La copie de French Connection en Blu-Ray est typiquement le genre d'élément qui creuse le fossé tant redouté entre restauration abusive et restitution fidèle. Alors que l'on aurait pu craindre un nettoyage extrême dépassant la démarche documentarisée choisie par son metteur en scène (ce n'est pas l'ancêtre de The Shield pour rien), le film est fidèle à l'aspect qu'il arborait à sa première sortie : rêche, granuleuse et un peu délavée ! Un peu déconcertant maintenant que l'on s'est habitué aux images les plus lisses possibles mais artistiquement emprunt d'un véritable potentiel d'immersion pour le spectateur. D'autant plus que, Haute définition oblige, la compression permet une restitution qui ne transpire pas l'empaquetage abusif (le DVD était très bon, mais trahissait certains pâtés) et offre une véritable distinction des éléments ainsi qu'une vraie finesse, quelque soit le caractère de l'image voulu par le réalisateur. A ce propos, cette présente copie a été spécialement réétalonnée pour l'occasion (voir la section des bonus) et cherchant à lui offrir un aspect de vieux film en noir et blanc recolonisé chimiquement. Un parti pris qui fait son petit effet.
Qu'il s'agisse de le visionner sur un grand écran plasma, ou mieux, lors de sa récente et exceptionnelle projection à La Pagode (en présence de Friedkin lui-même), French Connection retrouve une fraîcheur particulière et utilise les atouts de la haute définition, non pas comme un compromis trop soigné, mais pour imposer visuellement un véritable caractère de cinéma. Ca va vous plaire.
Retrouvez ci-dessous une série de captures d'écran, à visionner en haute définition d'un simple clic :
On vous en avait longuement parlé dans notre précédente preview, l'interactivité Blu-Ray de French Connection dépasse les espérances et surtout les limites d'un précédant DVD collector déjà de grande facture.
Blu-Ray 1
Les festivités sont ouvertes par une introduction du réalisateur en personne (1min15) nous expliquant que la copie présentée ici est à ce jour la meilleure possible. Une petite mise en bouche pas si inutile que ça puisqu'elle permet de rapidement comprendre à quel point ce dernier s'est totalement impliqué dans cette édition, avec la promesse de ré-intervenir régulièrement après le film. On retrouve d'une part les deux pistes de Commentaires audio déjà proposées sur la précédente édition, donnant respectivement la parole au réalisateur, seul, et aux deux comédiens principaux. Chose que notre ami Kevin Prin n'avait pas manqué d'apprécier dans ses premières observations : Celui de Friedkin, pertinent dans la mesure où le réalisateur nous donne quelques informations intéressantes sur le film et l'histoire vraie dont il s'inspire. Particulièrement soporifique dans la mesure où il passe les trois quart du temps (si ce n'est plus) à simplement nous décrire ce qui se passe à l'écran. Si vous n'écoutez qu'un seul des commentaires audio, choisissez celui de Gene Hackman et Roy Scheider. Les deux acteurs (surtout Gene Hackman) n'ont pas la langue dans leur poche et enchaînent anecdotes sur anecdotes sur le tournage du film, évoquant tout ceux qui y ont participé, comment le projet s'est construit, etc...
Au rang des nouveautés, deux petites choses demeurent consultables lors de la lecture du film (et cumulable, si l'on veut faire d'une pierre deux coups. La bande originale du film isolée, d'une part, permettant également de caser, lors de séquences parfois trop silencieuse, quelques partitions inédites, ainsi qu'un traditionnel bandeau informatif baptisé Piste Suppléments, dévoile quelques révélations de plus sur de nombreux éléments apparaissant à l'image. Sur les comédiens, les décors, l'histoire, etc. Non seulement on appréciera l'initiative de le proposer en français, mais également que le bandeau change régulièrement d'illustration (quelques dérivés de l'affiche) empêchant ainsi un marquage sur les écrans plasma parfois sensibles avec les images fixes.
Blu-Ray 2
Passons désormais aux choses sérieuses puisque le second disque, non content de proposer les documentaires et scènes coupées de la précédente édition, s'offre le luxe de tout nouveaux bonus conçu spécialement pour cette édition, avec la participation active du réalisateur.
