Ghost In The Shell SAC : Solid State Society
Le 03/10/2005 à 21:19Par Elodie Leroy
En plus d'être un stimulant efficace pour les neurones, Ghost in the Shell SAC Solid State Society est une claque visuelle qui confirme tout le bien que l'on pensait de Kenji Kamiyama, un talent à suivre attentivement dans les prochaines années.
Avec l'excellente série Ghost in the Shell Stand Alone Complex, qui a déjà connu deux saisons depuis son lancement en 2002, Kenji Kamiyama s'est véritablement réapproprié l'univers créé il y a maintenant dix-sept ans par le mangaka Masamune Shirow. Un univers pourtant déjà visité auparavant par une pointure du cinéma d'animation, Mamoru Oshii, dont les deux longs métrages Ghost in the Shell et Ghost in the Shell 2 : Innocence faisaient date dans le genre du Cyberpunk à leur sortie. Le tour de force de Kenji Kamiyama est d'avoir su exploiter les concepts du manga de Shirow et respecter codes visuels mis en place par Oshii, tout en imprégnant la série de sa vision personnelle. Moins contemplative que les films du maître, la série puise sa force dans l'intégration d'un véritable questionnement sociologique sur le monde actuel mais aussi dans la place importante accordée aux personnages, une vision conférant une humanité bienvenue à ce monde happé par la technologie. Cependant, si le format de la série télévisée permettait de développer les affaires du Rieur et des Onze Individuels sur une durée avoisinant chaque fois les 500 minutes, il n'en est pas de même pour un long métrage. Avec SAC Solid State Society, le jeune réalisateur se retrouve face à un nouveau défi : atteindre la même profondeur philosophique en 1h45 de temps, sans pour autant négliger l'action qui tient elle aussi une place essentielle dans Ghost in the Shell. Le verdict ? Kamiyama s'en sort admirablement et prouve une fois encore sa maîtrise de la narration à travers ce long métrage qui mêle réflexion et divertissement avec une efficacité étonnante.
Après une introduction percutante qui débute par l'inévitable saut dans le vide de Motoko, lui-même suivi d'un superbe générique signé Yoko Kanno et interprété par Origa, SAC Solid State Society nous plonge dans une de ces affaires tortueuses dont la saga Ghost in the Shell a le secret. Levons immédiatement toute ambiguïté, SAC Solid State Society nécessite d'avoir déjà vu (et compris) les deux saisons de la série puisqu'il fait directement suite à SAC 2nd GIG. L'histoire se déroulant deux ans plus tard, on retrouve le petit monde auquel on s'était habitué quelque peu changé : nouvelles fonctions pour Togusa, nouvelles recrues dans la Section 9. Mentionnons aussi le nouveau look de Batô, dont les dessinateurs n'ont pas hésité à modifier la coupe de cheveux, l'occasion de remarquer la précision du character design. Après leur coup d'éclat de la fin de 2nd GIG, les Tachikomas ont quant à eux été remplacés par les Uchikomas, de nouvelles machines de combat dotées d'Intelligences Artificielles mais dénuées d'individualité, au contraire de leurs prédécesseurs. En dépit de ces quelques bouleversements, on se retrouve très rapidement en terrain familier, et c'est avec un plaisir certain que l'on retrouve ses marques et que l'on se surprend à jongler avec les concepts et le vocabulaire spécifiques à la saga.
Grâce à un scénario haletant et remarquablement écrit, SAC Solid State Society continue d'explorer les rapports complexes entre le corps et l'esprit, le matériel et le virtuel, le collectif et l'individuel. Comme dans la série, Kenji Kamiyama crée une dynamique entre les problématiques liées au Cyberpunk, telles que la fusion homme/machine, et les thématiques sociales qui différencient radicalement son approche de celle d'Oshii. Cette fois, c'est directement la survie de l'espèce qui est touchée, à travers les questions préoccupantes du vieillissement de la population et des maltraitances envers les enfants. Le développement des personnages, s'il n'est bien évidemment pas aussi approfondi que dans la série télévisée, est loin d'être en reste et les deux héros du métrage s'avèrent surtout être le Major Motoko Kusanagi et Batô, dont la relation forte et ambiguë ne cesse de s'étoffer à travers le temps. Motoko poursuit quant à elle la quête de sa propre humanité à travers le Net, une quête qui prend un tournant nouveau lors de la séquence émouvante qui conclut le métrage, un final qui laisse tout juste ce qu'il faut de questions ouvertes pour susciter l'espoir d'une suite.
Sur le plan artistique, SAC Solid State Society atteint une fois de plus des sommets. A la recherche graphique toujours plus fouillée s'ajoute une fusion parfaite entre l'animation traditionnelle et la 3D - les voitures s'intègrent parfaitement dans le décor, en plus de bénéficier de designs qui raviront les amateurs -, ouvrant la voie aux mouvements de caméra simulés les plus fous. La mise en scène fluide et dynamique de Kamiyama se voit d'ailleurs mise au service d'une pelleté de scènes d'action des plus musclées, dans lesquelles l'héroïne se livre à tout un tas de cascades démentes, avec le style qu'on lui connaît. Les fans ne seront décidément pas dépaysés.