Daybreakers
Le 02/03/2010 à 17:15Par Elodie Leroy
Sans doute animés de bonnes intentions lors du lancement du projet, les frères Spierig se perdent dans un cahier des charges privilégiant l'action à tout prix au détriment de la réflexion, alors même que l'univers de Daybreakers proposait plusieurs pistes intéressantes sur le plan du contexte comme des personnages. Un naufrage artistique desservi par une réalisation brouillonne et un montage monotone, mais aussi par le non-jeu de son acteur principal Ethan Hawke.
Découvrez ci-dessous la critique du film Daybreakers
Avec son pitch poussant à son extrême limite le point de départ de True Blood, la série d'Alan Ball, nous attendions Daybreakers avec une certaine impatience. D'abord parce que l'idée d'une confrontation entre deux espèces - vampires et humains - dans un monde futuriste où les premiers auraient radicalement pris le dessus sur les seconds, forçant la société à se réorganiser de fond en comble en fonction de leurs besoins, était alléchante pour tout fan de film d'anticipation qui se respecte. Ce contexte de quasi extinction de la race humaine était approché dans l'adaptation de Je suis une Légende mais le film n'allait guère jusqu'au bout de l'idée développée dans le roman de Richard Matheson, ce qui laissait aux frères Spierig la voie (presque) libre sur le grand écran. En vérité, les pistes intéressantes ne sont pas ce qui manque dans Daybreakers, de la pénurie de sang à la déchéance des vampires manquant de nourriture, en passant la cruelle hiérarchie sociale qui en découle et les conflits intérieurs animant les Vampires dont un membre de la famille a refusé de se transformer. Là où le bât blesse immédiatement, c'est dans l'écriture même du scénario qui se contente d'énoncer ses thématiques sans jamais se risquer à creuser plus loin, à apporter un semblant de développement à l'une d'entre elles. Visiblement porté par un cahier des charges l'obligeant à se montrer efficace en toute circonstance, Daybreakers enchaîne les péripéties devant la caméra avec une monotonie digne d'un téléfilm français, que l'on doit notamment à un montage brouillon et une absence d'inventivité dans la réalisation.
Renforcées par un style visuel approximatif, cette fadeur formelle et cette absence de suite dans les idées auraient pu être pardonnables si seulement les personnages avaient déclenché un tant soit peu d'empathie. Or dès lors que le directeur de casting a arrêté son choix sur Ethan Hawke dans le rôle principal, il a condamné irrémédiablement le spectateur à sombrer peu à peu dans l'ennui. Si le but de l'histoire était de montrer comment Edward Dalton (Ethan Hawke, donc) allait reconquérir son humanité, nous sommes loin de la tension émotionnelle d'un Equilibrium, autre film d'anticipation réalisé avec un budget similaire (20 millions de dollars environ) et relatant lui aussi le parcours intérieur d'un individu dans un monde futuriste hostile, avec de l'action de surcroît. N'est pas Christian Bale qui veut : pour retranscrire la redécouverte de ses sensations humaines, Ethan Hawke se montre aussi expressif et chaleureux qu'un réfrigérateur. Le reste du casting, pourtant habité par quelques gueules de cinéma que nous tenons en haute estime, s'avère bien trop sous-exploité pour relever le niveau, de Willem Dafoe en mercenaire réduit à un simple cliché à Sam Neill en méchant cynique plein de potentiel mais dont l'intérêt s'effrite à mesure qu'il perd de son ambigüité. Restent quelques éclaboussures gore et un rythme suffisamment soutenu pour maintenir l'attention jusqu'au bout, mais c'est bien peu pour sauver du naufrage cette production bâclée et dénuée d'inspiration. Dommage, nous aurions aimé aimer Daybreakers.