Fellini au travail
Le 09/10/2009 à 15:22Par Sabrina Piazzi
« Pour moi, faire un film est plus qu'une occupation. C'est une façon de me réaliser moi-même et de donner un sens à ma vie. Chaque film est un épisode de ma vie. » (Federico Fellini)
En cette fin d'année 2009, les cinéphiles auront rendez-vous avec Federico Fellini. Cela commence le 16 octobre 2009 avec la parution du catalogue de l'exposition « Fellini, la grande parade » qui se tiendra au Jeu de Paume à Paris dès le 20 octobre jusqu'au 17 janvier 2010. La Cinémathèque française prend immédiatement la suite dès le 21 octobre jusqu'au 20 décembre en proposant une rétrospective intégrale du cinéaste italien. Des rencontres et soirées seront également organisées à l'Istitut culturel italien de Paris dès le mois d'octobre et s'étaleront jusqu'au mois suivant. Partenaire de l'évènement culturel, Carlotta films sort un DVD Edition Collector (19,99 euros) ainsi qu'un coffret Prestige limité et numéroté à 2000 exemplaires (29,99 euros) comprenant l'édition double DVD de Fellini au travail, un livre exclusif de 52 pages « Fellini, c'est moi ! », 5 cartes collector et un poster inédit en couleurs. Ce trésor intitulé « Fellini au travail » sera disponible le 4 novembre 2009 et en avant-première au jeu de paume et à la Cinémathèque française.
Retrouvez également le site officiel proposant le programme de l'ensemble des manifestations sur www.tuttofellini.fr ainsi que quatre grands classiques de Federico Fellini édités pour la première fois en édition single au prix attractif de 9,99 euros : Il Bidone, Juliette des esprits, Boccace 70, Le casanova de Fellini.
Voici ce que comprend ce magnifique catalogue de films rares consacrés à l'œuvre et à la vie de Federico Fellini, une édition DVD dirigée par Sam Stourzé que l'on retrouve dès le premier module :
DVD 1
Fellini au travail par Sam Stourdzé (26min23)
Commissaire de l'exposition « Fellini, la grande parade » qui ouvrira au Jeu de Paume le 20 octobre 2009, Sam Stourdzé évoque les documentaires présents dans ce splendide coffret DVD dont le film inédit d'André Delvaux (sur le deuxième DVD), et présente longuement le personnage et l'univers (le mensonge : réalité Fellinienne, inventions biographiques) de Federico Fellini aux spectateurs avant qu'ils ne se penchent sur le long programme dirigé par Sam Stourdzé en personne. Le fantastique Livre des rêves de Fellini illustré de fantasmes et de femmes plantureuses, résultat de nombreuses psychanalyses, est rapidement abordé tout comme les influences du Maître, ce qui nourrissait sa créativité. A ce titre, Sam Stourdzé évoque de nombreuses anecdotes à l'origine de la première scène de La Dolce Vita ou celle d'Anita Ekberg pataugeant dans la fontaine de Trevi dans le même film. Notre interlocuteur parle des rapports du cinéaste italien avec la presse, de son amour pour les petites gens aux physiques originaux, et des publicités qu'il a réalisées à la fin de sa carrière et qui sont également disponibles sur ce DVD.
