Ready Player One : "Steven Spielberg m'a dédicacé ma Delorean" Ernest Cline interview
Le 29/03/2018 à 16:55Par Olivier Portnoi
Fan absolu de Steven Spielberg, il s'inspire de ses films et des productions Amblin pour écrire Ready Player One publié en 2011. Sept ans plus tard, son histoire de réalité virtuelle en 2045 est adaptée par Steven Spielberg lui-même qui s'offre ainsi un éblouissant retour au film d'aventure fantastique.
On a eu l'occasion de discuter quelques minutes avec Ernest Cline à l'occasion de la la sortie de ce blockbuster qui fera date.
Si vous ne ne deviez garder qu’un film de Steven Spielberg...
Ernest Cline : Pour être honnête, Ready Player One. En ce qui concerne le reste de ses films, c’est vraiment difficile, mais je dirais E.T. J’avais 10 ans quand il est sorti. J’avais le même âge qu’Eliott dans le film. Rencontre du Troisième Type que j'avais vu à la télé m’avait déjà profondément marqué et intéressé à la vie extra-terrestre. C’est le film qui a amorcé mon amour de la SF avec Star Wars. Mais quand j’ai découvert E.T c’était comme si Spielberg avait fait ce film rien que pour moi. Tous mes fantasmes d’enfant se retrouvaient sur l’écran. Il y a un passage dans Ready Player One qui fait écho à E.T. Wade (le héros incarné par Tye Sheridan) est dans sa chambre qui est la buanderie de son mobile home et il regarde par la fenêtre, rêvant d'une vie meilleure. Il y a un moment similaire dans E.T quand Elliot regarde par la fenêtre de la cuisine et rêve aussi d'une vie meilleure loin de son foyer brisé. C’est un de mes passages préférés du film.
Avez-vous parlé du jeu E.T produit par Atari avec Spielberg ?
Non, on n’a jamais évoqué ce sujet. Zak (Penn, le co-scénariste) et moi en avons beaucoup parlé entre nous. On a même réalisé un documentaire ensemble dessus (Atari Game Over). Je crois que Zak l’a mentionné à Steven. Mais E.T est une telle expérience que je ne voyais pas l'intérêt de lui parler de 'ce petit truc'. (Après l'échec commercial phénoménal de ce jeu à sa sortie en 1983, Atari a enterré secrètement plus de 700 000 exemplaires dans le sol du Nouveau-Mexique. Le documentaire Atari Game Over filme les fouilles qui ont été lancées pour les retrouver - ndr). Je fais parti de ces rares personnes qui ont acheté le jeu dans les années 80 et qui l’ont adoré. Ceux qui prétendent qu’il s’agit du pire jeu de l’histoire sont des idiots (rires). C’est un chouette jeu.
En tant que fan, comment s’est passée votre première rencontre avec Steven Spielberg ?
J’ai essayé de ne pas être trop fanboy face à lui. Je pense que j’ai été comme tous ceux qui le rencontrent pour la première fois, à savoir nerveux. J’ai surréfléchi à la façon dont je devais m’habiller, je suis allé chez le coiffeur, c’était un des plus beaux jours de ma vie ! J'avais rendez-vous dans les les bureaux d’Amblin, cet endroit qui je rêvais de visiter depuis que je suis enfant. Quand tu rentres dans l'enceinte d'Amblin, tu passes à côté du puits contre lequel Marty McFly est adossé avec son frère et sa soeur dans la photo qui s’efface dans le premier Retour Vers le Futur. Découvrir que l’un des films les plus importants de mon enfance s’était tourné ici était déjà dingue. Puis tu passes à côté d’une maquette de velociraptor que Stan Winston a fabriqué pour Jurassic Park. Je me suis assis à son bureau attendant qu’il arrive et j’ai remarqué qu’il y avait le rosebud de Citizen Kane au plafond. J’avais vraiment l’impression d’être Charlie Bucket de Charlie et la Chocolaterie qui a gagné le ticket d’or et se retrouve face à Willy Wonka. Amblin est ma chocolaterie. Mais Spielberg est habitué à ce que ceux qui le rencontrent pour la première fois soient si nerveux. Il n’attend pas pour te mettre à l’aise et te faire comprendre qu’il n’est qu’une personne comme une autre. On s’est retrouvés autour de notre amour commun pour le cinéma. J’ai l’habitude d’être le plus grand film geek partout où je vais. Là j’ai trouvé mon maître (rires).
