On ne va pas vous faire l'affront d'expliquer que les artefacts de pellicule présents durant une bonne partie de Boulevard de la mort répondent à une certaine charte graphique volontaire. Il est en revanche vraiment intéressant de constater à quel point TF1 vidéo a parfaitement su s'adapter aux divers changements de tons visuels au fur et à mesure que le film évolue, et de composer un transfert dont la compression prend systématiquement compte de changements d'atmosphère radicaux. C'était déjà le cas sur Kill Bill, on s'en souvient.
Dans un cas comme dans l'autre, on redécouvre un travail de photographie qui, outre les défauts rajoutés en post-production, joue savamment avec les couleurs mais également des conditions d'éclairage et/ou de teintes nocturnes du plus bel effet. Chose qui n'aiderait pas nécessairement un encodage numérique, mais pourtant pratiquement vierge de vrais défauts. Pas un pixel disgracieux ne vient handicaper le spectacle. Et encore moins dans la seconde partie, esthétiquement plus moderne, jouant aussi avec quelques teintes criardes d'une façon différente (une voiture jaune, des fringues roses) et dont la vivacité des vingt dernières minutes pourrait aussi prétendre à un bug quelconque. Il n'en n'est rien et redécouvrir le film chez soi est un panard de tous les instants.
Panard véhiculé de plus belle par la bande son, sur tous les plans. En effet on pourrait d'abord décoler du sol pour violemment percuter le plafond en découvrant avec effroi que, pour des raisons inexcusables, l'éditeur a préféré octroyer la piste DTS au médiocre doublage français. Et puis, il suffit d'écouter pour finalement constater que les amateurs de version originale n'y perdront pas tellement au change puisque le DTS en question n'est là que comme un vulgaire gadget. Non content de ne rien offrir de plus que quelques décibels supplémentaires (si l'on veut la même chose sur les autres pistes, il suffit de monter un peu le volume de l'ampli ou du caisson), on est ici carrément perdant vis-à-vis du mixage attribué à la version originale Dolby Digital 5.1. Rien n'est là pour plaire, au final : la spatialisation frontale est beaucoup plus restreinte, quelques effets nuancés disparaissent et le relief général perdra tout simplement de profondeur pour noyer l'ensemble sous les voix françaises.
Rien de choquant en soi puisque c'est le lot quotidien de la plupart des films doublés, et l'on retrouvera quelque chose de similaire sur la même version française en Dolby Digital 5.1. En bref, ça ne sert à rien de balancer du DTS à tort et à travers lorsque seule la VO DD mérite le déplacement. Le choix est donc immédiat et l'on profite donc de jolies nuances de mixage qui gagnent en spatialisation au fur et à mesure que le film évolue sous son aspect formel. Les séquences Old School n'abusent jamais des surrounds (si ce n'est pour véhiculer à quelques occasions de rigolos effets de projecteurs ou de craquements lorsque l'image saute) et préfèrent mettre en avant les nombreuses chansons de la bande originale. Et comme naturellement, plus le film avance, plus il se soigne techniquement, la poursuite des 20 dernières minutes s'impose comme une brillante démonstration. Tout est bon à prendre : la musique, les effets hors cadres (voitures, mais aussi quelques vaches) et surtout de joyeux vrombissements de moteurs soutenus par un caisson vraiment pas avare.
Le DVD collector propose quelques bonus, parfois sympa dans le ton qu'ils abordent, mais encore un peu trop commerciaux pour totalement convaincre. Le discours vendeur du cinéaste passe ainsi très bien sur certains modules, mais se montre particulièrement inutile sur d'autre.
DVD 1
On commencera gentiment l'interactivité avec Les Bolides de Boulevard de la mort (11min52), qui s'imposera parmi les bonus les plus généreux de cette édition. Le reste de cette chronique détaille longuement quels points sont évoqués sur le deuxième DVD, mais l'essentiel est là : les voitures, la vitesse, les références et les volontés du réalisateur en matière de poursuite. C'est un peu expédié, certes, mais Tarantino est suffisamment clair dans son propos. Pour une "première édition", c'est plutôt correct.
C'est tout ce que l'on trouvera sur ce premier disque, accompagné des bandes annonces de Planète Terreur, Jackie Brown et Kill Bill, ainsi que le traditionnel Juke Box de l'éditeur donnant directement accès aux scènes musicales du film. Malheureusement, il ne s'agit que d'extraits bruts, avec les effets sonores.
