Souviens-toi l’été dernier (2025) : le retour du Fisherman est-il le flop attendu ?
Le 15/07/2025 à 21:51Par Pierre Champleboux
Contre toute attente, la legacy sequel de Souviens-toi l’été dernier réussit là où ses prédécesseurs se sont plantés. Loin d’être un simple remake ou un reboot cynique, ce nouvel opus est un vrai prolongement du premier film de 1997, avec du respect, du gore, et juste ce qu’il faut de nostalgie. Bien interprété, habilement mis en scène et généreux en terme de frousse, le film de Jennifer Kaytin Robinson souffre parfois de facilités scenaristiques (notamment lors de son twist final), mais offre un retour aux sources plutôt jouissif, qui pourrait bien relancer pour de bon une franchise laissée en jachère depuis trop longtemps.
Décidément, les tueurs des 90’s ont la peau dure. Après que le Ghostface de Scream soit revenu en force en 2022, après les re-retrouvailles de Laurie Strode et Michael Myers en 2018, c’est au tour du Fisherman de Southport de ressurgir, 28 ans après sa première virée sanglante. Et contre toute attente… ça fonctionne.
On pouvait légitimement craindre le pire. Entre les suites foireuses (coucou I Still Know What You Did Last Summer et sa délocalisation aux Bahamas), le DTV embarrassant de 2006 (I’ll Always Know…, alias Souviens-toi l’été dernier 3 pour les amateurs de souffrance filmique) et la série Prime Video de 2021 vite oubliée, la franchise I Know What You Did Last Summer semblait bien partie pour finir sa course dans les bacs de DVD à 1€ de Cash Converters, Noz et Action.
Pour relancer Souviens toi… Sony a joué la carte la plus risquée, mais aussi la plus cohérente : celle de la legacy sequel. Une suite directe aux deux premiers films, avec le retour de Jennifer Love Hewitt et Freddie Prinze Jr., dans leurs rôles de 1997 et 1998. Et pas question de nous refourguer des caméos à deux balles : les survivants du massacre originel sont en effet au cœur du récit.
Un slasher qui réunit les générations MSN et TikTok
Réalisé par Jennifer Kaytin Robinson (Si tu me venges…) et écrit avec l’aide de Leah McKendrick, Souviens-toi… l’été dernier (2025) s’ouvre sur un accident tragique, rappelant celui de 1997 : un groupe de jeunes provoque accidentellement la mort d’un inconnu et décide d’enfouir le secret. Un an plus tard, une lettre tombe : “Je sais ce que vous avez fait…”. Et c’est reparti pour un tour.
Mais là où beaucoup se seraient contentés de singer le premier film plan par plan, la réalisatrice a décidé de faire rimer hommage avec mise à jour.
On retrouve la même mécanique (la culpabilité, les regrets, le tueur en ciré), mais son long-métrage ne se contente pas de réchauffer la recette : il la cuisine avec un ingrédient qui manquait cruellement aux suites précédentes… des personnages possédant des Q.I. plus élevés que celui d’une huître.
Les jeunes protagonistes de cette version 2025 sont écrits avec une certaine profondeur, sans trop de clichés, et interprétés par des comédiens à la fois doués et crédibles.
Mention spéciale à Gabbriette Bechtel, parfaite en podcasteuse grunge passionnée de true crime, et clairement le personnage le plus 90’s du film.
Le casting de ces héros next gen mélange efficacement têtes connues (Madelyn Cline, Chase Sui Wonders, Jonah Hauer-King) et nouveaux visages (l’excellent Tyriq Withers), et on est même un gros cran au-dessus de la version 1997 en terme de jeu.
Mais surtout, les vétérans de la franchise ne sont pas là pour faire de la figuration. Julie (Jennifer Love Hewitt) et Ray (Freddie Prinze Jr.) ont vieilli, ont dû apprendre à vivre avec leurs traumas, et font ici figure de vieux sages.
