Vous souvenez-vous de la précédente édition DVD, particulièrement médiocre à tous les niveaux et déjà proposé par Warner ? Bien sûr que oui, vous vous en souvenez, peut-être même que vous l'avez achetée, ou bien parce que vous aviez consulté notre test préventif. Un disque qui avait eu la fâcheuse idée d'encoder n'importe comment l'image ô combien complexe de David Fincher. Un film au master original numérique HD mais dont la qualité du transfert n'avait pas du tout été respecté puisque issu d'une copie 35 mm repensé pour l'exploitation en salles. Vous retrouverez plus de détail sur cette affaire en cliquant ici. D'ailleurs ce n'est plus la peine de s'attarder inutilement sur ce mauvais souvenir puisque, entre cette dernière édition et le Blu-Ray qui nous intéresse ici, c'est vraiment le jour et la nuit.
Par ailleurs, et c'est essentiel, David Fincher a lui-même supervisé le transfert de ce director's cut alors qu'il ne s'était pas occupé du précédent. Et puisque l'on parle de jour et de nuit, la démonstration se montre particulièrement éloquente. L'encodage VC-1 produit ce qu'on peu appeler un miracle et la perspective obtenue par le tournage numérique livre une finesse creusant un énorme fossé avec le disque précédent. C'est donc fin... très fin et l'on décèle bien mieux les volontés artistiques du réalisateur dont chaque cadre délivre une foultitude d'informations, dans les plans larges (paysages et survols de San Francisco, réels ou numériques) comme ceux très rapprochés (les mains tenant les lettres par exemple) et dans les scènes claires comme dans les situations plus sombres et/ou nocturnes bénéficiant d'effets visuels parfois totalement invisibles. Un joli jeu de contrastes en tout cas, qui joue avec la nuit, quelques teintes jaunâtres pour situer l'intrigue historiquement et des éclairages brumeux qui se marient merveilleusement. Le résultat est certes encore un chouia perfectible (le HD DVD américain l'emporte sensiblement en proposant moins de langues et les bonus sur un autre disque) mais on peut enfin découvrir le film en zone B (ou 2 pour un DVD standard) dans des conditions dignes de l'œuvre.
Capture Blu-Ray
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Petite déception en ce qui concerne le son. Certes, le mixage n'est en rien honteux et la souplesse d'encodage du Blu-Ray laisse plus de place que sur le DVD standard (un débit deux fois plus gonflé), mais une fois de plus, Warner se contente du strict minimum. A savoir du bon Dolby Digital 5.1 des familles, ni plus, ni moins. Autant dire qu'un Dolby Digital True HD ou même un Dolby Digital Plus n'aurait pas été un luxe...Ce qui est dommage puisqu'en poussant légèrement le volume, on constate à quel point le travail effectué sur le film de David Fincher à bénéficié d'un soin tout particulier. On apprécie bien évidemment l'environnement surrounds, aussi généreux que judicieux dans la restitution des ambiances (les extérieurs en pleine nature frôlent le réalisme), mais surtout l'ouverture frontale qui remporte la donne. Pour les mêmes raisons, pour un sage enveloppement (voir la scène de meurtre au bord du lac), mais surtout pour l'appui à construction musicale du film qui fait des merveilles via une balance stéréo harmonieuse ainsi qu'un accompagnement des basses particulièrement solide.
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En matière de suppléments, là encore vis-à-vis de la précédente édition, le troc est des plus louables puisque, contre un malheureux making promotionnel de 25 minutes, on se retrouve ici, sur le même disque, avec deux commentaires audio et près de 4 heures de documentaires bien chargés et proposés en haute définition. Une habitude de l'éditeur quand on connaît les éditions offertes à ses films précédents, mais qui surprend toujours aussi agréablement. Ceci dit, la déception est tout de même un peu de mise dans le cas qui nous intéresse puisque malgré ses gigas de place, ce Blu-Ray signé Warner ne propose toujours pas de sous-titres sur ses pourtant très éducatifs Commentaires audio. Le premier donne légitimement la parole un David Fincher que les 3 heures de temps ne suffisent pas à épuiser, pour faire de ce commentaire un vivier d'informations qu'on jurerait plus complet que le film lui-même. Le type est bavard et comme on s'y attend, rentre dans les détails avec l'académique précision qu'on lui connaît. Au point que l'ensemble finit par en devenir presque déroutant, parce qu'il est finalement impossible de tout retenir. Fincher nous raconte sa propre enfance à San Francisco durant les faits, la façon dont il a lui-même enquêté pour rendre son récit le plus fidèle possible mais aussi et surtout sa mise en scène millimétrique. Mais les autres bonus seront encore plus parlants... L'autre piste est en fait un montage de deux enregistrements séparés. D'une part, nous avons Jake Gyllenhaal et Robert Downey Jr qui livrent la traditionnelle prestation légère que l'on peut attendre d'acteurs mais entrecoupée par les scénaristes et le romancier James Ellroy. Tout ceci est complet, très documenté, mais il est très difficile d'accrocher sur la longueur (2h42, tout de même) et surtout de découvrir des choses fraîches après le passage de Fincher. D'autant plus que les sous-titres sont inexistants et que les deux documentaires pédagogiques (sous-titrés, eux) abordent les mêmes thèmes.