DVD 2
Reservoir Girls : le casting selon Tarantino (21min14) :
On ne va pas se leurrer, le module Reservoir Girls est avant tout une petite featurette commerciale ventant les mérites et la présence des nombreuses comédiennes malmenées dans cette histoire de bolides. Pourtant, même dans une featurette, Quentin Tarantino est un orateur passionné et véhicule sans peine les motivations de ses choix multiples à travers son interview, entrecoupée de quelques interventions des principales intéressées. Le réalisateur survolera ainsi la façon dont il a auditionné ces dernières, ce qui l'a interpellé chez elles et la fameuse "extraordinaire" expérience que fut le tournage. Rien de concrètement révolutionnaire, mais compte tenu du propos du film (l'évolution de la femme dans le cinéma de genre), on ne pouvait pas passer à côté.
Zoé Bell : De cascadeuse à actrice (8min58) :
Un peu laissée pour compte dans le module précédent (quelques secondes seulement), la cascadeuse et désormais comédienne Zoé Belle reprend ici el devant de la scène. Véritable révélation du film, parce qu'elle est très drôle et s'exécute à quelques séquences proprement hallucinantes, ce module ne se penchera pas vraiment sur ses performances physiques mais plutôt sur l'improbable transition offerte par Tarantino qui lui ont autorisé un vrai rôle "parlant" à l'écran. Via quelques interviews croisées entre cette dernière et le réalisateur, on récapitule brièvement sa carrière ainsi que son arrivée et son accueil sur le projet.
Les As du volant (20min40) :
Voilà le bonus qu'on attendait le plus en se penchant sur l'interactivité de Death Proof : un vrai décorticage des prouesses automobiles des vingt dernières minutes du film. Bien évidemment, on reste dans un cadre débordant des cadres habituels du respect puisque personne ne tarie d'éloge, mais au-delà du discours subsistent les images et explications aussi spectaculaires que le résultat à l'écran... Chose compréhensive quand on devine que Tarantino a maintenu autant que possible l'authenticité des séquences en limitant les coupes et en s'abstenant d'effets en post-production. Alors oui Zoé Bell était vraiment agrippée sur le capot, oui les voitures étaient lancées à 130 kilomètres heures, et les tonneaux multiples de chaque voiture n'ont jamais été un bricolage de montage. On regrettera peut-être la trop courte durée du documentaire...
Kurt Russel est Mike le Cascadeur (9min34) :
Là encore on reste dans la franche camaraderie et les échanges de bons mots entre l'acteur et le réalisateur par interviews interposées. Franchement rien d'enrichissant sur un plan informatif si ce n'est quelques anecdotes sur l'arrivée et le tournage des séquences excentriques. Il y avait franchement mieux à raconter...
Des hommes sur le boulevard (8min16) :
Là encore on reste dans une galerie de portraits s'intéressant cette fois-ci au rares garçons du film, apparaissant entre autre dans la première partie du film Congratulation générale, jeunes gars (Eli Roth) en pamoison devant leurs idoles (Kurt Russel) sont au programme de ce qui restera une fois de plus une pièce commerciale sympa mais frustrante...
L'interactivité se conclura sur la bande annonce de Double Dare, documentaire suivant l'ascension de Zoë Bell (proposé en bonus dans un éventuel gros collector zone 1 ?), une version longue de la scène où Mary Elizabet Winstead chante dans sa voiture ainsi qu'un dernier bonus qui sera paradoxalement le plus sympa de tous malgré sa courte durée. En quelques 4min30, Tarantino nous parle de ses méthodes de montage (le délai était plus court ici que sur Reservoir Dogs) avant que ce petit module bascule dans un chutier où tous acteurs présents à l'écran saluent Sally, la monteuse du film.
Résulte de cette édition une interactivité un tantinet décevante tant il y avait bien plus de choses à dire ou à développer. En tout cas, connaissant le réalisateur et le soin particulier qu'il apporte à ses rééditions collector quelques mois (ou années) plus tard, il y a fort à parier qu'un joli coffret regroupant les deux films GrindHouse et les fausses bandes annonces manquantes verra le jour. De ce côté de l'atlantique ou de l'autre...