Hackman parle de Doyle (10min47) est un titre qui s'impose de lui-même. Le comédien revient brièvement sur différents aspects du film, sur la nature complexe du personnage et la dureté de celui-ci (il avait beaucoup de mal à prononcer le mot ''nègre''). Néanmoins, l'homme est assez décontracté, souriant, et évoque le film comme un excellent souvenir, amusant et emprunt de liberté par un réalisateur qui savait exactement ce qu'il voulait. Le véritable French Connection par Friedkin et Grosso (19min10) fait ainsi revenir le réalisateur en tant que guide de cette interactivité et nous entrainant dans l'ancien bureau des véritables enquêteurs ayant démantelé la French Connection. Il y retrouve Sonny Grosso, seul survivant des deux et dressent ensemble un comparatif intéressant de l'enquête et celle relatée dans le film. On ne sera pas surpris d'apprendre que beaucoup de similitudes sont encore à noter entre les deux, appuyé par de nombreux extraits. Ce qui est également chouette, c'est que les retrouvailles sont particulièrement joviales et que les deux hommes (deux vrais amis, même) échangent des anecdotes assez amusantes avec un vrai plaisir communicatif. Vingt minutes qui valent sans problème un bon commentaire audio.
On poursuit avec La scène du crime (5min12). Un module relativement court, mais qui permet à William Friedkin de trouver un inspecteur de New York ayant eu une véritable importance pour le film puisqu'il a doublement participé à sa conception. Il y obtient un petit rôle, mais il a surtout permis de bloquer le Pont de Brooklyn lors d'une scène de filature. Le réalisateur nous explique par ailleurs que le héros de Cruising est inspiré par l'homme en question. Ensembles, ils se remémorent également quelques souvenirs de leur collaboration. Module que l'on ne s'attendait pas à trouver ici, L'étalonnage des couleurs (13min13) est un brin plus technique que le reste des suppléments mais permet de découvrir de manière fascinante la façon dont William Friedkin s'est personnellement impliqué dans le réétalonnage numérique de cette version Blu-Ray, pour laquelle il souhaitait des couleurs moins pimpante. Sans trop entrer dans les détails, le master utilisé pour l'occasion a été traité comme un noir et blanc, combiné avec une version très saturée. De quoi soutenir l'aspect dramatique du film que le réalisateur a toujours souhaité.
Les festivités continuent avec Anatomie d'une poursuite (20min18) qui pousse à nouveau le réalisateur sur les lieux du tournage de la spectaculaire poursuite sous le métro aérien. Comme un gosse, Friedkin retrace étape par étape le parcours de ses personnages expliquant, et aidé par son producteur, comment ont été élaborés certains plans complexes. Une vraie petite leçon de cinéma et une amusante façon de conclure sa collaboration personnelle à cette édition Blu-Ray. Il laisse ainsi la parole à un historien musical dans Le Flic Jazz (10min02) qui y analyse le travail de Don Ellis ainsi qu'un historien du cinéma dans Le Flic Escroc : La connexion noire (13min48) développement la résurgence du polar dans le cinéma américain des années 70 grâce à French Connection.
Les autres bonus, deux longs documentaires et une série de scènes coupées, sont ceux déjà proposés sur la précédente édition DVD collector. Petite analyse de l'ami Kevin Prin :
Riche en informations, Documentaire BBC : La danse de Poughkeepsie (55mn 36) s'articule autour d'un montage d'interventions du réalisateur, acteurs, producteurs, un des vrais détectives de l'affaire, directeur de la photo, etc... De la genèse à la sortie du film vous saurez (presque) tout : dialogues, histoire, personnages, acteurs, ... On regrette juste que ce type de reportage demeure trop dépendant du montage utilisé qui s'avère ici haché. Toutes les cinq secondes c'est un autre intervenant (interviewé par la suite à d'autres moments) qui continue le propos du précédent. Oui, cela reste intéressant, mais dans la forme ils auraient pu réduire la multiplication des intervenants pour leur laisser plus de temps de parole, afin qu'une réelle émotion puisse naître. Un documentaire commercial ? Ca n'en a pas l'apparence mais en reniflant bien ça en a l'odeur ! Alors que Les coulisses : Anecdotes inconnues sur French Connection (56min31) peut paraître de prime abord plus commercial que le premier documentaire, il s'avère en fait plus honnête et plus humain. Sonny Grasso (le policier impliqué dans la réelle affaire, et producteur du film) nous guide ici à travers toutes les étapes de l'enquête telle qu'elle a eu lieu, et de son adaptation au cinéma sous la forme que nous connaissons. Le bonhomme prend réellement du plaisir à nous communiquer tout son savoir, et ça se sent. Un vrai plaisir !
Enfin, 7 scènes coupées sont visibles chacune individuellement dans une section qui leur est réservée, mais aussi dans ce documentaire (17min16) où William Friedkin les commente une à une, nous révélant les tenants et les aboutissants de la suppression de chacune d'entre elles. Il nous apprend d'ailleurs qu'il y avait originalement neuf scènes non retenues, on suppose que les deux non présentées sur ce disque sont définitivement perdues, c'est d'autant plus regrettable que Friedkin n'évoque pas du tout leur contenu.