Bloc notes d'un cinéaste (49min15)
Ce film inédit et en couleurs a été réalisé par Federico Fellini en 1969 pour le compte de la chaîne américaine NBC et s'apparente à une sorte de « Fellini par lui-même ». Le cinéaste s'éloigne de tous genres connus et livre un document ouvertement biographique à mi-chemin entre le documentaire et l'essai. Le film s'ouvre sur les décors abandonnés d'un film qui ne s'est pas fait : Le Voyage de G.Mastorna. Bloc notes d'un cinéaste a été longtemps considéré comme perdu et présenté pour la première fois dans sa version intégrale et restauré à partir des éléments 16mm d'époque par la Cinetica di Bologna et l'Imagine Ritrovata. Sortis d'un des rêves du cinéaste, les décors sont maintenant propriété de hippies qui peuvent méditer entre un faux avion et une réplique de la cathédrale de Bologne, tout en étant entouré de hautes herbes. Rapidement, le film prend des allures de rêve éveillé, Fellini déambule de nuit dans le Colisée à la recherche de figurants (travestis, SDF) entre autre) pour un autre film en préparation. Ce film sera Satyricon. De rencontre en rencontre, le cinéaste propose de dresser un parallèle entre la Rome Antique et la Rome contemporaine, n'hésitant pas à plonger avec son équipe dans les dédales du métro romain pour y retrouver les vestiges d'un monde disparu.
Si Bloc notes d'un cinéaste est un film à part entière, il permet également de contribuer à la légende de Federico Fellini en cherchant à divulguer une partie de son processus créatif. Marcello Mastroianni et Giulietta Masina font de savoureuses apparitions pendant que le metteur en scène procède au casting de «gueules » représentatives de la Rome décadente en se rendant aux abattoirs afin d'y rencontrer les ouvriers qu'il juge adéquats pour la distribution.
Un véritable trésor exhumé dont la qualité d'image certes médiocre n'entache en rien le plaisir de cette découverte.
Le Journal secret d'Amarcord (42min34)
Jusqu'alors inédit en DVD, ce véritable making of d'Amarcord est une commande de la Rai. Réalisé en 1973 durant le tournage du film de Federico Fellini, il est indéniable que le cinéaste ait donné quelques directives aux réalisateurs de ce segment, ses assistants et responsables de la seconde équipe Liliana Betti et Maurizio Mein. Ce journal s'ouvre sur une séquence coupée au montage d'Amarcord mettant en scène un italien et un chinois, le premier demandant au second quelles sont les grandes différences physiques entre leurs deux peuples, l'italien étant persuadé que les chinois n'ont pas de nombril. Souvent hors-champ, Federico Fellini assiste ensuite à un déferlement de comédiens non professionnels venus tenter leur chance auprès du maître, misant tout sur leur physique particulier que le réalisateur affectionnait tant.
A l'instar du film de François Truffaut, La Nuit américaine, l'envers du décor nous est dévoilé grâce aux allées et venus des figurants et assistants, une effervescence magistralement rendue tout du long. Une table ronde est organisée et donne la parole à certains figurants d'Amarcord, tous parlant de leur expérience avec Federico Fellini et leur impression de tournage. Collaborateur du cinéaste sur 18 films, Nino Rota apparaît également en pleine création artistique et développe son association avec le Maître. Bien évidemment de rarissimes images du tournage complètent ce précieux documentaire qui démontre que l'élaboration d'un film de Federico Fellini était déjà une aventure avant le film proprement dit.
Fellini et la publicité (8min52)
A l'arrivée de Silvio Berlusconi dans le domaine télévisuel, Federico Fellini a souvent fait savoir tout le mal qu'il pensait du bonhomme qui préconisait des coupures publicitaires durant les films diffusés à la télévision. Pourtant, bien qu'il se soit souvent moqué des publicités dans ses films, Federico Fellini tournera quelques spots publicitaires qui seront d'ailleurs ses derniers films, marqués par le style personnel de son auteur et par la musique de Nino Rota :
Campari (1min38) : ces deux spots montrent une jeune fille qui s'ennuie dans un train et zappe le paysage à l'aide d'une télécommande. A ses côtés se trouve un homme plus âgé qui fait apparaître un serveur leur apportant une bouteille de Campari. A savourer avec modération bien évidemment !
Barilla (1min) : Dans un restaurant, un couple se voit proposer les meilleurs plats français. La femme se retourne et demande simplement des Rigattoni avec l'approbation de la Maison. La petite histoire veut que Federico Fellini choisi cette variété de pâtes qui en argot romagnol signifie une fellation. D'où le cinéaste qui s'amuse avec le slogan de Barilla « Vous vous sentirez toujours al dente ».
