La version director's cut de La Reine Margot est proposée dans un nouveau master Haute Définition. Si le générique de début (fond noir, écriture blanche) est parsemé de petites tâches blanches, elles disparaissent aussitôt. L'absence de suppléments sur le premier disque laissait envisager une meilleure compression mais celle-ci accuse quelques faiblesses dans les scènes nocturnes. La scène du mariage laisse entrevoir le beau travail de restauration effectué pour l'occasion : les contrastes mettent en valeur les différentes teintes du rouge omniprésent et les couleurs chatoyantes. On remarque quelques arrières plans flous, quelques troubles durant les travellings rapides et un léger artéfact de compression durant la scène de chasse. Le point fort demeurant les nombreux gros plans où le regard d'Isabelle Adjani étincelle. La définition n'est pas irréprochable mais le master possède un éclat inédit mis en valeur par un 16/9 du plus bel effet.
Une fois la piste Dolby Digital 5.1. choisie, le logo Pathé promet une utilisation maximale des surrounds. Il faut attendre quelques scènes pour se rendre compte du mixage quelque peu artificiel qui en rajoute là où il ne faut pas (ambiances arrière alors que l'action se déroule devant les personnages) et en fait un minimum là où il aurait fallu en faire plus. Pour la longue scène du mariage, on apprécie le chant religieux idéalement axé sur les avants et quelques échos répartis sur les latérales afin de plonger le spectateur sur l'autel. Il faut attendre l'agression de Coligny et la mort de Charlotte de Sauve (Asia Argento) pour que les basses rappellent la présence du subwoofer, autrement c'est le calme plat. Quelques voix distillées par la centrale sont un peu trop chevrotantes et les dialogues repris en post-synchro sont au-dessus des dialogues pris en son direct, surtout en ce qui concerne les acteurs italiens Claudio Amendola et Virna Lisi. Quant à la piste stéréo 2.0., elle distille les mêmes effets que son homologue 5.1. mais dans un mixage plus harmonieux et surtout plus naturel.
Il est indispensable de noter le soin apporté aux menus qu'on ne retrouve que trop rarement aujourd'hui chez les éditeurs.
DVD 2
Entretiens avec Danielle Thompson et Patrice Chéreau (48min)
Attention, entretien passionnant ! Ne passez pas au travers de cette incontournable interview des deux scénaristes du film, Patrice Chéreau et Danièle Thompson, visiblement très complices, qui jugent La Reine Margot 14 ans après sa réalisation. Pour Thompson, le film était un long et passionnant défi dont elle garde toujours un merveilleux souvenir. Quant à Chéreau, très critique envers son travail, il avoue avoir encore l'entière fabrication du film dans sa tête et qu'il est très difficile pour lui de donner un jugement. Effectivement, le cinéaste se souvient de tout, de chaque jour de tournage, des incidents, des hauts et des bas survenus. C'est pourquoi on regrette l'absence d'un commentaire audio qui aurait été, on en est certain, passionnant. Comment est né le projet de La Reine Margot ? Au départ, Chéreau devait réaliser une nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires. Seulement, Jean Becker était bien avancé dans la production d'un projet similaire. Chéreau lui laissera finalement le projet et se tournera alors vers un autre roman de Dumas, La Reine Margot, conseillé par Claude Berri qui produira le film.
Thompson et Chéreau analysent ensuite le lourd et difficile travail d'adaptation. Il était évident pour les scénaristes de tailler leur propre narration à l'intérieur du roman touffu de Dumas, de fusionner deux personnages en un seul, d'en créer un et de se reposer sur quelques travaux historiques en plus du roman de base.
Dans une autre partie, les deux collaborateurs se remémorent le casse-tête lié au casting. Si Isabelle Adjani a toujours été envisagée, Chéreau rêvait d'avoir Monica Vitti pour le rôle de Catherine de Médicis, coproduction italienne oblige. Ayant essayé mille fois de convaincre l'actrice, Chéreau essuie un échec. Vitti refusait de se faire teindre les cheveux en noir et de les avoir tirés en arrière. Le rôle l'intéressait mais la comédienne a persuadé Chéreau qu'elle ne pourrait physiquement s'approprier le personnage. Carlo Ponti refuse que Sophia Loren (approchée par Chéreau) soit réduite au second rôle. Claudia Cardinale est envisagée mais pour le cinéaste, l'actrice est trop « gentille » pour le rôle. Bien que peu convaincu par son travail mais grâce à l'influence de quelques collaborateurs italiens, Chéreau rencontre Virna Lisi, actrice qui adore être transformée et enlaidie. C'est l'entente immédiate et la comédienne interprétera finalement Catherine de Médicis. Quant à la distribution masculine, le casse-tête est encore plus grand. Bien que Daniel Auteuil ait été envisagé très tôt pour le rôle de Navarre, Patrick Bruel est imposé par Berri pour interpréter La Môle. Mais Bruel souhaite jouer Henri de Navarre. Chéreau lui propose alors le rôle de Charles IX mais Bruel refuse. Le réalisateur portera son dévolu sur Jean-Hughes Anglade.
