Gravity : dans l'espace, personne ne vous entendra applaudir ! [Critique]
Le 22/10/2013 à 17:13Par Jonathan Butin
Intense, sublime, spectaculaire, ingénieux... il n'y a pas assez de superlatifs pour qualifier Gravity. Une expérience de cinéma total, une réussite à tous les niveaux qui restera sans doute dans les mémoires comme le meilleur film de l'année. Découvrez ci-dessous notre enthousiaste critique du film GRAVITY.
GRAVITY : la Critique du Film
Si 2013 s'annonçait comme l'année de la science fiction avec les sorties enchaînées de quelques grosses cylindrées (Oblivion, Elysium, Star Trek Into Darkness, Pacific Rim...) aucune ne s'est révélée aussi transcendante que Gravity. La tête dans les étoiles et le palpitant au bord de la rupture au sortir de la salle, voilà des symptômes qui ne mentent pas quant à la qualité du dernier bébé d'Alfonso Cuarón, réalisateur en pleine ascension qui nous avait déjà régalé avec Les Fils de L'Homme, succès critique en 2006.
Les sourires s'effacent dans 3,2,1...
Ryan Stone (Sandra Bullock, parfaitement castée dans le rôle d'une femme presque comme les autres), spécialiste en ingénierie médicale, est affectée à la réparation du télescope Hubble à bord de la navette Explorer en compagnie de Matt Kowalski (George Clooney), la rockstar des astronautes. La pauvre Stone à bien du mal à ne pas rendre son déjeuner et pour cause, il s'agit là de sa première mission dans l'espace après seulement 6 mois d'entraînement sur simulateur. Malheureusement pour elle, cette mission de routine va se transformer en cauchemar lorsque Houston leur annonce, via la radio crépitante, la menace imminente d'une pluie de débris, conséquence directe de la destruction d'un satellite russe. La mission doit être annulée en catastrophe mais il est déjà trop tard. L'averse mortelle frappe de plein fouet Explorer, détruisant tout sur son passage. Privés de point d'ancrage comme de moyens de transport, le duo d'astronautes se lance dans une course contre la montre en quête d'un refuge dans l'immensité de l'espace, sous la menace perpétuelle d'une nouvelle vague débris et de celle, plus immédiate, du manque d'oxygène.
"J'ai l'air à l'aise comme ça mais dans ma tête c'est la panique"
Gravity : la science fiction selon Cuarón
Gravity, véritable bijou de science fiction n'est pas pour autant un fantasme futuriste. On ne trouve pas ici d'hyper-vitesse, de distorsion et encore moins de petits hommes verts, gris ou bleus anthracites. Gravity est un récit d'aventure, de deuil et de chaos résolument ancré dans le réel et se basant sur les possibilités actuelles de l'exploration spatiale. Ce réalisme poussé à l'extrême est la clef de voûte de l'identification aux personnages de Bullock et Clooney. Un rappel constant que même le plus chevronné des astronautes n'est rien de plus qu'un homme dans une combinaison, loin, très loin de chez lui. Dans un environnement qui ne pardonne aucune erreur, livré à l'apesanteur et privé de points de repère, un être humain n'a pas plus de maîtrise sur sa dérive qu'une feuille morte n'a de prise sur sa chute. Et lorsque les communications avec la Terre viennent à cesser, l'expression « seul au monde » prend alors tout son sens. Avec seulement deux acteurs principaux à l'écran, on aurait pu craindre que Gravity se résume à 90 minutes de clins d'œil rassurants de la part George Clooney et de regards affolés de Sandra Bullock. Que nenni.
Dans l'espace, personne ne vous entendra crier (il fallait bien la placer quelque part)
Gravity : une immersion garantie
La véritable prouesse de Gravity est son immersion instantanée. Une immersion qui passe par l'image, bien entendu, mais aussi par le son, ou plutôt l'absence de son. Là encore le choix de Cuarón de privilégier le réalisme se révèle payant. Ce silence omniprésent pousse l'œil à scruter l'environnement à la recherche d'un danger pouvant surgir de toute part à très haute vélocité. La caméra subjective, brillamment utilisée, fait merveille dans ces instants suspendus, seulement rythmés par la respiration saccadée des personnages. Jusqu'au moment où tout s'accélère et que les estomacs se nouent tandis que se dessine aux loin la fameuse pluie de débris, promesse d'un chaos imminent seulement trahi par l'écho sourd des vibrations de la tôle pulvérisant la tôle. Bluffant.
Que dire de l'esthétique somptueuse du film ? Gravity peut se targuer de représenter l'espace comme jamais auparavant. On en oublierait presque que le film a été tourné bien en sécurité sur le plancher des vaches et que seuls les visages des personnages sont réels, le reste étant le fruit de la crème des effets spéciaux mis au point par les magiciens de chez Framestore. Mieux encore, loin d'être une vulgaire vitrine technologique, les effets spéciaux, comme la 3D, font partie intégrante de l'expérience Gravity. Une expérience qui n'aurait tout simplement pas de raison d'être sans cette technologie de pointe.
Mais ces joujous technologiques ne seraient eux-mêmes que très peu de choses sans le talent d'Alfonso Cuarón et le génie d'Emmanuel Lubezki (déjà responsable de la photographie irréprochable des Fils de L'Homme) pour en capter la beauté. On connaissait la propension de Cuarón à utiliser les plans-séquences à outrance (les plans du film Les Fils de L'Homme durent en moyenne une quarantaine de secondes) mais sa maitrise atteint ici des sommets. C'est bien simple, on a l'impression (fausse bien évidemment) que Gravity à été tourné sans aucune coupure. La caméra de Cuarón, tournoie, virevolte librement, suivant les personnages avec aisance où qu'ils aillent, de l'infini extérieur au confinement des navettes. A cela s'ajoute un récit se déroulant quasiment en temps réel et ne souffrant d'aucun temps mort. Du télescope Hubble à la station chinoise Tiangong en passant par la station spatiale internationale, la dérive de Bullock et Clooney ne laisse nullement le temps de souffler. Avec 90 minutes au compteur, la durée du film joue également en sa faveur. Là où la plupart des blockbusters sont artificiellement gonflés pour atteindre les 2 heures, Gravity, lui, est parfaitement calibré pour ne jamais perdre l'attention du spectateur. Bref, chez Filmsactu, on vous le dit,en un mot comme en cent : courrez-y !