Banca di Roma (6min14) : Ces trois spots publicitaires sont tirés directement du Livre des rêves de Federico Fellini où le cinéaste y dessinait ses névroses, obsessions et autres angoisses. Dans ces trois petits films mettant en scène les mêmes acteurs, un homme fait trois cauchemars où il se voit en fâcheuse posture, s'adresse à son psychiatre qui lui conseille finalement d'aller souscrire une police d'assurance chez Banca di Roma pour être tout a fait rassurer et pour pouvoir dormir tranquille.
E Il Casanova di Fellini (1h12)
Pendant l'interruption du tournage de son Casanova, Federico Fellini demande à cinq comédiens de renom de lui donner leur propre interprétation du mythe mais aucun ne sera finalement retenu : Alain Cuny, Vittorio Gassman, Alberto Sordi, Marcello Mastroianni et Ugo Tognazzi. Carlotta réédite ce film-documentaire commandé par la RAI déjà présent sur le DVD et le Blu-ray du Casanova de Fellini. Présenté par la comédienne Olimpia Carlisi (Isabella dans le film de Federico Fellini), ce film propose de dresser le portrait de Casanova à travers les personnalités séductrices et disparates de ces merveilleux comédiens.
Certains historiens, écrivains, séducteurs des bacs à sable, psychiatres et auteurs, parmi lesquels Tonino Guerra, donnent leur propre interprétation du personnage, des techniques de drague et de séduction. Bourré d'humour avec la ribambelle d'intervenants, ce documentaire éclaire également fortement sur la complexité de Giacomo Casanova.
DVD 2
FELLINI (2h10)
Le réalisateur belge André Delvaux interview Federico Fellini après le succès de La Dolce Vita entre 1960 et 1962. Le cinéaste italien avait auparavant accepté cette série d'émission en suggérant que son ami et assistant français Dominique Delouche conduise l'ensemble des entretiens, tandis qu'André Delvaux s'occupe du montage. Un carton d'introduction nous indique qu'en raison de droits, les extraits des films qui illustraient anciennement les entretiens ont été substitués par des photos, réduisant la durée originale de 179 minutes à 130 minutes. Ce document nous est introduit par ces propos : « Découpé en quatre parties distinctes, l'émission raconte Fellini à travers son regard et celui de ses proches collaborateurs. De nombreux souvenirs réapparaitront mis en scène dans les films à venir, de Huit et demi (1963) à Amarcord (1973) en passant par Fellini Roma (1972). C'est la mise en évidence d'un thème cher à Fellini, celui de l'invention biographique. »
Le documentaire est ainsi divisé : Son enfance, ses débuts (34min47), Ses premiers films (30min), Ses films avec Giulietta Masina (33min18), La Dolce Vita et le néo-réalisme (31min02). Dans chacune des parties, André Delvaux interroge Federico Fellini en français et le cinéaste lui répond en italien. Ce dernier parle avec décontraction de son enfance, ses inspirations et son amour démesuré pour le cirque et Charles Chaplin qui ont marqué quelques uns de ses films. Un peu plus loin, on y évoque ses collaborations avec Roberto Rossellini sur Rome ville ouverte et Paisà. Comme il le dit lui-même, l'exercice de l'interview exercé dans un climat de confessions le met dans une position de défi face à lui-même de raconter sa véritable vie sans apparats. Quand plus tard André Delvaux lui demande s'il n'affabule pas quelque peu en racontant certaines anecdotes, Fellini se renfrogne quelque peu en répondant « Peut-être, mais de toute façon qu'importe si c'est tout à fait exact, non ? ».