Le film leur accorde une vraie place sans pour autant chercher à les transformer en survivalistes zinzins façon Laurie Strode. Ce sont juste deux survivants qui tentent d’avancer, et qui vont être amenés à se replonger dans les souvenirs qu’ils tentaient d’oublier pour éviter qu’une bande de jeunes ne se fasse trucider comme l’ont été leurs potes à l’époque. Et ça fonctionne.
Cerise sur le gâteau : le scénario est suffisamment bien écrit pour que leur présence ne perturbe pas le visionnage de spectateurs qui n’auraient pas vu les deux premiers volets de la franchise.
Pour ceux qui les connaissent, le plaisir de les retrouver est là. Pour les autres, ce sont juste deux personnages qui ont un peu plus de bouteille que les protagonistes principaux de ce vrai-faux reboot.
Un crochet tranchant et bien affûté
Visuellement, le film joue la carte du slasher old school, avec une mise en scène carrée et sans esbroufe qui rappelle les meilleures péloches du genre. Pas d’images de synthèse douteuses, pas de plans expérimentaux, pas d’ironie postmoderne relou : juste un bon vieux tueur au crochet qui attaque dans l’ombre, avec une efficacité redoutable.
Le premier meurtre donne le ton : brutal, sanglant, cruel et bien crado. Le reste suit, avec une montée en tension bien dosée, un rythme sans ventre mou, et pas mal de séquences se déroulant dans des décors emblématiques du premier film qui se jouent de nos attentes pour mieux nous proposer des exécutions inédites.
Et c’est peut-être là que réside la vraie réussite de ce Souviens-toi l’été dernier 2025 : il respecte son héritage sans pour autant le laisser l’écraser sous son poids. Il n’a pas besoin de multiplier les références ou les vannes méta. Il avance, simplement, comme un slasher qui n’aurait pas honte d’en être un.
C’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleures confitures
Évidemment, tout n’est pas parfait. Le twist final, sans spoiler, est un peu décevant. Pas totalement improbable, mais suffisamment bancal pour qu’on se gratte un peu la tête en se repassant les scènes précédentes.
Comme souvent dans les slashers, on accepte l’incohérence pour le plaisir du reveal… mais quitte à faire quelque-chose de capillotracté, on en vient presque à regretter il n’ai pas été décidé de faire revenir Ben Willis d’entre les morts, comme l’avait tenté (très maladroitement) le troisième opus.
Une intervention du surnaturel aurait peut-être eu plus de sens que le dénouement qui nous est servi… mais les tueurs morts-vivants increvables ne sont plus dans l’air du temps.
Il faut néanmoins dire ce qui est : comparé aux deux précédentes suites - voire même à l’original, qui, une fois le filtre de la nostalgie mis de côté, n’était tout de même pas franchement exceptionnel - on a ici affaire à un bond qualitatif assez stupéfiant pour une saga qui était jusqu’alors hautement dispensable et anecdotique.
On se souviendra de l’été dernier
Avec ce nouveau Souviens-toi l’été dernier, Sony et Jennifer Kaytin Robinson prouvent qu’on peut exhumer une franchise morte-vivante sans la ridiculiser. Le film ne révolutionne pas le genre, mais le respecte et le dépoussière juste ce qu’il faut, et surtout : il le rend à nouveau plaisant.
Là où le film de 1997 pêchait par son manque d’originalité dans un contexte où le genre était en plein renouveau, ce quatrième volet trouve ses qualités dans ce qui constituait le principal défaut de son modèle.
Le retour du Fisherman n’a rien d’innovant… mais on assiste à une telle maîtrise de la recette de ce qui fait un bon slasher que le résultat ne peut qu’être dégusté avec nostalgie et délectation, exactement comme lorsqu’on redécouvre l’existence d’un bonbec de notre enfance qu’on croyait disparu.
C’est de loin la meilleure suite de Souviens-toi l’été dernier, et cette fois, on s’en souviendra peut-être un peu plus longtemps.