Dans la dernière partie de ce passionnant entretien, Chéreau et Thompson passent en revue l'esthétique du film, les repérages (de 1989 à 1992), les costumes, le choix de la mise en scène (filmer tel un film contemporain), les décors. En ce qui concerne la mise en scène, Chéreau déclare être véritablement devenu cinéaste avec La Reine Margot. Ayant préparé les deux premiers mois de tournage en studio, le réalisateur prend conscience que les quatre dernières semaines de tournage n'ont pas été prévues pour les extérieurs. Depuis ce tournage, Chéreau ne prépare plus ses scènes longtemps à l'avance et se laisse porter par son intuition juste avant de tourner.
En ce qui concerne le montage, deux équipes travaillaient simultanément dès la fin octobre 1993 pour que le film soit prêt pour le mois de mai de l'année suivante afin d'être projeté à Cannes. Chéreau se retrouve devant un film long et les coupes sont nécessaires. Le montage de 2h40 présenté à Cannes est celui disponible sur ce dvd. En même temps, France 2 commande au cinéaste une version destinée à la télévision de trois heures qui sera diffusée au mois de septembre. Pour la version sortie en salles, Chéreau coupe quelques scènes mais en rallonge d'autres qui ne durent que onze minutes de moins par rapport à la version cannoise. Selon Chéreau, la version plus courte est un peu trop radicale. « La version longue, celle de Cannes (et du dvd), malgré quelques signes de faiblesse ou de fatigue, est celle que je préfère ». Une autre version encore plus courte existe aux Etats-Unis, produite par les frères Weinstein pour Miramax, qui désiraient un film moins « gore » et qui virent leurs espoirs ruinés par Chéreau qui refusa leurs suggestions. La Reine Margot est par ailleurs le rare exemple d'un film français pensé exportable aux Etats-Unis. Aujourd'hui encore, Chéreau ne cache pas qu'il referait le film autrement.
Galeries photos
Voici de superbes galeries divisées en cinq catégories : le tournage, dont les photographies sont signées Luc Roux (4min19), les coulisses (par Luc Roux également) (2min22), un album impressionnant de polaroïd par Suzanne Durrenberger (scripte) (3min36), les dessins préparatoires et les costumes par Moidel Bickel (César des meilleurs costumes en 1995) (3min55), les décors et accessoires (scène du mariage, maquettes, têtes coupées de Vincent Perez et Claudio Amendola) (1min26).
Essais costumes (Archives 1993) (5min52)
Issues d'une VHS, les images sont d'honnête facture. Virna Lisi se fait aider d'un interprète pour parler avec Patrice Chéreau derrière sa caméra. Vincent Perez, Dominique Blanc, Pascal Greggory, Jean-Hughes Anglade, Jean-Claude Brialy et Asia Argento passent ensuite devant la caméra.
Comparatif film/story-board (par Maxime Rebière)
Focus sur deux scènes, celles du mariage (5min) et de la chasse (6min45).
Scènes coupées
Dommage que ces sept scènes coupées ne soient pas commentées. De plus, certaines scènes supprimées abordées dans l'entretien manquent à l'appel.
a) La Môle chez Coligny (53 secondes)
Au moment de sa fuite, La Môle demande à Coligny de venir avec lui pour échapper au massacre. Coligny refuse, les Catholiques arrivent et La Môle s'enfuit par les toits.
b) Le charnier (1'10)
La scène est plus longue et comporte des gros plans supplémentaires sur les corps dispersés avant d'être jetés dans le charnier.
c) Le réveil de Coconnas (1min50)
Suite de la scène précédente où La Môle, après son réveil fait le souhait de revoir Margot et de la délivrer d'Henri de Navarre.
d) Le livre de chasse (1min06)
Catherine de Médicis trouve le livre de chasse que La Môle avait revendu.
e) Henriette et Coconnas (1min19)
La scène apprenait plus rapidement aux spectateurs la liaison entre Henriette et Coconnas, surpris par La Môle alors qu'ils se disputent dans la chambre. Dans le film, La Môle arrive au moment où Coconnas est assis sur le sol en train de boire. On apprend la liaison que dans la scène suivante.
f) Le duel La Môle-Maurevel (2min38)
Scène plus longue que celle du film.
g) Le retour du roi d'Espagne (28 secondes)
Catherine de Médicis apprend que le Roi d'Espagne vient de passer la frontière. Elle ordonne à un cavalier d'aller à sa rencontre pour le presser.