De passage à Saint Malo pour participer au festival de BD "Quai des bulles", le réalisateur Jean-Pierre Jeunet (Amélie Poulain, L'extravagant voyage du jeune et prodigieux TS Spivet) a accordé une interview au site Worldzine dans laquelle il a, une fois encore, abordé sa relation compliquée avec le cinéma français. "Je préfère les films de Terry Gilliam, de Fellini, de Tim Burton, de Kurosawa, qui avaient un vrai sens de l’esthétisme, plutôt que le cinéma réaliste français de Kéchiche ou de ce jeune canadien dont on parle beaucoup (Xavier Dolan, NDLR). C’est un cinéma que je ne méprise pas, mais il ne m’intéresse pas en tant que créateur. Je n’ai pas envie de faire ça, j’ai envie de transformer la réalité. En France, c’est souvent mal vu, sans doute l’héritage de la Nouvelle Vague, dont on parle encore aujourd’hui, alors que c’était quand même en 1959… Ainsi, quand c’est esthétique, souvent on a tendance à nous taper dessus. Pourtant quand c’est étranger, comme les films de Wes Anderson, alors là il n’y a pas de problème ! On adore, alors que c’est toujours le même travelling depuis cinq films, mais ce n’est pas grave, lui on accepte. Tim Burton aussi, on est amis, je ne lui en veux pas, mais étrangement, quand on est français on se fait taper dessus".

S'il ne trouve pas toujours son bonheur dans les salles obscures, Jean-Pierre Jeunet avoue en revanche être fan de certains créateurs de vidéo du net, les Youtubeurs Cyprien et Norman par exemple. Il explique : "quand je vais au cinéma, je veux voir des choses vraiment différentes et malheureusement je suis souvent déçu. À la limite, l’originalité, on la trouve sur internet aujourd’hui : les Cyprien, Norman, la série Bref aussi. C’est un peu proche de Foutaises, un de mes premiers courts-métrages (à voir ici)" Serait-il partant pour participer à l'une de leur vidéo ? Autre coup de coeur du cinéaste : le film Whiplash de Damien Chazelle, qui sortira sur nos écrans le 24 décembre prochain. "J’étais juré à Deauville et on lui a donné le grand prix, il a également eu le prix du public et là ça m’a secoué, je n’avais pas vu ça depuis dix ans !" explique-t-il. "C’est du Scorcese, c’est un garçon de 29 ans qui l’a fait, en quatre semaines, avec 3 millions de dollars. Quand je vois ça, je suis rassuré : c’est encore possible ! J’aimerais voir plus de choses qui me bouleversent". On rappelle que le prochain projet de Jean-Pierre Jeunet ne sera pas un long métrage de cinéma, mais une série télé inspirée du roman Le Fantôme de l'Opéra.