Vous lui avez fait dédicacer votre Delorean il me semble ?
Oui ! Quand on a commencé à parler de notre vision du film et de l'utilisation de la Delorean, j’ai sorti le couvercle de la boîte à gants de ma Delorean que j’avais pris avec moi. Je lui ai expliqué que c’était un morceau de ma voiture et je lui ai demandé s’il pouvait me la dédicacer. Il m’a dit "bien sûr" et a écrit "Cher Ernie, là où nous allons, nous n’avons pas besoin de route". Je lui alors demandais s’il avait déjà dédicacé une Delorean et il m’a répondu non. J’ai été le premier !
(Ernest Cline et sa Delorean)
James Halliday, le créateur de l’Oasis, est-il Steven Spielberg ? Dans l’histoire, Halliday doit faire face à son héritage tout comme Spielberg l'a fait en acceptant de réaliser ce film.
Pour moi, oui. Les gens pensent parfois que je suis Halliday mais je me retrouve plus dans Parzival, le super fanboy. J’ai eu plusieurs Halliday en grandissant, des héros dont j’ai étudié et disséqué le travail. George Lucas par exemple (Ernest Cline a écrit le scénario du film Fanboys où des copains tentent de dérober les bandes de la Menace fantôme au Skywalker Ranch pour que leur meilleur ami malade puisse le voir avant de mourir -ndr), Steven Spielberg, James Cameron. Mais l’impact de Steven a été plus le plus important. Ses films m’ont donné envie d’écrire et de raconter des histoires. J’ai toujours rêvé de pouvoir faire un film avec lui. Jamais je n’aurais pu imaginer que cela arriverait. Je n’en reviens toujours pas.
Que pourrait-il se passer dans une suite de Ready Player One?
Tout peut arriver. Je suis en train de l'écrire.C’est encore trop frais pour en parler. Je n’en suis qu’aux prémices. Mais ce film pose idéalement les bases de Ready Player One et ouvre à la suite que j’ai en tête. Spielberg a choisi une fin ouverte qui permet de développer cet univers. Les fans du livre me demandent souvent qu’est ce qu’il se passe ensuite. Et ceci depuis sa sortie en 2011. J’y réfléchis depuis longtemps. On en a longuement parlé avec Steven.
Est-il vrai que Steven Spielberg a demandé conseil à James Cameron pour des questions techniques ?
Pour ce film, je ne sais pas. Mais je sais que Steven a discuté avec James Cameron de motion capture et a étudié ce qu’il a fait pour les films Avatar. Il s'est mis comme défi de capturer les émotions des acteurs avec la motion capture. Il me semble que ces conversations ont eu lieu avant le Bon Gros Géant. Depuis Avatar, je ne pense pas qu’il y ait eu un film aussi réussi en 3D que Ready Player One. D’habitude je n’aime pas la 3D. C'est très souvent qu'un argument commercial imposé aux réalisateurs. Mais la manière dont Steven l’a utilisé, notamment pour les séquences dans l’Oasis, aide à différencer encore plus facilement le monde réel et le monde virtuel. C’est une synergie parfaite. Steven parle à tout le monde et se renseigne sur les projets des autres notamment ceux de Cameron ou Peter Jackson. Il ne cesse d’apprendre. Ce n’est pas quelqu’un qui va se dire, je sais tout ce qu’il faut savoir sur le cinéma. Il évolue avec son époque.
George Lucas est-il venu sur le tournage ?
Oui. J'ai pu rencontrer un autre de mes héros ! Il est venu et a notamment débattu sur les questions techniques. Les voir discuter ensemble était dingue. On avait l'impression de voir deux copains de longue date en train de se chamailler.
Quand Olivia Cooke et Tye Sheridan, les deux stars de Ready Player One, reprennent Jurassic Park !