99 Francs
Le 01/10/2007 à 12:40Par Romain Le Vern
En prenant comme personnage principal une loque humaine sans cœur ni remords; en peignant l'univers putride des publicitaires dont le but consiste à titiller le regard de la ménagère de moins de cinquante piges pour la berner; en s'autorisant de sacrées audaces (clins d'oeils au cinéma de Darren Aronofsky, détournement publicitaire, séquence animée, double fin); en rendant compte d'une société aliénée et maladive, le cinéaste propose un univers déliquescent de drogue, d'alcool et de sexe. Donne à réfléchir sur les forces secrètes qui nous manipulent. Et organise in fine une impressionnante descente aux enfers oscillant entre réalité et cauchemar, racontée avec l'aplomb d'un Bret Easton Ellis mal luné.
Jeune concepteur bobo et blasé, Octave bosse dans une agence de pub parisienne. Lassé des excès, il aimerait se faire licencier. Mais il n’y arrive pas. Une idylle réussira-t-elle à briser son train-train quotidien ? Non: Octave descend aux enfers.
Après Steak, de Quentin Dupieux, expérience bizarroïde où Eric passait le film entier à chercher son Ramzy, 99 Francs se présente comme la seconde comédie française de l’année dans laquelle un comique populaire (Jean Dujardin) écorne son image publique. Stylisé et convulsif, l’ensemble ne ressemble à rien de connu sur le sol hexagonal. Et si on devait lui trouver un équivalent, il faudrait chercher vers Fight Club, de David Fincher qui dénonçait avec la même virtuosité l’horreur d’un monde de pubs. Sensiblement remis de ses expériences chamaniques (Darshan et Blueberry), Jan Kounen quitte les sentiers hasardeux d’un cinéma sensoriel pour négocier un virage radical en signant l’adaptation cynique du roman homonyme de Frédéric Beigbeder. Alors que l’on aurait pu penser que l’enfant terrible du cinéma français reviendrait dans un style plus consensuel, le réalisateur gonflé à bloc ne fait que vomir sur la société de consommation de manière encore plus féroce que son confrère écrivain et bouscule les conventions d’un cinéma franco-français trop (con)centré sur son nombril. Résultat? Pervers et contre tous.