donc dans la logique des choses, compte tenu de la mode actuelle hollywoodienne, que cette œuvre précurseur, avant-gardiste même, se voit offrir un remake, une cure de jouvence obligatoire pour satisfaire un public peu enclin à se laisser porter par l'aspect gentiment ringard de l'original.
Que les fans du film d'origine se rassurent : on retrouve dans ce remake toutes les grandes scènes qui firent le succès de Fame version 80. De l'improvisation du Hot Lunch au spectacle final en passant par le solo de piano, tout ou presque y est. Bien sûr, les sonorités pop du film d'origine sont ici remplacées par des partitions mêlant musiques électroniques et hip-hop, mais l'esprit et l'énergie du film de Parker reste plus ou moins les mêmes. On notera également que certains traits de caractères des héros du film de 1980 (Coco, Lisa, Hilary) se retrouvent en outre ça et là dans plusieurs personnages de cette relecture façon XXIe siècle qui prend néanmoins soin de bien éluder plusieurs sous-intrigues "embarrassantes" (l'homosexualité de Montgomery, Doris qui refoule le fait qu'elle soit juive, l'avortement d'Hilary...). Il fallait s'y attendre, on est là dans du divertissement ultra casual, tout public et les quelques zones d'ombres des personnages sont très vite éclipsées pour laisser place à ce que tout le monde veut voir : les séquences de "performance" ! Et là, il faut avouer que le réalisateur s'en est donné à cœur joie, puisque ces passages de danse/chant/comédie sont indubitablement les plus réussis et les plus emballants du film. Très dynamique, toujours lisible, la mise en scène de Kevin Tancharoen met magnifiquement en valeur les chorégraphies imaginées pour le film et nous plonge le temps de courts instants dans une déferlante d'énergie éminemment communicative. Les jeunes comédiens y sont également pour beaucoup, en particulier les excellents Collins Pennie et Paul Iacono, ainsi que les jolies Kherington Payne, Naturi Naughton (vue dans Notorious) et Kay Panabaker (sorte de petite soeur d'Ellen Page), qui se donnent à fond dans tous leurs shows. Bref, sur 1h45 de film, il y a bien 20 minutes où l'on est à fond dans le métrage. Hélas, entre ces séquences dansantes et chantantes vraiment immersives, le film s'enlise dans ce que l'on appelle communément le "syndrome du film porno" : dès que ca s'arrête de gigoter, on a envie de faire "avance rapide".
Souffrant d'un scénario extrêmement mal ficelé, qui multiplie les saynètes au détriment d'une réelle caractérisation des personnages, le film de Kevin Tancharoen fait plus penser à un épisode récapitulatif d'une série télé de quatre saisons qu'à un véritable film de cinéma. Reprenant le principe du film original qui étalait son histoire sur quatre années, Fame s'empresse d'expédier un maximum de séquences bouche-trous et déjà vues, histoire d'offrir le minimum syndical de profondeur à ses personnages... qui en deviennent clichés par la force des choses. Ca va vite, trop vite et l'on ne parvient qu'à de trop rares moments à s'intéresser à ces histoires d'amour traitées par dessus la jambe, à ces confrontations parent-enfant factices et à ces rêves de gloires brisés on ne sait trop pourquoi. Le film tombe alors dans le même carcan que tous ces récents films de danse urbains (Save the last dance, Sexy Dance, Dancing Girls et autres) et ne surprend donc jamais, ni sur son déroulement, ni sur sa gentille morale, qui nous dit - sans rire - qu'il faut croire en nos rêves et que quand on veut on peut. Dommage, il y a fort à parier qu'en se détachant un peu des éternels clichés du genre, il y avait la place pour faire une œuvre un peu plus originale, un peu moins prémâchée, qui ressemblerait plus à un film, et moins à un cahier des charges ou à une pub pour la BO du film.