Les enfants de Timplebach
Le 11/12/2008 à 08:34Par Michèle Bori
Le 17 Décembre prochain, si vous devez emmener vos enfants ou vos petits neveux et nièces au cinéma, foncez voir La Cité de l'Ombre de Gil Kenan, et passez donc votre chemin devant ce film sans saveur qu'est Les Enfants de Timpelbach. D'un côté un film plein de magie et d'aventures au cœur d'un univers mystérieux et unique, de l'autre une tentative de faire du "trop" avec du "rien" et qui surfe honteusement sur la vague Harry Potter en mixant l'atmosphère des bouquins de J.K. Rowling avec celle des premiers Jeunet. Si ces enfants-là réussissent là où ceux de Djamel Bensalah avaient échoué l'année dernière dans Big City, à savoir au box-office, c'est vraiment qu'il n'y a aucune justice dans ce bas-monde.
Les Enfants de Timpelbach est le premier film du tout jeune réalisateur Nicolas Bary, qui en quelques années a réussi à se faire un nom dans le milieu du court-métrage grâce à deux films, Before et Judas (disponibles chez DVD Pocket). Deux courts qui avaient séduit par leur univers inspirés et le savoir-faire du jeune homme. En toute logique, Bary s'est vu offrir la possibilité de mettre sur pied son premier long métrage, tiré du grand classique de la littérature pour enfant d'Henry Winterfeld, son livre de chevet, qui avait déjà sérieusement inspiré Before. Un projet audacieux, dont nous saluerons l'ambition, et qui à le mérite de sortir des sentiers battus de la production hexagonale. Sauf que voilà, les ambitions ne font pas forcément un bon film, et les Enfants de Timpelbach souffrent d'un trop grand nombre d'approximations pour remporter l'adhésion.
Nicolas Bary se voudrait digne héritier de Jeunet, de Terry Gilliam et de Tim Burton. Hélas, si les références sont bien présentes, il existe un fossé entre ses enfants à lui et ceux, perdus, de la cité de Jeunet et Caro. Ici, l'univers créé par le jeune metteur en scène sonne désespérément faux. Jamais féérique, jamais poétique, plus proche d'un sous-Hook que d'autre chose, l'atmosphère de Timpelbach ne parvient jamais à envoûter. Malgré un effort notable sur les costumes et la lumière, on ne croira que trop rarement à ce monde imaginaire en carton patte dont on imagine trop souvent les limites. Un défaut qui nous rappelle un autre gros projet français de l'année dernière, Les Deux Mondes de Daniel Cohen, qui souffrait des mêmes lacunes. De plus, on regrettera que les effets spéciaux numériques soient aussi peu réussis (que ce soit du point de vue du niveau de détails ou de l'incrustation) et souvent utilisés à mauvais escient. Si 2008 n'avait pas connu Astérix aux Jeux Olympiques, on aurait pu dire qu'on tenait avec les Enfants de Timpelbach le naufrage artistique de l'année. Un comble pour un film qui se voulait la méthadone idéale pour tous les frustrés qui n'auront pas leur épisode d'Harry Potter à Noël !
Mais le gros défaut du film est de ne pas réussir à rendre intéressante une histoire au potentiel indubitablement jubilatoire. La faute revient essentiellement aux personnages, clichés dans le meilleur des cas (le personnage de Manfred, dont le look est honteusement piqué à celui d'un célèbre sorcier à lunette), insipides dans le pire, et qui viennent exaspérer la pellicule en nous offrant ce qu'il y a de plus pénible dans un film avec des enfants. Pour ceux qui ont vu ce que les réalisateurs de la série The Wire arrivaient à tirer de jeunes gens de 10 ans qui n'ont jamais joué la comédie, l'expérience sera douloureuse. Seuls le petit Barnabé (Julien Dubois) et la jeune Marianne (Adèle Exarchopoulos) arriveront à nous convaincre, tandis que le pourtant très bon Martin Jobert (Nos Jours heureux, Un Château en Espagne) est ici réduit à en faire des caisses pour jouer les méchants de service, peu aidé il est vrai par des dialogues et plus généralement un scénario sans saveur. Déjà-vu, cette histoire d'enfants livrés à eux même ne parviendra jamais à surprendre, en grande partie parce qu'elle arrive un an après Big City. Et là où le western fantaisiste avait réussi à nous toucher par un joli sous-texte plein de pertinence, le film de Bary peine à exister et tombe dans un trop grand nombre de pièges qui auraient certainement pu être évités. N'est définitivement pas Djamel Bensalah qui veut ...