Le transfert du DVD de Shinobi est réalisé à partir d'un master très propre. Sans être irréprochable de précision, la définition est nette et la compression se fait discrète tout au long du film, laissant entrevoir de nombreux détails de décor en arrière-plan. On pourra toutefois reprocher à l'image un certain manque de piqué dans l'ensemble, même si certains plans possèdent un vrai relief - les gros plans sur les visages notamment. La gestion des contrastes est très satisfaisante et les noirs sont profonds dans les scènes de jour comme de nuit. La palette colorimétrique est vive et naturelle, très fidèle au film tel qu'on a pu le découvrir en salles.
Les quatre pistes proposées se divisent en deux groupes distincts qui ne tiennent pas à leurs spécifications sur le papier. D'un côté, les pistes françaises DTS 5.1 et Dolby Stéréo 2.0, et de l'autre, les pistes japonaises Dolby Digital 5.1 et Dolby Stéréo 2.0. Les pistes japonaises se caractérisent certes par un effet de pal speed-up qui les rend légèrement plus aiguës. Mais si l'on fait abstraction de cet aspect, le fait le plus notable est que ces pistes sont aussi beaucoup plus puissantes et dynamiques que les pistes françaises. Le DTS 5.1 français ne parvient en effet pas un seul instant à égaler le superbe DD 5.1 japonais, extrêmement environnant et percutant, et dont les qualités de mixage et de répartition entre les différentes enceintes permettent de profiter au mieux des excellentes scènes de combat du film. A côté, le DTS 5.1 français semble timoré, tant du point de vue des bruits d'ambiance que des musiques de fond. Si les arrières sont sollicitées, elles le sont avec nettement moins de punch que sur le DD 5.1 japonais. La même chose peut être dite des deux pistes Stéréo, la piste japonaise se montrant aussi bien plus puissante et enthousiasmante que son homologue française, offrant au passage une très bonne compensation à ceux qui ne possèderaient pas le home cinema.
Cette édition collector propose, outre les deux DVD de bonus et le film en HD-DVD, un livret de 12 pages détaillant la genèse du film, un CD de la très belle bande-originale, le carnet de route du réalisateur et le roman de Futaro Yamada à l'origine de Shinobi.
DVD BONUS 1
Ce premier DVD de bonus rassemble les documentaires japonais relatifs à Shinobi.
Making of des effets spéciaux (41'12)
Les effets spéciaux du film concernant à peu près tous les personnages, ce supplément japonais commence par s'intéresser aux "doubles digitaux" (Digital Double) créés pour Shinobi à partir des silhouettes et des caractéristiques des comédiens eux-mêmes. Le premier combat de Yashamaru (Tak Sakaguchi) sert d'exemple pour montrer en quoi consiste la modélisation puis les différentes simulations nécessaires au rendu de la scène. On passe ensuite directement au combat entre Koshirô et Yashamaru (toujours lui), réalisé à partir de deux plans distincts. La suite, ce sont les décors digitaux du film, dont on ne remarque pas du tout qu'ils sont artificiels par endroits, même sur grand écran, tant ils sont réalistes. Autre point très intéressant : le fait que certains effets spéciaux, comme les fils de Yashamaru, soient conçus sur papier et animés comme dans un film ou une série d'animation. Le superbe plan qui voit Gennosuke s'élancer vers la lune pour combattre les ninjas nous est bien sûr expliqué dans ses moindres détails.
La suite du documentaire, c'est la conférence que donnaient les créateurs des effets spéciaux du film en décembre 2005 à Tokyo. Kazuhiko Mino (de Links Digiworks), chargé des doubles digitaux, y explique au public le détail du principe, en classant les scènes selon qu'elles font intervenir exclusivement les doubles ou qu'elles incluent aussi les acteurs eux-mêmes. Si le duel Koshirô / Yashamaru continue à y servir d'exemple pour l'utilisation de doubles digitaux, cette partie du supplément est moins fun que la première. Elle est cependant beaucoup plus précise et instructive. Toutes les étapes du processus de production de ces effets spéciaux y sont passées au crible, tableaux à l'appui, de la pré-production à la post-production, avec un rare souci du détail pour ce type de bonus. Les spécificités des différents logiciels utilisés sont présentées un à un, principalement sur Motion Builder et Maya. Passionnant.
Making of : scène d'un combat (4'36)
Et revoilà Yashamaru ! C'est de nouveau la première apparition de ce personnage, soit son combat contre les hommes de Yagyû, qui nous est présentée en guise d'exemple. Cette fois, il s'agit de détailler le tournage de la scène de combat, avec la contrainte posée par le relais du double digital lorsque le personnage saute sur le toit. Autre souci : les manches de Yashamaru, qui ne rendent pas toujours l'effet souhaité. On fait aussi la connaissance de Ken Sonomura, la doublure de Tak Sakaguchi. Un peu court mais sympathique.
