500 jours ensemble

Pouvoir découvrir sur grand écran une comédie romantique américaine originale, au XXIe siècle, est tellement rare qu'il est impossible de passer à côté. Et en allant voir 500 Jours ensemble, blasés que nous sommes, nous nous attendions vraiment à voir une énième histoire d'amour au démarrage faussement cynique, qui ferait semblant de sortir des clous avant d'y revenir sagement et d'étaler un cahier des charges mielleux dans ses deux dernières bobines. On imaginait déjà le film de Marc Webb comme le "feel-good movie" de l'année, qui ferait s'extasier l'intelligentsia sur le "nouveau cinéma indépendant américain" (sic) avant de tout rafler aux Golden Globes et d'être oublié l'année d'après. Bref, en rentrant dans la salle, nous nous attendions à beaucoup de choses sauf à être surpris. Et c'est précisément ce qui s'est passé.

500 Jours ensemble est sans doute la comédie romantique américaine la plus originale et la plus emballante qu'il nous ait été donné de voir depuis Punch-Drunk Love de Paul Thomas Anderson. Appuyée par une direction artistique réfléchie (très intéressante utilisation des couleurs dans les costumes, décors et ambiance), la mise en scène de 500 jours ensemble, audacieuse et rafraichissante (on y trouve une hilarante séquence de comédie musicale, une introduction aux relents d'Amélie Poulain, ainsi qu'une très belle scène en split-screen), peut se targuer d'être une des plus innovantes de l'année. Et lorsqu'on sait qu'il s'agit là du tout premier film du jeune réalisateur Marc Webb, on ne peut que se montrer admiratif d'une telle profusion d'idée, d'une telle maitrise de la narration et on apprécie d'autant plus ce que notre rédacteur en chef adoré appellerait "une proposition de cinéma". Webb a des choses à raconter et sait comment faire pour les raconter, avec des images, avec du son, avec des gestes et des paroles. A noter au passage que la BO du film est assez jouissive, enchainant Les Smith avec Daryl Hall & John Oates, en passant par les Clash, Simon et Garfunkel et Carla Bruni !

Mais 500 jours ensemble ne peut se résumer à un film de metteur en scène. Ecrit par un duo de scénaristes quasi-débutant, ce film s'attaque à plusieurs thèmes rarement abordés dans les comédies romantiques mainstream et impose au final une vision à la fois tendre et juste, malicieuse et fantaisiste au départ puis finalement tristement réaliste et gentiment désabusée. Tout le contraire des comédies romantiques actuelles donc, qui partent d'un postulat cynique pour finir les deux pieds dans la guimauve. S'amusant à briser un à un tous les clichés romantiques vus au cinéma ces dernières années, arborant une narration totalement déstructurée et intelligemment décousue rendant percutantes nombre de séquences casse-gueule, réfutant la thèse d'un amour universel, passionnel et éternel, s'amusant à décortiquer quelques mécanismes d'auto-persuasion masculins (basé sur l'analyse crapuleuse de quelques "signes" qui veulent dire tout et leur contraire), 500 jours ensemble brille par son scénario original et rythmé. Au cœur de l'intrigue, deux personnages éminemment sympathiques, interprétés par les excellents Joseph Gordon-Levitt (l'éternel amoureux lunaire) et Zooey Deschanel (la pétillante blasée de l'amour), tous deux au diapason de la première à la dernière image du film. Un couple qui avec le temps pourraient devenir, si le film rencontre le succès qu'il mérite, un duo de cinéma aussi emblématique que ceux formés par Harry Burns et Sally Albright (Quand Harry rencontre Sally), par Jesse et Céline (Before Sunrise, Before Sunset), par Charlotte et Bob Harris (Lost in translation) ou encore par Barry Egan et Lena Leonard (Punch Drunk Love). C'est tout le mal qu'on leur souhaite.