A droite : Pier Paolo Pasolini
Certains intervenants tentent également de percer la carapace fellinienne en apportant leur pierre à l'édifice. La muse et femme du réalisateur Giulietta Masina mais aussi certains collaborateurs tels que Otello Martelli (chef opérateur de Fellini pour I Vitelloni, Il Bidone, La Dolce Vita, La Strada...), Alberto Sordi et Marcello Mastroianni (en français), Michelangelo Antonioni (scénariste sur Le Cheik blanc), Piero Gherardi (costumier et décorateur), Pier Paolo Pasolini (scénariste de La Dolce Vita et Les Nuits de Cabiria) et Alberto Moravia se souviennent de leur rencontre avec le Maître et partagent quelques souvenirs bien sentis, tandis que les scénaristes Tulio Pinelli (13 collaborations) et Ennio Flaiano (10 films avec le cinéaste) évoquent leur travail en commun. Cet extraordinaire entretien se clôt sur l'allusion au parfum de scandale ayant accompagné la sortie de La Dolce Vita, « un scandale de classe » pour l'écrivain Alberto Moravia qui considère le film comme étant le meilleur de son auteur. A ne louper sous aucun prétexte !
Ciao, Federico ! (59min56)
A l'instar du document précédent, ce film a été réalisé durant le tournage de Satyricon. Federico Fellini y livre en anglais quelques anecdotes liées à son univers. A signaler que les sous-titres anglais qui traduisaient les propos italiens ont été recouverts d'un cache noir permettant la surimpression des sous-titres français et prennent ainsi une bonne partie de l'image. La caméra capte de nombreux moments du tournage, donne la parole aux figurants, montre le metteur en scène piqué une petite colère envers un de ses techniciens ou ses comédiens pour s'excuser rapidement après.
Le plus étonnant provient des images prises entre deux plans où l'équipe se repose au soleil le long de la mer ou la visite de Roman Polanski et de sa compagne Sharon Tate. Enfin, quand un journaliste lui demande pourquoi il réalise des films, le cinéaste lui répond « cela me permet d'établir un lien avec le monde et c'est pour moi le seul moyen d'avoir un rapport avec les autres ». Ciao, Federico ! est le dernier joyau de ce trésor exhumé par l'éditeur et ses collaborateurs.
Suppléments (31min35)
Le 1er mai international (7min18)
Le 1er mai 1956 à Milan, un hélicoptère vient se poser afin d'amarrer une statue du Christ sur son flanc. Sous les yeux des fidèles, l'engin s'élève dans les airs et fait route vers le Vatican où l'attendent 200 000 personnes. Il est évident que Federico Fellini ait assisté à cette cérémonie et qu'il s'en soit inspiré pour la séquence d'ouverture de La Dolce Vita.
Le making of de La Dolce Vita (5min03)
Ces images muettes filmées à l'aide d'une petite caméra montrent les coulisses du chef d'oeuvre de Federico Fellini. L'ambiance paraît détendue, les comédiens se reposent, Marcello Mastroianni rit avec l'équipe et se prépare à tourner la rencontre entre Steiner et son personnage.
Essai de Walter Santesso (2min38)
Ce petit document montre l'essai devant la caméra du comédien Walter Santesso qui incarne Paparazzo dans La Dolce Vita. Hors-champ, Federico Fellini lui donne des consignes du style « peigne-toi », « lace tes chaussures », « parle ».
Fellinikon (16min36)
Comme un kaléidoscope, les images s'entrecroisent et montrent le cinéaste à l'œuvre avec ses acteurs sur le plateau de Satyricon (1969). Federico Fellini prépare ses plans avec minutie, parle avec ses assistants. Ce film est d'autant plus précieux que les documents montrant le metteur en scène au moment d'un de ses tournages sont rarissimes. On remarquera que le cinéaste dirige ses comédiens, non-professionnels pour la plupart, pendant les prises et que le texte est remplacé par des chiffres, comme le montrait encore une fois François Truffaut dans La Nuit américaine.
Le rendez-vous est donné aux cinéphiles, ne manquez pas cet évènement culturel majeur de cette fin d'année 2009 !