Toy Story 3
Le 14/07/2010 à 09:08Par Arnaud Mangin
L'un des films les plus attendus de l'année n'est certainement pas à la hauteur des espoirs escomptés, d'une part parce qu'il est parfois confus dans tout ce qu'il veut dévoiler et d'autre part car il s'avère assez inégal dans sa globalité. Mais Toy Story 3 reste un divertissement à part entière néanmoins efficace. Tous les ingrédients étaient là pour faire un chef d'œuvre - confronter les héros à leur funeste destin étant l'une des idées les plus géniales - et Pixar s'est malheureusement contenté de nous proposer le minimum syndical. Un film tout juste chouette à voir mais oubliable, car largement moins marquant que ses prédécesseurs.
Découvrez ci-dessous la critique de Toy Story 3
Critique Toy Story 3
Il y a autant de façons d'aborder Toy Story 3 qu'il y en avait de l'attendre ou de l'appréhender. En effet, en signant l'une des suites les plus attendues de ces dernières années, Pixar se risquait également à une forme de régression artistique/nostalgique sortant un peu de la chronologie du studio et en particulier de ses deux derniers films (Wall-E et Là-Haut). Et puis, paradoxalement, si le film demeure essentiellement une grosse œuvre familiale avec tout ce qu'il faut pour surexciter les zygomatiques, ce dernier impose une certaine évolution de caractère totalement inattendue (en particulier dans sa seconde moitié) qui n'hésite pas à jouer avec des cassures de ton et des thèmes de fonds parfois graves pour en faire une œuvre au discours étonnement plus mature que les deux opus précédents. On peut même dire que l'espace d'une ou deux séquences, le film est ouvertement sombre, justifiant son existence onze ans après le second épisode, puisque le gros du propos repose sur le temps qui passe sans être tendre sur les évènements qu'il laisse derrière lui. Onze ans plus tard, tout n'est plus forcément rose bonbon au pays des héros de plastique et le film est là pour nous le rappeler. Que les créateurs de Toy Story 3 tiennent compte de l'âge aujourd'hui de leur public premier ne peut être qu'une excellente nouvelle !
Le problème, c'est qu'en rajoutant ce nouveau trait de caractère au burlesque et à la poésie qui composaient les deux premiers, le film s'encombre de thématiques et d'autant de péripéties qui s'entassent parfois jusqu'à obstruer l'ensemble d'ingrédients souvent de trop. Explications : Toy Story 3 multilplie à outrance les personnages, les intrigues secondaires et surtout les gags, le tout ressemblant énormément à une multiple redite de l'épisode précédent. L'ourson rose ? C'est le grand père cowboy du second épisode. Le rêve du début ? C'est le même principe que dans le second aussi. Niveau gags, ceux autour de Buzz L'éclair qui pète un câble semblent n'être là que pour faire exister le personnage (complètement fadasse dans cet épisode !), mais pire, l'utilisation de Ken tout simplement insupportable, ses apparitions semblent échappées d'un Dreamworks (au secours !), là où Barbie est pourtant excellente. On en vient presque à croire que le thème sous jacent du film était si déprimant que ses créateurs se sont empressés de le fourrer comme une dinde de séquences poussives pour rééquilibrer la balance, là ou Toy Story et Toy Story 2 développaient leur humour tout naturellement. Toy Story 3 c'est exactement ça : une redite sans aucun naturel des deux précédents épisodes, qui se regarde un peu trop passivement. Un gros couac dans la carrière de Pixar. Certes le film n'est pas indigeste, loin de là, et même globalement maitrisé pour être agréable à suivre. Mais sur ce point, Là-Haut, Wall-E, Ratatouille ou Cars bénéficiaient d'une écriture autrement plus aboutie.
Comme toute œuvre inégale, si Toy Story 3 a quelques défauts de conception, il conserve dans sa besace de nombreux atouts qui lui permettent même de faire l'impasse sur le reste, puisqu'il parvient à maintenir notre attention tout du long de par son énergie. Tout va vite, très vite (enfin... sans doute trop vite) et enfile, malgré ses petits ventres mous, une myriade de séquences sympa l'empêchant de s'appesantir. Et quand bien même, si l'ensemble ne fait pas mouche, le film mérite qu'on lui accorde notre attention jusqu'à sa dernière demi-heure qui, elle, se montre autrement plus inspirée, franchement fun dans sa relecture de La Grande évasion (largement plus appréciable que dans Chicken Run) et incroyablement intense. Pour ne pas dire très triste. Difficile d'en parler sans dévoiler la teneur que cette dernière dégage, mais le film se montre suffisamment malin pour être à la fois un rêve technique et narratif à l'écran mais aussi le gros coup de massue qui s'abat sur ce même rêve, n'hésitant pas à malmener l'imaginaire protectionniste de l'enfance. Ces héros que nous aimons et qui font tout pour s'humaniser n'en restent pas moins des objets... Et un objet, ça se dégrade et ça finit là où ça se détruit. Nous n'en dirons pas plus.
Dans sa tentative de touche-à-tout émotionnel, Toy Story 3 se montre moins convaincant que les deux films qui le précèdent, perdu dans un gloubiboulga trop riche : à la fois trop adulte dans ce qu'il dévoile en sous couche (et qui est martelé là où le message passait en finesse auparavant) et trop enfantin dans ce qu'il bazarde parfois en surface (les gags notamment, beaucoup trop faciles ou référencés). Reste néanmoins le souvenir d'un divertissement qui tient malgré tout la route sur la durée, aussi peu impérissable que la triste réalité qu'il dénonce, mais souvent bien amusant. C'est en tout cas à ce jour la seule opportunité d'assister à l'improbable affrontement entre une tortilla vivante et un pigeon. Rien que pour ça, ça mérite le déplacement.
Article publié le 16 juin 2010