Mise en parallèle du film et du storyboard (38'10)
La mise en parallèle concerne des scènes choisies - et elle sont nombreuses. Parmi les plus intéressantes en termes de comparatif, il y a bien sûr la scène 1 tout d'abord, qui raconte la rencontre entre Gennosuke et Oboro, et qui est reproduite fidèlement par rapport à son modèle sur le papier. On retrouve les deux personnages dans la scène 13 sur laquelle on s'attarde aussi assez longuement. Ensuite, viennent les scènes 17/18, où Yashamaru et Koshirô font étalage de la puissance de leurs clans respectifs devant Yagyû. Là aussi, il est très amusant de voir à quel point le résultat final est proche du storyboard, malgré (ou à cause de ?) l'action complexe qui se déroule à l'écran. Du point de vue des scènes de combat, le comparatif est évidemment particulièrement bienvenu. On en vient vite aux scènes 45-48, le combat Koshirô/Yashamaru, lui aussi très préparé si l'on en juge par la fidélité du film au support papier, avant de passer à la scène 51 dans laquelle Tenzen se fait tuer une première fois et à la scène 52 qui voit les Koga se faire assiéger par les Iga. Autre scène notable, la 64, où Gennosuke affronte les ninjas à la nuit tombée. La bonne idée de ce supplément est d'avoir découpé le film suivant la pertinence des scènes au lieu de se contenter de tout montrer à la suite, sans distinction.
Mise en parallèle du film et du storyboard : mouvements de caméra (3'08)
Il s'agit cette fois d'extraits du storyboard réalisé par Ten Shimoyama, qui a plutôt un bon coup de crayon si l'on en juge par ces esquisses. Les annotations de mise en scène sont très nombreuses et détaillées, là encore.
Présentation des armes (8'50)
Le responsable des équipements, Ryûji Hayakawa, nous présente chacune des armes des combattants de Shinobi. Il nous explique dans quel esprit de simplicité pratique il a souhaité créer ces armes, pour coller au mieux aux origines paysannes des ninjas. L'arme de Koshirô tient ainsi à la fois de la faucille et du Maruryû ; en ce qui concerne Yashamaru, il est resté assez fidèle au roman à un détail près. Il y a aussi le fameux Getsurin de Tenzen, hérité du Chakram indien et dont Hayakawa ne se lasse pas. Le fait qu'il présente lui-même ses créations rend le supplément beaucoup plus vivant, puisqu'il n'hésite pas à mettre en relation la personnalité des personnages avec leurs techniques de combat. Les illustrations crayonnées des personnages sont au passage absolument superbes.
Les décors (8'44)
Toshihiro Isomi, responsable des décors, nous explique pour quelle raison tel décor a été choisi, comme Iwafume où le village de Manjidani a été entièrement construit en l'espace d'un mois dans des conditions naturelles très difficiles. L'équipe déchantera au moins une fois, en retrouvant un beau matin les constructions balayées par un vent violent.
Ce premier DVD de bonus s'achèvent sur les deux bandes-annonces cinéma japonaises (1'30) et les onze spots TV (6'19) de Shinobi.
DVD BONUS 2
L'univers de Ten Shimoyama (1h)
Il s'agit là du supplément exclusif de cette édition, réalisé lors de l'édition 2007 du Festival du Film Asiatique de Deauville où Shinobi concourait dans la compétition Action Asia. Ce documentaire s'ouvre d'ailleurs sur l'arrivée sur scène du réalisateur chargé de présenter son film au public du festival. Il se poursuivre sous forme d'interview entrecoupée d'extraits de Shinobi (un peu trop fréquents et surtout trop longs) mais aussi de bandes-annonces de certains de ses autres longs métrages, comme Cute, son premier film, ou encore Innocent World (avec Masanobu Ando). L'une des curiosités de ce documentaire est que l'on y découvre des extraits des clips vidéo très colorés que Ten Shimoyama a tournés pour de nombreuses stars locales de styles musicaux très divers. Le réalisateur évoque ses deux seuls longs métrages de commande, Muscle Heat et St John's Wort, qui lui ont permis d'avancer chacun à leur manière - apprendre à travailler avec des équipes étrangères sur Muscle Heat, par exemple. Puis il en vient à Shinobi, à la difficulté de rassembler une équipe dont les membres sont issus d'univers si différents, une difficulté qui lui a semblé stimulante au bout du compte. Il développe d'autre part de manière intéressante les thématiques du film, à la fois très japonaises et universelles, et . Il s'attarde bien sûr longuement sur les conditions de tournage en décors naturels, qui n'ont pas été précisément aisées, et sur les scènes d'action qui ont demandé plus de trois mois de post-production d'effets spéciaux. A l'issue de ce reportage, on reste sur l'impression que Ten Shimoyama est quelqu'un de très loquace, intéressant et sympathique.
Critique du HD-DVD à venir.