Attentat de Charlie Hebdo : la réaction des dessinateurs

"Aujourd'hui des fantassins de la démocratie sont tombés. Notre tristesse face à cet attentat ignoble est immense. Plus que jamais nous devons nous mobiliser pour la liberté d'expression. La démocratie est précieuse." Voilà ce que l'on peut lire depuis quelques heures sur la page Facebook du film Caricaturistes - Fantassins de la démocratie - film documentaire sorti en mai dernier au cinéma et disponible depuis quelques semaines en DVD - plus que jamais d'actualité après l'attentat dans les locaux du jounal Charlie Hebdo, causant 12 morts, dont les dessinateurs Cabu, Charb, Tignous et Wolinski.

Réalisé par Stéphanie Valloatto, Caricaturistes s'intéresse au travail de dessinateurs satiriques des quatre coins du monde qui, au risque de leurs vies, défendent la démocratie en s'amusant, avec comme seule arme, un crayon : Jeff Danziger (USA), Michel Kichka (Israël), Baha Boukhari (Palestine), Nadia Khiari (alias Willis from Tunis, Tunisie), Plantu (France), Mikhail Zlatkovsky (Russie), Rayma Supran (Vénézuela), Angel Boligan (Mexique), Damien Glez (Burkina Faso), Lassane Zohore (Côte d'Ivoire), Pi San (Chine), Menouar Merabtèn (alias Slim, Algérie), Baki Bouckhalfa (Algérie) et Kurt Westergaard (le dessinateur danois qui caricatura le prophète Mahomet avec un turban en forme de bombe). Des illustres membres d'une petite communauté qui, depuis quelques heures, réagissent aux actes barbares qui ont été commis ce matin à Paris.

Le monde des dessinateurs en deuil ...

"Je suis choqué bien sûr" a déclaré Westergaard il y a quelques heures dans le journal néerlandais Deense Ekstra Bladet. "C’est terrifiant. En ce qui me concerne, je fais toute confiance aux personnes qui assurent ma sécurité. Ma protection est excellente". "Je suis complètement effondré" avoue quant à lui Yan Lindingre, le rédacteur en chef de Fluide Glacial, contacté par La Provence. "Dans quel monde vit-on, où l'on peut tuer pour une opinion ou un dessin ? (...) Avec Charlie, on a bien sûr des divergences de points de vue, mais nous sommes des maisons cousines. Certains dessinateurs travaillent dans nos deux journaux : Charb, Luz.... Cela me fait les mêmes effets que les attentats de la RATP". En Belgique, le dessinateur Marec, qui travaille pour le quotidien Het Nieuwsblad, s’est déclaré "choqué" avant d'ajouter : "il faut que tous les dessinateurs se rassemblent derrière la liberté d’expression". Dessinateur attitré de La Liberté (quotidien suisse), Alex semblait également très touché : "Même si la perte de Wolinski, Cabu, Charb et Tignous est indescriptible pour la confrérie des dessinateurs de presse, cela va au-delà. C'est un drame qui touche aussi les journalistes, les lecteurs et les quidams. Je n'arrive pas à y croire. C'est irréel, mais ça a bien eu lieu. C'étaient des dessinateurs que je suivais, car quand on fait partie de cette confrérie, on se lit, on ne fait pas son boulot seul dans son coin. Tout est source d'inspiration, les dessins, la bande dessinée, les livres, les films..."

Le dessin de Zep après la tuerie de Charlie Hebdo

Plusieurs dessinateurs ont quant à eux choisi de faire passer leurs messages avec un crayon. C'est le cas de Plantu (via Twitter), mais également de Zep (via Le Monde), de Boulet (via Facebook), de Joann Sfar (via Instagram), de Ygrek (dessinateur canadien), de Joep Bertrams (caricaturiste hollandais), de Mutio (qui travaille pour Urtikan.net), de Luis Quiles (dessinateur espagnol qui dénonce des sujets sensibles de notre société), de David Pope (satiriste australien qui travaille pour le Canberra Times), Gianluca Costantini (italien, oeuvrant pour Political Comics) ou encore de Bernardo Ehrlich, un argentin qui collabore à El Pais, qui a réalisé un dessin accompagné d'une phrase simple et efficace : "Le monde est devenu si sérieux qu’humoriste s’est transformé en profession risquée".