Avant de se pencher sur Zodiac, le tueur, les autres bonus plongent donc dans les entrailles du film lui-même. Et c'est même encore plus insidieusement que Zodiac Déchiffré (54min16) s'impose non seulement comme un excellent making of, mais surtout un making of utile et très orienté sur la psychologie maniaque du cinéaste. En nous dévoilant ainsi quelques scènes volées ça et là, il nous fait ainsi découvrir quelqu'un d'on ne peut plus à cheval sur la construction technique de son œuvre, là où beaucoup témoignent que seul le propos leur semblait compliqué avant de "subir" l'expérience Fincher. On y évoque même le fait qu'en faisant son film, le réalisateur enquêtait un peu indirectement pour découvrir l'insondable vérité... Subir est peut-être un grand mot puisque avec tout le sérieux de l'entreprise, une humeur légère empêchait tout ce beau monde de s'envoyer la tête dans le mur. Costumier, scénariste et autres techniciens sont les témoins privilégiés et étrangement triés sur le volet (ils interviennent plus que les stars) du portrait d'un homme méticuleux pour qui jeter un cahier sur le siège d'une voiture peu nécessiter un nombre incalculable de prises. Sans doute un brin trop court pour une entreprise de cette taille, mais c'est fascinant.
Et puisque l'on parle d'une certaine maniaquerie et de ce besoin presque maladif de soigner chaque détail au centimètre près, le segment attribué à la conception des Effets visuels (15min20) révèle un travail absolument incroyable. Certaines petites vidéos sur Youtube ont révélé entre-temps certains trucages du film, mais les révélations mises à plat ici et commentées par le responsable de cet incroyable travail laissent tout simplement bouche bée. Si certains plans du film trahissent ça et la quelques trucages un peu voyants, d'autres s'avèrent tout simplement invisibles. A voir pour le croire, dans ce module fascinant et judicieusement proposé en Haute Définition pour bien distinguer les nuances. On y découvrira par ailleurs que si le sang du film a entièrement été réintégré en post-production, c'est justement parce qu'il serait plus long de refaire des dizaines de prises en nettoyant les comédiens. Et pour rester dans le domaine de l'imagerie numérique, l'interactivité accompagne ce segment d'un comparatif entre les trois scènes de meurtres principales et les prévisualisations 3D (6min37 en tout), où l'on découvre que là encore, tout était déjà calculé de façon millimétrique et longtemps à l'avance. Y compris dans la gestuelle, les tenues et le physique des personnages.
L'interactivité change ensuite d'axe et il est important de noter que l'éditeur (Paramount, à l'origine) a bien pris soin de faire une distinction entre les choses. La partie "Le film" parlait donc naturellement du film et "Les faits" jouent clairement cartes sur table sur les événements provoqués par Zodiac, tels qu'ils ont été vécus par de nombreux intervenants. Là encore, David Prior propose un double documentaire, légitimement scindé en deux parties pour ne pas faire d'amalgame juridique sur les choses telles qu'elles sont arrivés. Le film de Fincher est incroyablement documenté et raconte les faits, mais peut parfois orienter l'opinion des spectateurs en croisant des témoignages aussi sérieux pour les uns que fantaisistes pour les autres. This is Zodiac Speaking (1h42) et Le principal Suspect : Arthur Leigh Allen (42min37) abordent donc la même thématique dans le propos mais discernent bien les actes officiellement revendiquée par Zodiac dans le premier, et les théories plus incertaines dans le second et ce, bien évidemment sans dénigrer le film.
Mais si ces deux bonus constituent une véritable pièce de choix dans cette interactivité, c'est parce qu'il ne s'agit pas d'une reconstitution historique de ce gigantesque fait divers, comme on pourrait le voir dans une enquête télévisée, mais plutôt d'une série de témoignages assez intimiste des protagonistes encore vivants aujourd'hui. Pas de parti pris, pas d'orientation, juste des gens qui évoquent leurs souvenirs, cadrés en plans serrés, devant un fond blanc. Ce sont ainsi les quatre attaques revendiquées par le tueur qui sont longuement évoquées, petit à petit, et dans le moindre détail. On sort ainsi du cadre policier de l'affaire pour se pencher sur quelque chose de nettement plus humain, personnel et qui brasse malgré tout une certaine diversité sociale. On passe ainsi de Michael Mageau (le jeune homme au début du film), vraisemblablement atteint psychologiquement par le drame auquel il a survécu et qui s'emmêle lui-même un peu les pinceaux dans ce qu'il évoque, là où le sociologue agressé au bord du lac analysera le meurtrier d'une autre façon. Beaucoup d'avis divergent, et se contredisent, même. Mais aucun n'est muselé. Le plus étonnant résidera finalement dans l'un des témoignages du second segment, s'intéressant donc au suspect principal, et dont l'un des meilleurs amis livre tant de contradictions dans ce qu'il dit qu'on a parfois l'impression que c'est lui, le véritable assassin. Ses propos ont effectivement de quoi inquiéter.
En gros, un documentaire global avoisinant les 2h30 et qui se montre bien plus enrichissant qu'un traditionnel document pédagogique formaté et qui complète d'une façon nécessaire l'œuvre de Fincher. Pour conclure, la bande annonce originale est proposée, en définition standard et sans sous-titres.