Vent Mauvais
Le 10/10/2007 à 14:57Par Elodie Leroy
Notre avis
Au premier abord, Vent Mauvais réunit tous les ingrédients susceptibles de faire fuir le spectateur le plus obstiné. Petit patelin paumé, climat venteux sur un bord de mer déprimant, personnages tout sauf flamboyants, banalité du quotidien d'un supermarché, tout y est. Pourtant, c'est précisément dans cette absence de touche glamour que réside l'intérêt de ce premier long métrage de Stéphane Allagnon, un film original et intriguant qui prend tour à tour des allures de polar décalé, de comédie sociale et de western des temps modernes version frenchy. Dès lors que l'on se laisse happer par l'atmosphère si particulière de Vent Mauvais, une atmosphère que l'on doit en grande partie à une gamme de couleur réduite et à la présence sonore d'un vent obsédant, il n'est guère difficile de se sentir complice de Franck, l'outsider incarné non sans une certaine décontraction par Jonathan Zaccaï.
De par son statut d'intérimaire - une situation mine de rien rarement montrée au cinéma - et son attitude détachée, Franck incarne à merveille la fuite de l'engagement qui guide les choix de vie de nombre de trentenaires d'aujourd'hui. Qu'il s'agisse de sa réponse lorsqu'il se voit proposer de l'argent en échange de son silence sur un détournement de fonds, de la tentative de Frédérique (Aure Atika, excellente) d'en picorer une partie, ou même des motivations de l'escroc, Vent Mauvais ne tire aucun jugement absolu sur les personnages et laisse le spectateur libre d'élaborer le sien. Comme tout polar qui se respecte, Vent Mauvais repose sur une énigme, celle de la disparition d'un employé du supermarché, et sur ce point, le scénario aurait gagné à développer davantage, fut-ce le temps d'une ou deux séquences, certains personnages secondaires pour faire mouche. D'autre part, les plans grisâtres sur la mer qui reviennent régulièrement se révèlent vite à double tranchant, le dépouillement du décor participant certes à créer une ambiance oppressante mais inspirant par la même occasion un sentiment de monotonie qui dessert quelque peu le film. Ce bémol mis à part, Vent Mauvais revisite de manière intéressante les genres dont il emprunte les codes et se regarde avec plaisir, ne serait-ce que pour son audace.